Même si les scientifiques appellent à la prudence, apporte à certains un peu d’espoir en cette crise sanitaire. À ce sujet, le gouvernement luxembourgeois qu’un groupe de travail au sein de la cellule de crise travaillait à une stratégie de vaccination. L’hypothèse d’une campagne obligatoire n’était en tout cas pas envisagée. Mais qu’en sera-t-il dans les entreprises? La réponse avec des spécialistes du droit du travail.
Les entreprises auront-elles le droit de rendre le vaccin Covid-19 obligatoire pour leurs employés?
«C’est un grand débat qui va avoir lieu», prévoit Me Grégory Damy, avocat spécialisé en droit du travail au cabinet Damy. L’employeur pourrait vouloir mettre cela en place pour «éviter l’absentéisme», par exemple. Mais «le salarié aura toujours un droit de retrait». Ensuite, le juge dira s’il se justifie ou non. Selon l’avocat, vu le «manque de recul sur les effets secondaires» du futur vaccin, ce droit de retrait serait «d’autant plus justifié». Il rappelle que la question ne devrait pas se poser pour le moment, puisque, «dans un premier temps, le vaccin ne sera pas disponible pour tout le monde».
Me , fondateur du cabinet Castegnaro, se veut plus direct: «Non, on ne peut pas obliger un salarié à se faire vacciner». Il évoque de son côté une violation du droit à l’intégrité physique, le corps humain entrant dans le domaine de l’intimité.
Si des employeurs cherchent des zones d’ombre et tentent de poser la question lors d’un entretien d’embauche par exemple, le candidat aura le droit de ne pas répondre, au nom du respect de la vie privée.
Les entreprises ont-elles le droit d’exiger un test négatif pour revenir au travail, en cas de contact avec une personne positive ou de symptômes?
Les situations ne sont pas comparables, d’après Me Grégory Damy, car le test PCR ne présente pas de risques d’effets secondaires ou autres préjudices par lesquels le salarié pourrait justifier son droit de retrait.
Pour Me Guy Castegnaro, «il n’y a rien qui le permet et rien qui l’interdit expressément. Pour moi, le salarié peut le refuser, cela relève de nouveau de la vie privée et de l’intégrité physique, tout comme on ne peut pas demander à une femme un test indiquant qu’elle n’est pas enceinte.»
Dans certains secteurs spécifiques, comme les soins à la personne, le vaccin pourrait-il devenir obligatoire?
Même pour les soignants, l’avocat estime que le droit de retrait peut «être légitime». Me Guy Castegnaro confirme que là encore, une telle obligation irait à l’encontre du droit à l’intégrité physique.
Que prévoient les acteurs concernés au Luxembourg?
Rien pour l’instant. Interrogés, le Centre hospitalier de Luxembourg, le Centre hospitalier Emile Mayrisch ou encore les Hôpitaux Robert Schuman attendent d’en discuter avec le ministère de la Santé. Le Centre hospitalier du Nord, quant à lui, ne se «positionne pas sur le sujet».
«On ne s’est même pas encore posé la question», dit de son côté le gestionnaire de maisons de soins Servior. «Tout ce qui tourne autour du vaccin est assez hypothétique.» Concernant la grippe, comme chaque année, «nous le proposons, mais sans obligation». Le personnel des maisons de soins en contact avec des personnes à risque étant «sensibilisé» à ces sujets, Servior constate une proportion de personnes vaccinées plus élevée que dans d’autres secteurs. Reste à savoir si le vaccin contre le Covid-19 suivra le même modèle ou non.
Est-ce que le gouvernement peut décider de rendre le vaccin obligatoire pour tout le monde ou une partie de la population?
Me Guy Castegnaro n’exclut pas cette possibilité. «Il faut que ce soit proportionnel au but recherché. C’est une question de balance entre deux libertés: la protection de la vie privée, et l’obligation de veiller à la santé publique», détaille-t-il.
Est-ce que d’autres pays pourraient rendre le vaccin obligatoire pour entrer sur leur territoire?
«Chaque État a des réglementations différentes», constate Me Grégory Damy, qui ne serait pas surpris que certains décident de le faire. Un avis partagé par Me Guy Castegnaro. La probabilité que cela se passe chez des membres de l’Union européenne lui paraît plus faible. «Cela serait considéré comme un frein à la liberté de circulation des personnes au sein de l’Union européenne.» Mais pas impossible, quand on se souvient des fermetures de frontières pendant la première vague.