Gerdy Roose, Tax Partner chez BDO. (Crédit: BDO, montage photo Maison Moderne)

Gerdy Roose, Tax Partner chez BDO. (Crédit: BDO, montage photo Maison Moderne)

La déclaration fiscale d’une société est aujourd’hui très souvent réalisée par un prestataire externe, spécialiste en ce domaine. En effet, les réformes fiscales successives ont rendu cette opération très complexe, technique et susceptible d’un redressement sévère en cas d’erreur. Gerdy Roose, Tax Partner chez BDO, nous en parle.

Pourquoi la déclaration fiscale reste-t-elle un moment tant redouté pour les entreprises?

La déclaration fiscale et ses obligations ont considérablement évolué dans le temps. Auparavant, lorsqu’une société faisait une erreur dans sa déclaration, nous parvenions souvent à résoudre le problème en échangeant avec le préposé du bureau d’imposition ou avec l’administration. Aujourd’hui, les règles administratives et la législation sont devenues beaucoup plus strictes, et une erreur se paie cher. Et puis, la matière s’est complexifiée à un niveau inédit, laissant nos clients dans l’incertitude. À cela s’ajoute que les entreprises reçoivent à présent des avis d’imposition provisoires, que l’administration peut revoir sur une période de cinq ans. Cela crée également une tension pour nos clients, car une erreur saisie durant quatre ans peut alors amener à un redressement plus que conséquent.

Comment a évolué la déclaration fiscale ces dernières années au Luxembourg?

La déclaration fiscale est devenue beaucoup plus complexe et technique. Avant, on pouvait dire qu’elle était un sous-produit de la comptabilité. Ce n’est plus le cas pour de très nombreuses entreprises. Le comptable d’une société n’a souvent plus le bagage technique suffisant pour pouvoir traiter la déclaration fiscale.

La difficulté vient entre autres du fait que le Luxembourg doit transposer des directives européennes complexes, fruits de négociations politiques, parfois non abouties ou incohérentes par rapport à des règles fiscales existantes. Ces textes et ces dispositions sont extrêmement difficiles à appréhender et à comprendre pour le non-spécialiste. La publication de circulaires administratives permettrait d’améliorer la sécurité juridique («tax certainty»). En outre, nous ne connaissons parfois pas la position de l’administration sur certains sujets techniques, et il faut dès lors être attentif à toutes les implications fiscales potentielles.

La déclaration fiscale est devenue beaucoup plus complexe et technique (…) Le comptable d’une société n’a probablement plus le bagage technique suffisant pour pouvoir la traiter.
Gerdy Roose

Gerdy RooseTax PartnerBDO

Il faut donc s’entourer de spécialistes pour mener à bien sa déclaration?

Le non-spécialiste ne saura pas discerner les subtilités dont je vous parlais. Ce sont comme des peaux de banane disposées sur le chemin, si vous me permettez l’expression. Un fiscaliste expérimenté saura les éviter, car la chute peut faire très mal.

Auparavant, la trajectoire normale pour un jeune fiscaliste était de commencer par préparer des déclarations avant de se diriger vers le conseil. Depuis quelques années, les plus compétents en matière de déclaration fiscale sont ceux qui ont fait de l’advisory, mais qui sont revenus vers le tax compliance. Il faut une compréhension globale de la structure pour préparer la déclaration fiscale et pouvoir expliquer au client là où sont les risques. C’est un métier à part, où il ne s’agit plus de mettre des chiffres dans des cases, mais bien d’être capable de saisir l’ensemble des problématiques fiscales.

Parlez-nous de l’expertise de BDO en ce domaine. Qui sont vos clients?

Nous servons tous types de clients, des fonds alternatifs, des multinationales, mais aussi des PME locales, ou bien des banques, par exemple. Avant de se spécialiser, nos équipes ont au départ une connaissance de base très large sur tous les sujets liés à la fiscalité. Elles savent donc s’adapter lorsqu’une problématique sort de leur domaine de spécialisation, c’est une caractéristique qui fait notre réputation et notre force. Nous disposons également de notre propre outil informatique («eFiscalease»), développé spécifiquement pour la déclaration fiscale, et qui répond efficacement aux besoins de toutes les entreprises, quelle que soit leur taille ou leur secteur d’activité.

Je répète constamment à mes équipes qu’il faut avoir une approche proactive. Nous sommes des «techniciens», certes, mais nous sommes également les conseillers directs de nos clients. Nous attirons leur attention sur des éléments qui pourraient être problématiques à l’avenir, et nous leur proposons des solutions pour résoudre ces problèmes. Comme la matière est complexe, nous sommes toujours à leur disposition pour répondre à leurs questions.

Réglons les incohérences et redonnons davantage de sécurité juridique («tax certainty») au système luxembourgeois, au risque de voir certaines entreprises quitter le pays.
Gerdy Roose

Gerdy RooseTax PartnerBDO

Selon vous, une nouvelle réforme fiscale devrait-elle voir le jour prochainement?

Avant la crise Covid, je vous aurais sans doute répondu oui. Une baisse du taux d’imposition était un «must». Aujourd’hui, la situation est bien différente. Tous les pays augmentent leur déficit budgétaire, et il faudra des impôts ou d’autres prélèvements pour rembourser la dette du pays. Par conséquent, si nous pouvions déjà maintenir notre taux d’imposition, ce serait une bonne nouvelle. Cela dit, je pense qu’une remise en ordre du système est impérative. Réglons les incohérences et redonnons davantage de sécurité juridique («tax certainty») au système luxembourgeois, au risque de voir certaines entreprises quitter le pays. Il n’y a rien de pire que d’avoir un client qui s’attendait à devoir payer un certain montant d’impôts, et au final qui doit s’acquitter d’un montant bien plus élevé.