Un rapport du ministère de la Justice publié en février mettait en lumière le risque accru de l’usage des fiducies et autres constructions légales pour occulter l’identification des bénéficiaires effectifs. (Photo: Shutterstock)

Un rapport du ministère de la Justice publié en février mettait en lumière le risque accru de l’usage des fiducies et autres constructions légales pour occulter l’identification des bénéficiaires effectifs. (Photo: Shutterstock)

Interpellée par la députée Nathalie Oberweis sur le suivi des sanctions contre la Russie, la ministre des Finances, Yuriko Backes, souligne que le dernier train pris par les instances européennes encadre la prestation de services de domiciliation des trusts.

La ministre des Finances,  (DP), a indiqué ce 11 avril qu’«il n’y a à l’heure actuelle aucune indication permettant de conclure que des sanctions sont contournées au Luxembourg». Cette déclaration s’inscrit à l’occasion d’une intervention de la ministre au Parlement, en réponse à une question parlementaire de la députée (déi Lénk) posée le 7 mars 2022. Cette dernière avait alors interpellé Yuriko Backes concernant le risque de contournement des sanctions contre la Russie par les «trusts and company services providers» (TCSP).

La députée Nathalie Oberweis avait alors posé une question parlementaire urgente qui «s’explique par le risque de voir des personnalités visées par les sanctions contre la Russie délocaliser leur patrimoine à courte échéance afin de s’y soustraire». De la sorte, la députée indique que «des interrogations sont soulevées quant à la possibilité pour des personnalités visées à contourner ou à éviter ces sanctions par la création abusive de sociétés-écrans ou en passant par des fiducies.»

Le rôle des services aux trusts dans des montages agressifs visant à escamoter les sanctions avait été mis plus tôt en lumière par la ministre néerlandaise des Finances, rappelle Nathalie Oberweis. Ce qui aurait ainsi, selon la députée, donné lieu à une discussion sur le sujet au niveau du Conseil des affaires économiques et financières (Ecofin).

Occulter les bénéficiaires effectifs

Plus particulièrement au Luxembourg, Nathalie Oberweis souligne que les services aux trusts sont «très présents». Elle pointe également du doigt la publication, en février dernier, d’ qui concluait notamment que les fiducies constituent «un risque inhérent et résiduel très élevé en matière de blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme».

Le rapport du ministère de la Justice mettait alors en lumière la possibilité, dans un contexte de structures juridiques, de faire usage de contrats de prête-nom – «nominee», en anglais – tant bien au niveau de la structure d’actionnariat que de la structure de contrôle. Pareille méthode permet d’occulter la réelle identité des bénéficiaires ou de complexifier le chemin pour parvenir à leur identification.

Selon le rapport du ministère de la Justice, les enregistrements de constructions juridiques au Luxembourg ont connu une croissance significative entre le troisième trimestre de 2020 et la fin de 2021.

Dans sa réponse à la question parlementaire, la ministre des Finances souligne que l’ensemble des prestataires de services aux sociétés et fiducies sont obligés d’appliquer les sanctions internationales, conformément à la loi relative à la mise en œuvre des mesures restrictives en matière financière. Elle précise en outre que cette loi outille les autorités de contrôle de s’assurer que les sanctions sont respectées et d’agir en cas de non-respect.

La domiciliation des trusts

La ministre des Finances insiste aussi sur l’importance de «l’échange intensif avec toutes les autorités concernées» dans le cadre du mis sur pied dans le courant de la seconde moitié du mois de mars.

Interrogée également au sujet des discussions au niveau des instances européennes sur un éventuel renforcement entourant les services aux fiducies, la ministre des Finances explique que cet aspect se retrouve dans le cinquième paquet de sanctions contre la Russie, pris le 8 avril. «Ce texte interdit notamment la prestation de services de domiciliation pour des trusts et des structures similaires ayant des bénéficiaires russes et fait suite à l’initiative néerlandaise au sujet d’un renforcement légal entourant les TCSP», a répondu Yuriko Backes, ajoutant que cette décision a reçu le soutien du Luxembourg.

À la suite de la découverte des massacres de Boutcha, Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, avait déclaré le 5 avril que «ces atrocités ne peuvent pas rester sans réponse». Elle avait alors fait part d’une volonté de «maintenir la plus grande pression sur Poutine et le gouvernement russe». Annonçant ainsi , la présidente de la Commission a déclaré que l’objectif était alors d’affecter «encore plus profondément l’économie russe».