Marc Hengen, administrateur-délégué de l’Aca. (Photo: Matic Zorman/Archives)

Marc Hengen, administrateur-délégué de l’Aca. (Photo: Matic Zorman/Archives)

En 2025, si Paperjam nous avait posé la question de ce à quoi ressemblerait le secteur de l’assurance 10 ans plus tard, nous n’aurions pu imaginer un meilleur scénario. Aujourd’hui, en 2035, le secteur de l’assurance luxembourgeoise est un secteur encore plus fort, indépendant et reconnu sur la place financière à Luxembourg et à l’international.

(Avant le  du Paperjam Business Club, le 19 novembre à Kinepolis Kirchberg, nous avons décidé de donner la parole aux acteurs de la place financière. Des cartes blanches qui seront publiées tous les matins jusqu’à l’événement et reprises dans la newsletter de 7h. Aujourd’hui, Marc Hengen, administrateur-délégué de l’Aca.)

Cela n’a pourtant pas été simple: notre secteur a connu plusieurs transformations majeures, influencées par des tendances technologiques, économiques et réglementaires. À chacune de ces transformations, l’Aca a soutenu ses membres dans les défis rencontrés et a contribué aux prises de décisions essentielles pour garantir la pérennité, et l’attractivité du secteur, tout en gardant les consommateurs européens au centre des préoccupations. Revenons ensemble sur certaines de ces transformations majeures qui ont modelé notre secteur tout au long de cette dernière décennie.

Digitalisation accrue et intelligence artificielle

Le recours aux technologies avancées, notamment à l’intelligence artificielle (IA), la blockchain ou encore au «machine learning», a permis d’atteindre une importante automatisation dans la gestion des sinistres, la détection des fraudes et la personnalisation des offres. Ces technologies ont également permis aux opérateurs de se conformer aux exigences réglementaires avec agilité.

Le parcours client entièrement digitalisé a permis de simplifier et d’améliorer considérablement l’expérience.

Hyperpersonnalisation des produits d’assurance

Grâce aux données collectées (habitudes de conduite, santé, etc.), les assureurs proposent des polices hyperpersonnalisées. Dans l’assurance auto, des offres individualisées basées sur le suivi des habitudes de conduite via des voitures connectées sont proposées, s’adaptant au profil de chaque client.

Évolutions réglementaires et fiscalité verte

En ce qui concerne la distribution, la différence entre client «de détail» et client «averti» a été actée pour le secteur de l’assurance. Désormais, cette catégorisation est prise en compte afin d’accompagner au mieux les uns et les autres en leur offrant un degré de protection adapté.

Au sujet du secret professionnel, une exemption de ce dernier pour les demandes de déclaration de données personnelles provenant d’autorités étrangères a été inscrite dans la loi. De plus, la loi sur le secteur des assurances a été modifiée pour permettre de recourir à la sous-traitance de prestataires de services intra et extra-groupe, ainsi qu’aux services cloud. Un vrai soulagement pour les acteurs de la Place qui ne sont plus exposés à des poursuites pénales ou d’importantes amendes administratives en violant soit la loi luxembourgeoise, soit la loi étrangère.

Pour faire face au vieillissement de la population, le recours à la pension complémentaire collective et à la prévoyance individuelle a largement été encouragé. Le régime de pension complémentaire collective a été modernisé avec une augmentation des seuils de versement éligibles ainsi que la mise en place d’un taux minoré d’impôt forfaitaire pour les salariés de moins de 40 ans et un assouplissement des cas de sortie anticipée.

L’Irlande est toujours un de nos concurrents naturels, mais les cartes ont été rebattues et la partie se joue enfin à armes égales sans TVA sur les frais de gestion dans les deux pays.

La place financière luxembourgeoise est un centre financier vert reconnu, le secteur de l’assurance ne fait pas exception à la règle, les investissements qui ne sont pas assez verts ne sont plus une option depuis longtemps. La simplification des textes réglementaires publiés il y a 10 ans et leur adaptation réussie aux spécificités du marché luxembourgeois ont largement contribué à ce succès. Les assureurs, incités à développer des produits soutenant la transition écologique, ont répondu présents à ce nouveau défi. Ainsi, on peut citer la création d’un produit de pension luxembourgeois durable avec augmentation des plafonds déductibles fiscalement.

