L’auditeur externe de l’UE a délivré, ce mardi, son rapport sur l’exécution du budget de l’UE en 2019. Il a passé en revue 747 opérations de tous ordres – cohésion économique et sociale, administration, compétitivité… –, épluchant leurs modalités afin de détecter d’éventuelles anomalies.
Comme tous les ans depuis 2007, la Cour des comptes européenne a délivré un satisfecit concernant les comptes de l’UE. Celle-ci a déboursé 159,1 milliards d’euros en 2019, soit l’équivalent de 2,1% du total des dépenses publiques des États membres et de 1% du revenu national brut de l’UE.
Aucune irrégularité n’a été détectée parmi les recettes constituées en grande partie de contributions étatiques (105,5 milliards sur 163,9 milliards d’euros), le reste provenant de droits de douane (21,4 milliards d’euros), de la contribution fondée sur la TVA perçue par les États membres (17,8 milliards d’euros) ou encore de contributions et de remboursements découlant d’accords et de programmes de l’Union européenne (12,6 milliards d’euros). À noter tout de même que les auditeurs ont «relevé des faiblesses importantes, nécessitant l’intervention de l’UE, dans les contrôles effectués par les États membres pour réduire le manque à gagner sur les droits de douane».
Une majorité de dépenses à haut risque
Les experts installés au Kirchberg soulignent toutefois une marge d’erreur encore élevée concernant les dépenses. Le niveau d’erreur se situe entre 1,8% et 3,6% – donc à un niveau médian de 2,7%, soit davantage qu’en 2017 (2,4%) et 2018 (2,6%). Une tendance à enrayer, d’autant qu’elle est généralisée. «Plus de la moitié de la population que nous avons examinée présente un niveau d’erreur significatif», soit supérieur à 2%, remarque l’institution.
Certains piliers de dépenses s’avèrent plus vulnérables – des dépenses dites à haut risque pour la Cour des comptes européenne, car reposant sur des remboursements de coûts (projets, investissements…). Le taux d’erreur y atteint 4,9% en 2019 (contre 4,5% en 2018). Ces dépenses à haut risque représentaient 66,9 milliards d’euros en 2019 et concernaient surtout deux des piliers les plus étoffés du budget de l’UE: les ressources naturelles (59,5 milliards d’euros en tout) et la cohésion économique, sociale et territoriale (53,8 milliards), qui représentent à elles seules deux tiers des paiements effectués.
Il ne faut toutefois pas confondre erreur et fraude. Les auditeurs relèvent plutôt l’inéligibilité de certains projets ou coûts à un remboursement de l’UE. «Les dépenses à haut risque sont souvent assorties de règles et de critères d’éligibilité complexes», explique la Cour des comptes, qui donne pour exemple l’inéligibilité d’une passerelle piétonne portugaise proposée à remboursement alors qu’elle était déjà réalisée au moment de la demande de fonds, ou bien d’un silo érigé par une exploitation agricole, mais d’un type différent de celui pouvant donner lieu à remboursement.
Nous avons besoin de règles simples et claires pour l’ensemble des finances de l’UE, mais aussi de contrôles efficaces concernant la façon dont l’argent est dépensé et la question de savoir s’il produit ou non les résultats escomptés.
«Notre opinion défavorable sur les dépenses de l’UE pour l’exercice 2019 vise à rappeler que nous avons besoin de règles simples et claires pour l’ensemble des finances de l’UE, mais aussi de contrôles efficaces concernant la façon dont l’argent est dépensé, et la question de savoir s’il produit ou non les résultats escomptés», affirme M. Klaus-Heiner Lehne, président de la Cour, dans un communiqué. «Cela revêt une importance toute particulière, étant donné le projet de fonds pour la relance destiné à contrer les effets de la pandémie de Covid-19. En ces temps de crise, la Commission européenne et les États membres ont une énorme responsabilité, qui consiste à bien gérer les finances de l’UE, dans le respect du principe d’efficience.»
Le projet de budget 2021-2027 et l’instrument de relance Next Generation EU, de l’ordre de 750 milliards d’euros, annoncent en effet des dépenses presque deux fois plus élevées à répartir et surtout à contrôler. Les auditeurs ont ainsi décelé des anomalies dans des dossiers déjà contrôlés par les États.
Neuf fraudes détectées
Les experts du Kirchberg ont également décelé neuf cas de fraude présumée parmi les 747 opérations contrôlées et les ont communiqués à l’Office de lutte antifraude (Olaf). Cinq enquêtes ont été ouvertes, tandis que quatre autres cas n’ont pas donné lieu à des poursuites.
La Cour des comptes européenne note enfin la lenteur de l’absorption des fonds structurels et d’investissement européens par les États membres, conduisant à un effet d’engorgement en 2020 puisque fin 2019, seulement 40% du montant total de financement convenu pour 2014-2020, avait été déboursé et seulement 17% de l’ensemble des financements engagés au moyen d’instruments financiers en gestion partagée étaient parvenus aux destinataires finaux.