Le ministre du Travail confirme que l’Adem ne réclame jamais le remboursement des prestations avancées par le Fonds pour l’emploi auprès de l’employeur du salarié frontalier licencié abusivement, alors qu’elle le fait systématiquement pour les salariés résidents. (Photo: Matic Zorman / Archives)

Le ministre du Travail confirme que l’Adem ne réclame jamais le remboursement des prestations avancées par le Fonds pour l’emploi auprès de l’employeur du salarié frontalier licencié abusivement, alors qu’elle le fait systématiquement pour les salariés résidents. (Photo: Matic Zorman / Archives)

La complexité des procédures en matière de licenciement abusif empêche le recouvrement par l’Adem des prestations indûment versées, de même que par le Fonds pour l’emploi, souligne le ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Économie sociale et solidaire Dan Kersch.

Dans une question parlementaire au ministre LSAP, le député (CSV) évoque l’existence d’une inégalité de traitement entre résidents et frontaliers en cas de licenciement abusif. «Selon le Code du travail et la jurisprudence, l’employeur est tenu de rembourser à l’Adem les indemnités de chômage payées qui sont en relation causale avec un licenciement abusif», rapporte le député.

Or, l’Adem «déclare systématiquement devant le tribunal du travail qu’elle n’a pas de revendications de ce genre à l’égard des employeurs ayant licencié abusivement un frontalier, malgré le fait que le Fonds pour l’emploi doive rembourser, en application du règlement (CE) n°883/2004 et du conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, les indemnités de chômage payées par l’État de résidence». Et ce alors que l’Adem réclame les prestations indûment versées à l’employeur s’il s’agit d’un salarié résident.

Il n’est dès lors pas possible de faire valoir de revendications ou de les chiffrer lors de la mise en intervention du Fonds pour l’emploi dans les litiges concernant la régularité ou le bien-fondé du licenciement ou de la démission d’un salarié frontalier.

Dan Kerschministre du Travail, de l’Emploi et de l’Économie sociale et solidaire

Une situation clairement discriminatoire, que confirme le ministre du Travail après consultation de l’Adem, et qui est «imputable au délai d’introduction des demandes de remboursement» prescrit par la législation européenne sur la coordination des systèmes de sécurité sociale. En cas de licenciement abusif, c’est l’institution du lieu de résidence qui peut se retourner contre l’employeur pour se faire rembourser les prestations de chômage versées à tort.

Or, les textes européens laissent un délai de six mois aux homologues de l’Adem en France (Pôle emploi), en Belgique (Onem) ou en Allemagne (Arbeitsamt), à compter du dernier versement des indemnités de chômage contestées, pour adresser une demande de remboursement au Luxembourg. Celui-ci rembourse par le biais du Fonds pour l’emploi.

Ce calendrier se heurte à celui du recours intenté devant la juridiction du travail par le salarié arguant d’un licenciement abusif. «Il n’est dès lors pas possible de faire valoir de revendications ou de les chiffrer lors de la mise en intervention du Fonds pour l’emploi dans les litiges concernant la régularité ou le bien-fondé du licenciement ou de la démission d’un salarié frontalier», explique .

Une autre discrimination envers les salariés résidents

Le ministre cite de lui-même une autre situation dans laquelle le salarié frontalier est avantagé par rapport au salarié résident. Le Code du travail veut que le salarié résident n’ait droit à aucune indemnité de chômage lorsqu’il est licencié pour faute grave ou lorsqu’il abandonne son poste (démission non justifiée).

Il peut toutefois demander au tribunal du travail de lui accorder cette indemnité le temps que l’affaire soit jugée. S’il s’avère que son licenciement est jugé justifié ou sa démission non justifiée, «dans ces cas-là, le salarié résident est condamné au remboursement au Fonds pour l’emploi de tout ou d’une partie des indemnités de chômage qui lui ont été versées par provision», indique le ministre LSAP.

Or, ce n’est pas le cas pour les salariés frontaliers, avec quelques nuances selon leur pays de résidence. «En France (…) les salariés sont admis au bénéfice des allocations de chômage directement après la fin de leur contrat, même en cas de faute grave ou lourde, alors qu’en Belgique, une exclusion au bénéfice des allocations pendant quatre semaines au moins peut être appliquée, et finalement, en Allemagne, l’exclusion peut porter sur trois à douze semaines», précise M. Kersch. «Mais en aucun cas, les indemnités de chômage accordées ne donnent lieu à un remboursement par les personnes concernées.»

Le chômage des frontaliers, un sujet sensible

Le jeu des frontières pénalise donc l’employeur de salariés résidents d’un côté, appelé à rembourser les prestations avancées par le Fonds pour l’emploi en cas de licenciement abusif, contrairement à l’employeur ayant licencié abusivement un salarié frontalier, et les salariés résidents de l’autre, forcés de reverser au Fonds pour l’emploi les prestations reçues, alors que les frontaliers n’y sont pas contraints.

Ce rappel intervient dans un contexte tendu entre le Luxembourg et ses partenaires européens, alors que la Commission européenne a soumis il y a quelques mois une réforme de la coordination des systèmes de sécurité sociale visant à faire et l’accompagnement des frontaliers durant six mois. Une perspective qui fait trembler l’Adem et le ministère du Travail.

Le prédécesseur de Dan Kersch au Rousegärtchen, , à ce texte, dont le vote au Parlement européen a été  avant les élections du mois de mai. À charge pour le ou la futur(e) commissaire aux Affaires sociales (un portefeuille que brigue justement M. Schmit) et au Parlement issu des urnes de s’accorder sur un nouveau texte.