Christophe Hansen: «Nous devons renforcer ce climat attractif doté d’un cadre réglementaire solide qui attire nos innovateurs, des talents étrangers, et facilite les relations avec les chercheurs des pays tiers.» (Photo: Maison Moderne/ Archives)

Christophe Hansen: «Nous devons renforcer ce climat attractif doté d’un cadre réglementaire solide qui attire nos innovateurs, des talents étrangers, et facilite les relations avec les chercheurs des pays tiers.» (Photo: Maison Moderne/ Archives)

Horizon 2020 est mort (ou presque), vie à Horizon Europe. Le nouveau programme européen de soutien à la recherche a été doté de 100 milliards d’euros de budget. Un montant que le Parlement aimerait revoir à la hausse. Car si l’Europe est ambitieuse, elle est encore à la traîne, derrière la Chine ou d’autres grandes puissances.

Pour évoquer l’avenir de la recherche au niveau européen, Christophe Hansen, co-tête de liste du CSV avec Isabel Wiseler, était quasi incontournable.

Assistant de la députée européenne Astrid Lulling durant sept ans, il a aussi présidé le groupe de travail «environnement» lors de la présidence luxembourgeoise du Conseil de l’Union européenne en 2015, avant de remplacer Viviane Reding au Parlement européen en septembre 2018.

Il connaît donc bien les arcanes de Bruxelles et Strasbourg. Son diplôme en géosciences, environnement et risque décroché à l’Université Louis Pasteur de Stras­­­­bourg assure son autorité dans le domaine scientifique.

Plus de moyens

Il ne fait évidemment aucun doute à ses yeux que l’Europe doit continuer à jouer un rôle moteur dans le domaine de la recherche et développement.

«Ce n’est pas un choix, c’est une question de survie!, lance-t-il. C’est l’un des enjeux cruciaux de la décennie à venir. L’investissement dans la recherche, le développement et l’innovation fera de nous, ou pas, une puissance économique du 21e siècle. C’est d’ailleurs pour cette raison que le budget européen en la matière a augmenté de manière significative: de l’équivalent de 4 milliards d’euros en 1983 à 100 milliards pour Horizon Europe 2021-2027.»

Le nombre de brevets déposés en Europe est trois fois moins élevé qu’au Japon.

Christophe Hanseneurodéputé CSV

Des efforts qui ont déjà payé, puisque si l’Europe ne représente que 7% de la population mondiale, «nous produisons un tiers des publications scientifiques. Nous comptons également parmi nous le plus grand nombre de chercheurs, 1,8 million, et nous représentons un cinquième du total des investissements mondiaux en R&D».

Ce que Christophe Hansen tempère de suite: «Une fois que l’on dit cela, on n’a rien dit, car année après année, nous n’atteignons pas l’objectif qui nous permettrait de compter réellement, c’est-à-dire consacrer 3% du PIB en R&D, en raison notamment du manque d’investissement des entreprises privées. En 2017, l’Union dans son ensemble y a consacré 2,07% de son PIB quand la Corée du Sud y consacre 4,55%, le Japon 3,20% et les États-Unis 3,20%. Le nombre de brevets déposés en Europe est trois fois moins élevé qu’au Japon.»

Plus de coopération

L’enjeu des années à venir sera donc aussi de combler ce déficit d’investissement. «Ce sera possible notamment en favorisant la coopération entre les États membres et les instituts de recherche, en harmonisant les différences entre États membres, en augmentant les partenariats public-privé», développe Christophe Hansen.

Le Conseil européen de l’innovation, décidé par la Commission Juncker, est un outil qui aidera à aller dans ce sens. «Aujourd’hui, l’Europe est l’espace de recherche et d’innovation le plus ouvert au monde. Nous devons renforcer ce climat attractif doté d’un cadre réglementaire solide qui attire nos innovateurs, des talents étrangers, et facilite les relations avec les chercheurs des pays tiers. Le ‘principe d’innovation’ introduit dans le prochain programme de recherche Horizon Europe, principe que je veux voir cohabiter avec le principe de précaution, est une bonne chose. Ce principe d’innovation exprime, selon moi, notre valeur ajoutée européenne: une éthique sociale de l’innovation, une éthique européenne de l’innovation», note encore Christophe Hansen.

Réduire le nombre de projets n’est pas une fin en soi. L’étendue de l’impact doit être prise en compte.

Christophe Hanseneurodéputé CSV

Qui plaide pour une révision des procédures d’octroi des aides. «Réduire le nombre de projets n’est pas une fin en soi. L’étendue de l’impact doit être prise en compte. Selon l’examen à mi-parcours du programme-cadre Horizon 2020, 64 milliards d’euros additionnels auraient été nécessaires pour financer tous les projets prometteurs et qui répondent aux critères très stricts d’éligibilité, des opportunités manquées. En revanche, oui, les procédures doivent être révisées: selon le même rapport, 636 millions d’euros par an ont été consacrés, par les demandeurs, à faire évaluer leurs projets en amont. C’est trop cher et trop lent. Une des clés de la réussite est la rapidité. Nous pouvons et nous devons faire mieux», justifie-t-il.

IA et superordinateurs

Christophe Hansen appelle donc de ses vœux une souveraineté numérique européenne. Ce qui passera «par la maîtrise de l’intelligence artificielle, c’est un enjeu primordial pour notre avenir. Dans les TIC, et avec le bouleversement des relations internationales que nous connaissons actuellement, comment pouvons-nous nous croire encore à l’abri des puissances étrangères en dépendant à ce point de Google, de Microsoft ou de Huawei? La science des superordinateurs nous démarquera également.»

Et le Luxembourg aura toute sa place dans cette stratégie. «Le Luxem­bourg est un champion de l’innovation et il faut le rester! Par exemple dans les fintech, ou plus récemment dans le secteur spatial. Nous devrions, puisque nous en avons les capacités, donner le bon exemple en Europe en atteignant 3% de notre PIB en R&D. Pourtant, au cours des 10 dernières années, l’investissement a diminué de 0,33 point de pourcentage. Enfin, en tant que hub international avec un savoir-faire reconnu internationalement, le Luxembourg devrait également encourager et pousser l’Europe à débloquer davantage de capital-risque vers l’innovation», conclut-il.