La transposition, par le Luxembourg, des différentes directives préparées au niveau européen, en suivant la règle «La Directive, rien que la Directive» ont porté leurs fruits. Sans «gold-plating» inutile, la place financière a su rester compétitive sur les aspects réglementaires, et notre agilité en la matière est désormais un exemple recherché par nos voisins européens et au-delà.

Régulateur dédié et reconnu pour son expertise

Notre régulateur dédié n’a fait qu’accroître son expertise. Pour ne citer qu’un exemple, la revue de la Lettre Circulaire 15/3 qu’il a publiée il y a 10 ans a démontré l’efficacité du dialogue entre notre régulateur et l’industrie.

Impact du climat et émergence de nouveaux risques

Avec l’intensification des catastrophes naturelles, les couvertures contre les risques climatiques sont devenues un élément incontournable des polices d’assurance pour les personnes morales et physiques. Les assureurs et les réassureurs ont joué un rôle primordial en matière de prévention et d’accompagnement, ce qui a permis de mieux maîtriser certains impacts du changement climatique.

Les assureurs non-vie ont continué à accroître leur présence au Grand-Duché en innovant et en développant des couvertures adaptées à de nouveaux risques comme: l’arrivée réussie des voitures autonomes, la généralisation du drone pour les livraisons privées ou professionnelles, la responsabilité civile numérique.

Notre secteur a su s’imposer au niveau européen et à l’international comme un expert en matière de couverture des risques liés à la cybersécurité face aux menaces numériques croissantes.

Rôle des insurtechs et partenariats stratégiques

Les insurtechs continuent à transformer le secteur en proposant des solutions disruptives.

Les partenariats entre assureurs traditionnels, insurtechs et autres acteurs financiers ont continué à se multiplier. Ces collaborations ont permis de renforcer un écosystème qui explique en partie le succès des dernières années et notre attractivité.

Expansion vers de nouveaux marchés et internationalisation

L’environnement réglementaire du Luxembourg en fait une destination de choix pour les compagnies d’assurance internationales, consolidant le rôle du pays en tant que hub européen.

Les différents pays de l’Union européenne ont compris l’intérêt d’une offre diversifiée et efficace sur le marché unique: tout en conservant leurs intérêts nationaux, ils permettent ainsi à l’offre luxembourgeoise de coexister avec leur offre nationale sans entrave. Les principes de la libre prestation de services et du libre établissement fonctionnent désormais sans heurts au niveau européen et ne sont plus remis en cause.

Arrivée d’une nouvelle génération de consommateur

Les différents programmes mis en place ces 10 dernières années au niveau national et plus largement au niveau européen, sur l’éducation financière, portent leurs fruits. Ils permettent de voir arriver sur le marché des consommateurs plus conscients que leurs aînés en matière d’investissement et qui souhaitent préparer leur avenir en investissant aujourd’hui.

Ressources humaines et attractivité des talents

Avec l’évolution numérique rapide du secteur, la demande pour des profils spécialisés en data science, cybersécurité, intelligence artificielle, et développement de solutions numériques a été extrêmement forte. Le Luxembourg, confronté à une concurrence internationale accrue, a redoublé d’efforts pour attirer ces talents. Les résultats des initiatives menées il y a maintenant 10 ans portent enfin leurs fruits. Notre secteur est souvent cité en exemple par le ministre des Finances comme le secteur où le gender gap n’existe pas et où la place des femmes à tous les niveaux de nos organisations est une réalité.

Il y a 10 ans, il ne manquait donc pas grand-chose pour faire bouger les lignes et réussir à rendre notre secteur encore plus attractif et compétitif. Toutes les cartes étaient là, il a suffi de les distribuer intelligemment en gardant à l’esprit le rôle premier de notre industrie: une industrie qui protège et qui, résolument tournée vers le futur, accompagne tous les changements de notre société et de notre économie.