Depuis le début d’année, 127 entreprises du secteur de la construction ont fait faillite. Ce sont souvent des entreprises jeunes et avec peu d’effectifs.  (Photo: Maison Moderne/Archives)

Depuis le début d’année, 127 entreprises du secteur de la construction ont fait faillite. Ce sont souvent des entreprises jeunes et avec peu d’effectifs.  (Photo: Maison Moderne/Archives)

127 entreprises du secteur de la construction ont fait faillite depuis le début de l’année. Il n’est pourtant pas le secteur le plus touché, contrairement au commerce, par exemple, pour lequel on recense 141 faillites sur la même période. Qui sont ces entreprises du «BTP» qui ont mis la clé sous la porte? 

La construction, secteur-clé de l’économie, fait face à une vague de faillites conséquente. D’après les données du Registre du commerce et des sociétés (RCS), 127 entreprises du secteur du «BTP» ont mis la clé sous la porte en 2023. 

D’abord, les entreprises les plus touchées sont les plus jeunes: plus de la moitié sont des entreprises qui ont moins de cinq ans d’existence. Les entreprises que l’on peut qualifier d’historiques, de plus de 20 ans, semblent mieux résister à la crise: huit ont fait faillite cette année. 

Les jeunes entreprises, comme les petites, «ont souvent moins de clients, ou parfois un seul client» fait remarquer le directeur des affaires économiques de la Fédération des artisans, Patrick Koehnen. Avec une activité lancée dans un contexte de crise, comprenant le Covid et la guerre en Ukraine, difficile de maintenir le cap. Et leur jeunesse leur cause une difficulté supplémentaire: «Ils ne peuvent pas négocier des conditions de paiement de la même façon», pense Patrick Koehnen. 

Les petites entreprises et les «invisibles»

Autre constat dressé en épluchant les données: ce sont en majorité les plus petites entreprises – en nombre d’employés – qui ont fait faillite. Pour 40 des 127 entreprises en faillite, le RCS ne rend pas compte du nombre d’employés. Pour certaines, les informations fournies par Editus donnent au moins une idée de la fourchette. Sur les 87 entreprises dont nous avons en revanche trouvé les données, plus de la moitié ont moins de 10 salariés.

«Une petite entreprise a moins de capitaux propres, cela peut la rendre plus vulnérable. S’ajoutent des éléments que les chefs d’entreprises ne peuvent pas contrôler: la situation que l’on connaît, l’impact de la pandémie, la hausse des prix des matériaux et de l’énergie. Si elles avaient déjà épuisé leurs réserves financières et que s’ajoute une baisse brutale des activités, c’est une cause de faillite», explique Patrick Koehnen. 

Une seule entreprise en faillite en 2023 comptait plus de 50 salariés: l’Entreprise générale de construction Manuel . Avant même cette date, régulièrement. 

Et dans les données RCS, 20 entreprises déclarent, elles, n’avoir aucun salarié. Étonnant. Mais à y regarder de plus près, pas tant que ça. Ce sont toutes, à deux exceptions près, des entreprises actives dans le domaine de la promotion immobilière, avec des noms similaires. pour qui l’on recense 15 entités dans le registre du commerce, portant souvent le nom d’un quartier ou d’un projet, comme Cenaro Bissen, Cenaro Limperstberg, Cenaro Beggen, et bien d’autres… Des sociétés créées pour un projet immobilier et vouées à disparaître une fois celui-ci achevé. 

La promotion immobilière dans la tempête

Regardons justement maintenant quelles étaient les activités principales de chacune de ces 127 entreprises. Les promoteurs et les constructeurs sont les plus représentés. Mais les artisans que sont les menuisiers, les plâtriers-peintres ou les couvreurs ne sont pas épargnés. À noter également que les petites entreprises ont peut-être des activités moins diversifiées que les plus grandes, et ont moins de leviers à activer pour compenser une baisse d’activité. 

Le directeur Patrick Koehnen rappelle quelques données: -72% de logements neufs vendus au premier semestre, un volume bâti autorisé réduit d’un tiers, et près de 40% de crédits à la construction en moins ont été accordés. «On peut bien dire que le secteur est quasiment à l’arrêt. Aujourd’hui, beaucoup de chefs d’entreprises disent qu’ils n’ont jamais vu ça. Ce qui pose aussi problème, ce sont les taux d’intérêt hypothécaires élevés». Il cite aussi le projet de loi du bail à loyer comme un coup de frein supplémentaire. 

D’après les données les plus récentes, celles du Statec, confirmées par la Fédération des artisans: environ 4.000 entreprises sont actives dans le secteur de la construction et emploient environ 60.000 salariés. Si, en comparaison, le nombre de faillites (127) peut paraître minime, la Fédération confirme la situation délicate du secteur. 

En cette fin d’année, pas d’embellie à l’horizon. «On nous rapporte encore de grandes difficultés, et un besoin urgent de relancer le marché». Comme pistes de solutions, Patrick Koehnen répète quelques propositions de la FDA: l’abolition des frais d’enregistrement sur la quote-part de la construction déjà réalisée, réintroduire la TVA super-réduite sur la création de logements locatifs ou encore reconsidérer la baisse de l’amortissement accéléré.