«On espère qu’elle va arriver», dit Sandrine Pingeon, en levant les yeux au ciel. Nous sommes quasi à la mi-août, et à la mi-journée, le mercure pointe déjà à 30°C à l’ombre. La pluie est annoncée pour la semaine suivante, mais force est de constater que ces averses ne permettront pas de compenser le déficit hydrométrique en cours depuis le printemps.
«Je n’ai jamais connu pareille sécheresse par le passé», résume la maraîchère, pour qui ce climat particulier apporte le meilleur comme le pire. La forte chaleur a brûlé les fleurs et légumes les plus exposés, tandis que l’absence de pluie a poussé la petite PME de sept collaborateurs à revoir son système d’arrosage. Si le goutte-à-goutte reste de mise pour les 2.300 plants de tomates, par exemple, l’aspersion a été privilégiée pour les cultures les plus demandeuses en eau. Inutile de dire que l’entrepreneuse n’est pas pressée de recevoir sa facture d’eau.
Peinture blanche et paille pour parer à la chaleur
Des adaptations ont aussi été entreprises, comme au niveau des bâches des tunnels sous lesquels poussent les tomates: elles ont été repeintes en blanc de manière réduire la température intérieure. Les pieds des plants ont été paillés de manière à préserver l’humidité.
Les cultures de roquette, radis, pak choï pâtissent de la chaleur, tandis que les betteraves sont assoiffées, tout comme les pommes de terre: des plus petits calibres se profilent pour leur récolte.
Nous allons produire davantage, entre 60% et 70% de plus qu’en 2021.
Certains légumes d’hiver sont assommés par la chaleur. La maraîchère en a donc ressemé plus tard en été avec une croissance ultra-rapide qu’il va falloir désormais maîtriser d’ici à la maturation. Et puis, le climat particulièrement doux amène d’autres éléments perturbateurs: les mauvaises herbes poussent davantage, tandis que des souris et oiseaux ont déniché dans ce vaste potager un garde-manger tout à fait à leur goût.
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«Après les sangliers et le Covid en 2020, la pluie en 2021 et maintenant la sécheresse, chaque année réserve son lot d’ennuis», résume Sandrine Pingeon. Mais la chaleur permet un meilleur rendement: «Nous allons produire davantage cette année, peut-être entre 60% et 70% de plus qu’en 2021.» De 1,3 tonne de tomates cueillies en 2021, le compteur pourrait tutoyer les 5 tonnes cette année, estime la professionnelle.
On dirait le Sud
Celle-ci a aussi été agréablement surprise de voir des cultures de fruits habituellement confidentielles prendre solidement racine dans son potager. C’est le cas des pastèques et des melons, qui se portent à merveille cette année. «On dirait le Sud de la France», admet-elle en souriant. Mais pas question pour autant d’augmenter le nombre de plants au détriment des autres: le climat luxembourgeois en dents de scie laisse notre interlocutrice prudente, et puis, sa première passion reste la culture de la tomate avec des espèces aux calibres et couleurs variés.
Si Les Paniers de Sandrine sont connus pour alimenter les cuisines d’une douzaine de restaurants au Luxembourg ainsi que quelques petits traiteurs, 92% du volume de production est écoulé auprès de particuliers qui se fournissent à la ferme de Schuttrange. Celle-ci collabore avec l’initiative On.Perfekt, qui aide au désherbage des parcelles en échange de légumes en surproduction ou avec quelques petits défauts. «Nous les revendons à un prix réduit à des particuliers», ajoute Julia Gregor, cofondatrice de l’initiative.
Celle-ci prête ainsi main-forte à la PME, qui en a grandement besoin: elle n’est pas parvenue à recruter deux nouveaux collaborateurs manquant depuis le début de l’été. Les vacances attendront donc pour Sandrine Pingeon, qui continue à s’activer dans son potager de 2,5ha de cultures.