Professeur Björn Ottersten: «Le SnT entretient notamment le plus important référentiel de malwares au monde. Il contient plus de trois millions de références.» (Photo: Maison Moderne)

Professeur Björn Ottersten: «Le SnT entretient notamment le plus important référentiel de malwares au monde. Il contient plus de trois millions de références.» (Photo: Maison Moderne)

Lancé en 2009, le SnT – Interdisciplinary Centre for Security, Reliability and Trust de l’Université du Luxembourg est aux avant-postes de la recherche en sécurité informatique, anticipant les enjeux à venir, explorant de nouveaux modèles, tant d’un point de vue technique qu’organisationnel, pour garantir la confiance de chacun au cœur d’une société de plus en plus numérique. 

«Depuis trois ans, les organisations ont fait un grand bond en avant en matière de digitalisation, notamment en raison de la crise sanitaire que nous avons traversée», nous confie le Professeur Björn Ottersten, directeur du SnT – Interdisciplinary Centre for Security, Reliability and Trust, pôle de recherche qui investit entre autres le sujet de la sécurité informatique au sein de l’Université du Luxembourg. «Associée à cette transformation digitale, on constate une prise de conscience des vulnérabilités liées à l’utilisation de la technologie, à notre dépendance au numérique. Pour la plupart des organisations, la cybersécurité est devenue une préoccupation majeure, qui ne relève plus uniquement des considérations techniques.»

Intégrer l’utilisateur au cœur des approches

Le SnT travaille sur les enjeux liés à la sécurité et à la résilience suivant une approche multidisciplinaire. «La technique, seule, ne permet plus de répondre aux défis actuels et à venir en la matière. Par exemple, on se rend compte que l’utilisateur est souvent le maillon faible dans la chaîne de la sécurité. Si l’on veut mettre en œuvre des approches et des systèmes fiables et résilients, il est donc essentiel de le prendre en considération», explique le Professeur Ottersten. Le SnT explore donc les multiples dimensions liées à la sécurité: les aspects technologiques, les sciences sociales ou encore des approches méthodologiques. «L’enjeu est de concevoir les systèmes futurs, pour qu’ils soient résilients et fiables face aux attaques intentionnelles comme à des risques découlant de potentielles erreurs involontaires», explique le Professeur Björn Ottersten. «In fine, il s’agit de garantir la confiance au sein de cette société numérique.» 

Un enjeu critique pour le Luxembourg

Un tel programme est essentiel pour le Luxembourg et son économie, très exposés aux risques numériques. La place financière, par exemple, est amenée à traiter des volumes de plus en plus conséquents de données à travers des solutions technologiques de plus en plus avancées. «Nous n’avons pas d’autre choix que d’être aux avant-postes en matière de gestion de la sécurité», explique le directeur du SnT. «Notre mission, dès le lancement de notre centre de recherche, a été d’attirer des chercheurs dans ce domaine au Luxembourg, pour permettre au pays d’avoir une longueur d’avance et de contribuer à la résilience de son économie.» Le SnT mène notamment des projets de recherche dans les domaines de la fintech, des systèmes du secteur spatial ou encore autour des véhicules autonomes et de l’IoT, autant de domaines clés pour la diversification de l’économie luxembourgeoise.

Dans les années à venir, l’informatique quantique pourrait facilement casser le chiffrement tel que nous l’opérons aujourd’hui et qui permet de préserver les communications.
Professeur Björn Ottersten

Professeur Björn OtterstenDirecteur du SnT  

Si la société se digitalise, les menaces aussi évoluent. Les attaquants, notamment, ont recours à des approches de plus en plus sophistiquées et à des outils avancés, comme l’intelligence artificielle ou le machine learning, notamment pour détecter de nouvelles vulnérabilités. Le SnT, avec la volonté de mieux identifier et répondre à la menace, explore aussi les moyens offerts par ces technologies. «Dans cette perspective, le SnT entretient notamment le plus important référentiel de malwares au monde. Il contient plus de trois millions de références», explique le Professeur Björn Ottersten. «Ces données sont accessibles publiquement à des fins de recherche, pour mieux comprendre, grâce à l’intelligence artificielle, les risques et les vulnérabilités et développer de nouvelles technologies permettant d’y répondre.»

Appréhender les risques quantiques

Centre de recherche scientifique, le SnT regarde au loin, nourrissant l’innovation à un horizon de plusieurs années. Dans cette optique, l’une des thématiques sur lesquelles travaillent les équipes de recherche concerne le chiffrement post-quantique. «Dans les années à venir, l’informatique quantique pourrait facilement casser le chiffrement tel que nous l’opérons aujourd’hui et qui permet de préserver les communications, explique le directeur du SnT. Comment, dans cette ère à venir, concevoir des solutions permettant de garantir la confidentialité des échanges?»

Dans cette démarche, les chercheurs travaillent à la mise en œuvre de solutions de transmission monophotonique (single-photon transmission). «S’appuyant sur des principes physiques, on peut mettre en place des systèmes de communication extrêmement sécurisés», explique le directeur. «Dans cette optique, notre projet vise la mise en œuvre, entre Belval et le Kirchberg, d’une infrastructure d’essai de ces solutions novatrices devant garantir la sécurité des transmissions entre deux points.»

Une approche appliquée

Cette approche de recherche appliquée est l’une des singularités du SnT. Depuis sa création, le centre développe des projets de recherche à travers des partenariats avec des acteurs économiques. La démarche, au-delà de la recherche pure, est de voir comment les solutions envisagées peuvent être mises en pratique. «Des projets considérés comme des succès d’un point de vue technologique peuvent se heurter à des problématiques au niveau de leur mise en œuvre. À travers les partenariats que nous développons, nous pouvons mieux appréhender les enjeux de terrain et les intégrer dans nos approches», explique M. Ottersten.

La démarche facilite le transfert de l’innovation et a pour autre mérite d’attirer au Luxembourg des chercheurs venus du monde entier, pour qui cette démarche appliquée suscite un réel intérêt. 36% des alumni de SnT s’installent au Grand-Duché, souvent embauchés par des partenaires, contribuant à renforcer l’écosystème luxembourgeois en matière de cybersécurité.