Pourquoi «tokéniser»?
La tokénisation peut se définir comme un processus de conversion d’un actif qu’il soit financier ou non sur une Blockchain, et donc de pouvoir bénéficier de ses multiples avantages. Les marchés des capitaux dans la finance se sont rapidement développés ces dernières années. Les parts de fonds, les obligations et les actifs non liquides sont des candidats naturels à la tokenisation. Selon le World Economic Forum, nous pourrons tokéniser jusqu’à 10% du PNB d’ici à 2030. Il est d’usage de dire que tous les produits peuvent être tokénisés, mais il est important de garder à l’esprit la finalité et la valeur ajoutée que cela peut apporter à la chaîne de valeur et aux parties prenantes.
La tokénisation peut se définir comme un processus de conversion d’un actif qu’il soit financier ou non sur une Blockchain, et donc de pouvoir bénéficier de ses multiples avantages.
La promesse majeure de la tokénisation est l’efficacité avant tout, mais aussi la démocratisation de certains investissements. Tout d’abord, comme les cryptomonnaies, les actifs peuvent circuler sur la Blockchain 24h/24 et 7 jours sur 7, avec un meilleur suivi des transactions. Cette transparence est une opportunité à la fois pour les clients, mais aussi pour les régulateurs et auditeurs. Le cycle de règlement livraison des transactions peut aussi s’effectuer en quasi-instantanéité. En utilisant la technologie Ethereum, les délais de transactions sont réduits à 15 minutes, contre 2 voire 3 jours de traitement habituel. Les contrats intelligents, directement encodés dans la Blockchain peuvent aussi automatiser les évènements liés à la vie des titres comme les coupons, les dividendes voire les dates d’expiration. D’un point de vue innovation, la tokénisation permet de fractionner les investissements, générant ainsi plus de liquidité et attirant une classe d’investisseurs qui n’était jusque-là pas concernée. L’immobilier est un bon exemple d’investissement fractionné.
L’automatisation couplée à l’utilisation d’un registre distribué et décentralisé favorise l’attractivité de la technologie, mais n’est pas sans impact sur les infrastructures actuelles.
Les impacts sur la chaîne de valeur
Les transactions financières suivent un cycle de vie traditionnel avec le marché primaire pour l’émission, le marché secondaire pour l’aspect transactionnel, le post-trade pour le règlement livraison et finalement la conservation. Dans un monde digital, ces quatre éléments de la chaîne de valeur vont probablement être amenés à se transformer.
Tout d’abord, sur l’aspect du marché primaire, nous anticipons la création de plateformes digitales que ce soit par des acteurs existants comme Société Générale avec SG Forge ou de nouveaux acteurs comme Tokeny à Luxembourg. Ces plateformes seront spécialisées par produits ou ensemble de produits et seront construites sur des protocoles différents. C’est aussi une belle opportunité pour offrir un nouveau canal de distribution et donc pour se différencier dans un monde 3.0.
Sur le marché secondaire, les acteurs et les infrastructures vont devoir s’adapter à la fois à ces nouvelles classes d’actifs et leurs horaires, mais surtout dans la manière de transférer les actifs. Cela va nécessiter des adaptations profondes, mais les investissements réalisés par les acteurs existants nous laissent penser que nous sommes déjà en route. En témoigne la réglementation européenne avec le régime pilote d’ores et déjà mise en place.
Sur le marché du post-trade, nous misons sur la simplification avec la création de nouvelles règles et surtout une automatisation qui se fera en amont. Les infrastructures et la connectique seront forcément impactées si l’adoption de masse se fait.
Finalement, conserver un accès à des jetons titres ou des cryptomonnaies se fait de façon différente du conservateur traditionnel. Le rôle et les responsabilités sont différents et leur coexistence durant de nombreuses années sera nécessaire au regard de l’émergence de nombreux acteurs avec des propositions de valeurs différentes [entreprises technologiques vs crypto-custodian régulé].
Et Luxembourg?
Au regard de ces éléments, le paysage financier de Luxembourg peut être bouleversé si les actions nécessaires ne sont pas menées. Les forces de notre pays restent le pragmatisme et l’agilité. Ces forces ont permis à Luxembourg de devenir le premier centre financier en Europe dans le domaine des fonds d’investissements, mais aussi d’être précurseur dans les marchés de capitaux. La réglementation européenne avec MiCA et le régime pilote devenant une réalité, il est nécessaire pour notre pays de garder son avance en se dotant des moyens nécessaires dans les domaines qui font notre force.
Sur l’ensemble de la chaîne de valeurs et sur les produits phares du pays comme les fonds d’investissement, il est donc primordial que la collaboration entre les acteurs du privé et les nouveaux acteurs se développe afin d’adopter la technologie de façon pragmatique, sans quoi l’innovation se déplacera dans des zones concurrentielles.
Luxembourg dispose de tous les ingrédients nécessaires pour se positionner comme un centre de référence à horizon 2030. Charge aux différents acteurs de collaborer en toute intelligence pour conserver notre leadership.