Six ans d’existence et un nouvel exercice déficitaire pour Kleos. Selon de la start-up de l’espace, les pertes ont atteint 7,3 millions d’euros en 2022. Contre 6,3 millions l’année précédente, 4,8 millions en 2020, 3,5 millions en 2019 ou encore 2,2 millions en 2018, première année complète après celle de son immatriculation, en juin 2017.
Rien que de très banal. Les start-up de l’espace sont la plupart du temps très endettées au début de leur parcours, coincées financièrement entre le développement technologique de leur projet et les difficultés à accéder aux marchés publics ou à assurer de potentiels clients de la pertinence de leur technologie.
La bonne nouvelle, pour Kleos, tient dans la perspective de contrats pluriannuels et donc de revenus plus réguliers et prévisibles. «Nous commencerons à en avoir en milieu d’année prochaine», rassure le fondateur de Kleos Space, Andy Bowyer, encore prudent avec les prévisions. «Nous devrions être à un point où nous aurons des revenus récurrents connus, des contrats à long terme, et nous pourrons alors commencer à prévoir avec précision.»
«Nous sommes à un stade précoce, celui de start-up», rappelle-t-il. La société «se concentre sur les investissements nécessaires pour bâtir une entreprise prospère à long terme tout en visant à atteindre la rentabilité dès que possible. De plus, comme Kleos remporte des contrats et que sa technologie est opérationnelle, les revenus augmentent.»
Après avoir été multipliés par deux entre 2021 et 2022 à 272.099 euros, depuis les États-Unis et le Royaume-Uni (contre 125.528 euros), les revenus du premier trimestre 2023 sont quatre fois plus élevés que les revenus de la totalité des douze derniers mois. Sur les 1,6 million de dollars (1,46 million d’euros), 900.000 euros sont considérés comme des revenus non récurrents, liés à un contrat gouvernemental dont le paiement a été reçu en 2022.
La trésorerie, ce point noir
«2022 a été une nouvelle année de progrès significatifs pour Kleos», considère le président exécutif, dans le rapport annuel. Pete Round cite «le lancement de nos satellites Patrol Mission (KSF2), l’obtention d’un financement par emprunt supplémentaire pour soutenir nos activités d’expansion et d’autres technologies, aboutissant à notre premier 'intelligence produit', Locate, livré aux clients fin 2022». «La livraison des données est une étape critique pour Kleos alors que nous entrons dans notre phase d’exploitation commerciale. Début 2023, nous avons confirmé notre capacité de livraison de données de notre mission de vigilance (KSF1).»
Point noir, la trésorerie descend à 1,7 million d’euros fin 2022, contre 5,7 millions, tandis que les dépenses opérationnelles passent de 4,7 à 5,8 millions d’euros. Comme les pertes cumulées «dépassent les trois quarts du capital social», l’auditeur, EY, a émis une alerte. Selon les auditeurs, une «incertitude importante» pourrait «jeter un doute sur la capacité de la société à poursuivre son exploitation».
Mais, le 27 mai 2022, l’assemblée générale s’était prononcée en faveur de la continuation de la société. Une stratégie qu’une nouvelle aggravation de la trésorerie, début avril, ne devrait pas perturber. De 1,420 million d’euros au 31 mars, elle a chuté, début avril, sous le seuil de 1,25 million d’euros, qu’elle n’est pas censée franchir. Soit une «violation de l’engagement». Pas de panique, le bilan trimestriel explique que «le cash-flow d’exploitation devrait s’améliorer maintenant que le cluster satellite est opérationnel et que les contrats clients sont conclus».
Outre les revenus supplémentaires significatifs, la start-up devrait boucler une nouvelle levée de fonds, espérée ce trimestre, d’un montant sur lequel les dirigeants n’ont pas envie de s’étendre.
Des contrats et des satellites
Kleos se félicite notamment de l’attribution d’un contrat de phase 2 avec l’agence gouvernementale américaine et d’un autre avec une agence britannique. Mais aussi de la poursuite de sa livraison de données ou encore de sa licence d’exploitation d’engins spatiaux renouvelée. «Les produits de renseignement de Kleos sont désormais livrés aux clients gouvernementaux et commerciaux contre un niveau de service opérationnel quotidien pendant une période constante de trois mois. Les revenus sont générés par la vente d’abonnements accordant une licence pour accéder aux produits de données de renseignement. Elles sont vendues entre 300.000 et 500.000 euros par an.»
Du côté de la constellation de satellites, la mission vigilance (KSF1) est opérationnelle et en phase de génération de données. Sa durée de vie restante est estimée à 16 mois, «conforme aux paramètres de conception.» La mission d’observation (KSF2) devrait être opérationnelle au troisième trimestre 2023, «après l’achèvement d’une manœuvre de relèvement d’orbite pour compenser la dégradation naturelle de l’orbite». Pour une durée de vie restante de 30 mois, «conforme» également. La mission de patrouille (KSF3), lancée au cours de ce trimestre, devrait devenir opérationnelle au début du troisième trimestre 2023. «Bien qu’il y ait eu une perte de communication avec le satellite KSF3-C, le fabricant est convaincu qu’il pourra le récupérer avec des mesures correctives. Dans le cas peu probable où le satellite ne pourrait pas être récupéré, les capacités de génération de revenus de la mission ne seront pas affectées. La mission devrait se poursuivre pendant environ 42 mois, conformément à ses paramètres de conception.»
Un accord de partenariat a aussi été signé avec Ursa Space Systems, fournisseur mondial d’infrastructures de renseignement par satellite, pour rejoindre sa base de données d’images satellitaires mondiale.
«Nous restons déterminés à étendre nos zones de collecte standard et à augmenter notre clientèle à mesure que nous progressons dans notre plan de déploiement de notre constellation», assure Alan Khalili, le nouveau CEO.