L’ancien vice-Premier ministre peut mettre le cap sur le conseil d’administration d’ArcelorMittal Luxembourg en toute tranquillité. (Photo: Maison Moderne/Archives)

L’ancien vice-Premier ministre peut mettre le cap sur le conseil d’administration d’ArcelorMittal Luxembourg en toute tranquillité. (Photo: Maison Moderne/Archives)

L’ancien vice-Premier ministre et ministre de l’Économie n’a pas perdu de temps: à peine le comité d’éthique avait-il rendu un avis concernant ses futures activités que celui-ci créait la SA Beta Aquarii. Pour le trio de sages, contrôler les activités d’un ancien ministre est tout simplement impossible.

Le futur de l’ancien vice-Premier ministre LSAP , qui a quitté ses fonctions le 4 février dernier, se dessine de manière plus précise. En effet, la voie semble maintenant dégagée en sa faveur pour , alors qu’il était – et reste sans doute – .

Depuis 2014, les membres du gouvernement sont tenus , soumis à la surveillance d’un comité d’éthique. , il recense une série d’articles concernant les ministres qui ont quitté leur mandat. Ceux-ci doivent respecter une série de mesures pour éviter tout conflit entre leurs anciennes et leurs nouvelles attributions. Si ce n’est pas une obligation, il est «conseillé» d’avertir le Premier ministre, , quant aux nouvelles fonctions qu’ils pourraient occuper. À son tour, le Premier ministre peut demander un avis, non contraignant, au comité d’éthique afin de savoir si le code de déontologie est bien respecté.

Comme il l’avait annoncé, Étienne Schneider n’a pas cherché à éviter ces étapes. Dans deux lettres datées du 5 mars et du 8 avril 2020, il a donc averti  (DP) de la possibilité pour lui de rejoindre le CA du sidérurgiste et de son ambition de créer une société anonyme. Logiquement, le Premier ministre a demandé l’avis du comité d’éthique, qui l’a rendu le 22 avril.

Un article 11 inopérant

Il est intéressant à plusieurs égards. Tout d’abord, en ce qui concerne sa nomination au CA d’ArcelorMittal Luxembourg, les trois sages – Colette Flesch, Marie-Josée Jacobs et Aloyse Weirich – constatent qu’en son temps, le ministre avait été nommé dans une fonction identique… alors qu’il était toujours ministre. Ensuite, le trio révèle que le conseil de gouvernement a marqué son accord de principe à cette nomination dès le 20 janvier 2020, soit avant le départ effectif d’Étienne Schneider.

Enfin, le comité ébranle aussi sérieusement le code déontologie. S’il estime que l’article 12 pourra être facilement contrôlé (il prévoit qu’un ancien membre du gouvernement ne peut faire de lobbying pour son nouvel employeur auprès des ministres ou des membres de son ancien département, ndlr), cela ne sera pas possible pour l’article 11.

Cet article 11 prévoit que: «Pendant les deux ans qui suivent la fin de leur mandat, il est interdit aux anciens membres du gouvernement d’utiliser ou de divulguer des informations non accessibles au public obtenues lors de leur fonction ou de donner à leurs clients, leur entreprise, leurs associés en affaires ou leur employeur des conseils fondés sur ces informations et d’en tirer ainsi un avantage.»  Le comité d’éthique indique que: «D’une part, il faut se demander comment un ancien membre du gouvernement pourra, pendant une période de deux ans, distinguer les informations obtenues en sa qualité de ministre qui ne sont pas accessibles au public de celles obtenues dans la même fonction qui sont entre-temps devenues accessibles au public. D’autre part, le respect des obligations définies à l’article 11 s’avère incontrôlable puisque les actes posés par l’intéressé dans le cadre de ses activités professionnelles dans le secteur privé ne sont, en règle générale, pas publics et, partant, ne sont pas identifiables. Ainsi, ils ne se prêtent pas à une analyse ex post par rapport aux exigences de l’article précité.»

Le comité d’éthique plaide pour une période de carence de deux ans

Vidé de sa substance, cet article devrait être réécrit. Le comité d’éthique suggère même une période de carence de deux ans empêchant qu’«un ancien ministre n’exerce dans le secteur privé des activités professionnelles dans un domaine qu’il dirigeait et surveillait en vertu de ses fonctions ministérielles». Ce qui «aurait le mérite d’être clair et univoque et mettrait tout ancien membre du gouvernement devant une obligation prévisible dont le respect ne poserait aucune difficulté».

En attendant, «le comité constate qu’il n’est pas possible d’analyser en détail ni d’examiner ex post les activités exercées par Monsieur Étienne Schneider tant dans le cadre de la société anonyme qu’il entend créer qu’au sein du conseil d’administration d’ArcelorMittal SA pendant les deux ans qui suivent sa démission du gouvernement en février 2020». Aucun contrôle n’étant possible, il n’est pas imaginable d’empêcher Étienne Schneider de concrétiser ses ambitions.

Le dernier feu étant passé au vert, il a fait enregistrer le 30 avril la SA Beta Aquarii (du nom de l’étoile la plus brillante de la constellation du verseau, le signe astrologique d’Étienne Schneider, ndlr). Il est le seul actionnaire de la société, domiciliée boulevard de la Pétrusse à Luxembourg.