Le commissaire européen à l’Économie, Paolo Gentiloni, a salué une «victoire pour l’équité fiscale». (Photo: Shutterstock)

Le commissaire européen à l’Économie, Paolo Gentiloni, a salué une «victoire pour l’équité fiscale». (Photo: Shutterstock)

Réunis à Venise, les ministres des Finances du G20 ont marqué leur accord quant à une future imposition minimale des bénéfices des multinationales à l’échelle mondiale. Le Luxembourg y a contribué «de manière active et proactive».

C’est sans aucun doute un accord historique qui a été scellé à Venise samedi, après deux jours de tractation, par les ministres des Finances du G20 (les 19 pays les plus riches de la planète et l’Union européenne). Le Monde, le Daily Telegraph, le Wall Street Journal ou le Süddeutsche Zeitung le voient en tout cas comme tel: dès 2023, au plus tôt, mais cela semble douteux, les bénéfices des multinationales seront taxés à hauteur de 15% minimum, et cela partout dans le monde.

Arme contre les paradis fiscaux, cette mesure doit aussi renforcer les pays dans leur «droit à taxer». 


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Une mesure avait déjà reçu un accord du G7 réuni à Londres, puis de 130 pays membres de l’OCDE.

La future taxation mondiale va s’articuler autour de deux grands piliers.

- Le premier pilier de la réforme veut qu’entre 20% et 30% du bénéfice résiduel, soit le bénéfice au-dessus du seuil de 10%, soit imposé dans le pays de consommation. Initialement, les Gafa, c’est-à-dire les géants du web, étaient visés par cette disposition. À la demande des États-Unis, d’autres grandes entreprises sont concernées, notamment les entreprises ayant un chiffre d’affaires dépassant les 20 milliards d’euros. Le secteur financier ne devrait pas être concerné par ces nouvelles règles.

- Le deuxième pilier est basé sur un impôt minimal global de 15% sur les bénéfices des multinationales. Ce taux serait appliqué aux entreprises ayant un chiffre d’affaires supérieur à 750 millions d’euros. Un certain nombre d’entités sont exclues du champ d’application du taux de 15%: il s’agit par exemple des fonds de pension, des fonds d’investissement, des asbl ou des entités publiques.

En octobre prochain, le G20 se réunira à nouveau pour fixer le taux d’imposition minimum et déterminer comment les profits seront alloués entre les pays, explique le Financial Times. Les chefs d’État du G20 n’auront plus alors qu’à signer l’accord.

Qu’il sera cependant difficile de faire entrer en application en 2023 puisqu’aux USA, les Républicains ont déclaré ne pas en vouloir. Et ils ne sont pas les seuls à s’y opposer. En Europe, l’Irlande, la Hongrie et l’Estonie s’y opposent. Tandis qu’il faudra mettre à profit les mois à venir pour convaincre la Chine.

Pour le ministre français de l’Économie, Bruno Le Maire, «il n’y aura plus de retour en arrière possible. Le G20 Finances de Venise est un G20 décisif qui marque un avant et un après. Nous opérons aujourd’hui une révolution fiscale. Nous tournons le dos à des décennies de course au moins-disant fiscal qui ont montré que c’était totalement inefficace.» La secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, a appelé le monde «à agir rapidement pour finaliser» l’accord, tandis que le commissaire européen à l’Économie, Paolo Gentiloni, saluait une «victoire pour l’équité fiscale».

Un impact difficile à évaluer pour le Luxembourg

Ce «big bang fiscal à l’échelle mondiale» a été évoqué vendredi, en commission des Finances de la Chambre. 

Le ministre des Finances,  (DP), a expliqué que le Luxembourg y avait contribué de manière «proactive et active». Avouant aussi qu’il était difficile, actuellement, d’évaluer l’impact d’une taxation à 15% sur le Luxembourg. Il est par contre certain que cet accord apportera du calme sur la scène internationale, et mettra le Luxembourg à l’abri d’attaques comme celles qui ont eu lieu à son égard ces dernières années. Sa notation triple A, sa stabilité politique, et la paix sociale qui y règne seront des atouts qui permettront de se distinguer des autres pays.