Markus Pimpl, de Partners Group, et Pascal Rapallino de l’Association luxembourgeoise des Family Offices (Lafo), expliquent le contexte qui a conduit à un début difficile pour la structure du fonds Eltif 2.0. Ils prévoient toutefois avec prudence une reprise de l’activité en 2025 et 2026. (Photos: Partners Group et Eva Krins; Montage: Maison Moderne)

Markus Pimpl, de Partners Group, et Pascal Rapallino de l’Association luxembourgeoise des Family Offices (Lafo), expliquent le contexte qui a conduit à un début difficile pour la structure du fonds Eltif 2.0. Ils prévoient toutefois avec prudence une reprise de l’activité en 2025 et 2026. (Photos: Partners Group et Eva Krins; Montage: Maison Moderne)

En examinant le rendement total sur 10 ans de ses fonds evergreen et de ses meilleurs fonds fermés, Partners Group a conclu que leurs performances étaient similaires. Dans le deuxième volet d’une série en trois parties, Paperjam rapporte que la société de gestion d’actifs anticipe la répétition de ces tendances. Toutefois, il reste à voir si cet argument convaincra les investisseurs particuliers.

Les Eltifs sont-ils adaptés aux investisseurs particuliers?

«Il est indéniablement bénéfique pour un investisseur privé d’intégrer des allocations de marché privé… Cela permet de diversifier et d’exposer son portefeuille à l’ensemble de l’économie réelle», explique Markus Pimpl, directeur général en charge de la clientèle privée en Europe chez Partners Group. Selon lui, alors que les marchés publics diminuent, les investisseurs particuliers ont accès à un segment en expansion qui inclut également des entreprises technologiques à succès.

Un fonds evergreen, ou semi-liquideLa possibilité de vendre des fonds evergreen sous la nouvelle structure des European Long-Term Investment Funds (Eltif 2.0) aux investisseurs particuliers représente un «changement majeur», affirme Pimpl. Il souligne que la réglementation européenne Eltif 2.0 a assoupli l’architecture rigide des fonds fermés d’Eltif 1.0, permettant désormais une structure semi-liquide avec des souscriptions et rachats mensuels ou trimestriels, tout en allégeant certaines contraintes d’investissement (jusqu’à 45% des actifs peuvent être placés dans des fonds Ucits). Il précise cependant que les promoteurs restent libres de proposer des fonds fermés.

«D’un point de vue opérationnel, les fonds evergreen sont plus simples à gérer, car leur fonctionnement est similaire à celui des fonds Ucits. Ainsi, les souscriptions et rachats s’effectuent via Euroclear ou Clearstream, les deux principales chambres de compensation européennes», ajoute Pimpl.

Les Eltifs sont-ils adaptés aux investisseurs particuliers?

Néanmoins, il met en garde contre les attentes excessives des investisseurs quant aux rendements du marché privé. En effet, Eltif 2.0 permet d’investir jusqu’à 45 % des actifs en actions cotées via des fonds Ucits, ce qui peut générer des déconvenues. À cet égard, il estime que les investisseurs étaient davantage protégés avec les fonds fermés sous Eltif 1.0. Pour atténuer ce risque, il insiste sur la nécessité de former les conseillers financiers afin qu’ils transmettent une information claire et précise aux clients.

Les taux d’intérêt peuvent remonter aussi vite qu’ils ont baissé. 
Pascal Rapallino  

Pascal Rapallino  président  Association luxembourgeoise des Family Offices

Tout au long de l’entretien, M. Pimpl souligne que, chez Partners Group, le terme «fonds evergreen» est préféré à «fonds semi-liquide», ce dernier pouvant suggérer un produit défectueux lors de conférences. Il rappelle également que, par conception, la société de gestion pourrait être amenée à «geler temporairement les rachats» en cas de crise de liquidité afin d’éviter des ventes paniques et de protéger les investisseurs. Une communication adéquate auprès des clients reste donc essentielle pour maintenir leur confiance.

Des taux d’intérêt susceptibles de rebondir

«Les taux d’intérêt peuvent remonter aussi vite qu’ils ont baissé», avertit Pascal Rapallino, président de la Luxembourg Association of Family Offices.

M. Pimpl estime qu’il existe un potentiel de croissance significatif pour les fonds evergreen Eltifs, même s’il ne s’attend pas à une explosion des ventes dès 2025. «Ce sera un processus progressif», dit-il. À ce jour, Partners Group gère environ 100 millions d’euros d’actifs sous gestion en Eltifs.

Un environnement de taux déterminant pour la collecte

 À l’exception de quelques grands acteurs bien établis, Rapallino souligne que la levée de capitaux demeure «compliquée» pour tous les actifs privés, aussi bien pour les investisseurs particuliers qu’institutionnels, en raison des taux d’intérêt élevés en Europe. «Les dépôts à terme à plus de 4,5% en banque ont facilité la vie des investisseurs particuliers.» Selon lui, le lancement d’Eltif 2.0 en janvier 2023 est intervenu à un moment peu opportun.

Bien qu’il se montre prudemment optimiste pour 2025, il anticipe une meilleure dynamique en 2026, à condition que la baisse des taux se poursuive. Cependant, il met en garde contre les incertitudes géopolitiques et économiques, notamment liées à un éventuel retour de Donald Trump à la présidence des États-Unis.

Comprendre le TRI et les autres indicateurs de performance

«Aucun investisseur particulier ne comprend réellement (Taux de Rendement Interne)», affirme Pimpl. Il note que de nombreuses sociétés de private equity mettent en avant des TRI avoisinant les 20%, mais rappelle que l’argent n’est pas toujours investi en continu en raison des appels de fonds et des distributions. «En moyenne, si vous engagez 100.000 €, seuls 75.000 à 80.000 € seront effectivement investis, car des distributions interviennent au fil du temps», explique-t-il.

Le Global Value Sicav, un fonds lancé par Partners Group en 2007 avec huit milliards d’euros d’actifs sous gestion, affiche un rendement annuel net de 10,6%. Contrairement aux fonds fermés, où le capital est versé progressivement, l’investissement dans un fonds evergreen permet une capitalisation continue et exploite ainsi pleinement la puissance des intérêts composés.

Dans sa communication, Partners Group a simulé la performance d’un fonds evergreen hypothétique (rendement annuel de 11%) par rapport à un fonds fermé affichant un TRI de 20% sur 10 ans (en supposant que le capital non investi génère un rendement de 5 %). Résultat: les deux fonds ont atteint de 2,8 x. De manière anecdotique, Pimpl mentionne qu’un fonds de private equity fermé géré en interne par Partners Group a obtenu, sur une période de 10 ans, un rendement total identique à celui d’un fonds evergreen. Il s’attend à ce que ces tendances se poursuivent à l’avenir.

Cet article a été rédigé initialement en anglais et traduit et édité en français.