Sans surprise, les rendements sur titres auront été des plus catastrophiques en 2022. Sur un portefeuille composé à 60% d’actions et 40% d’obligations, J.P. Morgan Asset Management a, par exemple, calculé que le rendement annuel moyen était d’environ -17% depuis le début de l’année, à la date du 11 novembre. À titre de comparaison, pareil portefeuille a connu des rendements autour des +10% en 2021 et +14% en 2020.
Sur base de telles performances, les investisseurs ont fait preuve d’énormément de méfiance, n’épargnant pas l’industrie de la gestion d’actifs. «Les fonds communs de placement domiciliés en Europe se trouvent engagés sur une route de rédemptions», a indiqué Nicolas Deblauwe, country head Benelux & France de J.P. Morgan Asset Management, à l’occasion de la présentation des dernières prévisions de marché du gestionnaire. «250 milliards de dollars sont sortis des filets des fonds communs de placement et des ETF en Europe.»
L’effet réglementaire
L’image serait négative si l’on s’arrêtait ce chiffre. Pourtant, il cache un changement majeur en cours, car les fonds qui ont connu le plus de rédemptions en 2022 sont ceux qui ne sont pas catégorisés comme durables, les fonds «Article 6» et «Article 8» selon la catégorisation de la Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR). Quant à eux, les fonds «Article 8 plus» et «Article 9», investissant respectivement partiellement et entièrement dans des actifs durables, ont attiré un flux positif de souscriptions en 2022. À la fin octobre, près de 13 milliards de dollars étaient ainsi arrivés en souscriptions dans les fonds «Article 8 plus» et 36 milliards dans les «Article 9».
Force est de constater que, comme espéré, les exigences de transparence imposées par la SFDR et la prise en compte des critères de durabilité par les investisseurs au travers de MiFID II ont canalisé une partie des flux financiers vers les actifs ESG. Pour autant, la tendance n’est pas neuve. En témoignent les flux vers les fonds obligataires ESG. Au cours des trois dernières années, ces types de fonds investissant dans des «Green Bonds» ont enregistré une hausse de +52% de leurs actifs sous gestion. Sur la même période, les fonds obligataires catégorisés en «Article 9» ont, pour leur part, affiché une hausse de +47% et les fonds obligataires «Article 8 plus» ont connu une augmentation de +29%.
150.000 milliards de dollars
La canalisation des flux financiers vers des actifs durables est d’autant plus importante que la transition énergétique requiert des «investissements massifs», rappelle J.P. Morgan Asset Management. Selon le gestionnaire d’actifs, il serait nécessaire d’investir plus de 5.000 milliards de dollars annuellement dans les énergies propres d’ici 2030 pour atteindre le net zéro en 2050. Ces investissements s’élevaient à près de 1.200 milliards de dollars en 2022, contre 1.000 milliards en 2015.
Avec la demande globale en énergie devant connaître une croissance de +50% et une population passant de 7 milliards d’individus à 9 milliards d’ici 2050, J.P. Morgan Asset Management s’attend à ce que 150.000 milliards d’investissements soient nécessaires pour décarboner les approvisionnements énergétiques à l’horizon de la moitié du siècle. La canalisation des flux financiers vers les actifs durables est désormais en bonne voie, mais devra s’accélérer pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris.
Cet article a été rédigé pour la newsletter Paperjam Green, le rendez-vous mensuel pour suivre l’actualité en matière d’environnement, de climat, de mobilité, de RSE et de green finance. .