En prenant la voiture ou le train le vendredi matin, on peut avoir cette impression subjective qu’il y a moins de monde, en déduisant que beaucoup choisissent le dernier jour de la semaine pour télétravailler. Ce n’est pourtant qu’une impression, selon les différents indicateurs disponibles.
À commencer par ceux de l’Administration des ponts et chaussées. Sur l’A3, de la Croix de Bettembourg vers Luxembourg, entre le 1er septembre et le 31 octobre 2021 (dernières données disponibles), et dans les deux sens, elle compte en moyenne 66.362 voitures le lundi, 63.559 le mardi, 63.977 le mercredi, 66.492 le jeudi et 73.807 le vendredi. Sur l’A6, de la Belgique au Luxembourg, on est à 45.508 voitures le lundi, 43.945 le mardi, 43.575 le mercredi, 45.969 le jeudi et 51.213 le vendredi.
Le début et la fin de semaine sont donc, à l’inverse de ce qu’on aurait pu penser, plus chargés que le milieu de semaine. Ces données ne différencient cependant pas les heures de pointe et peuvent être influencées par les départs en week-end ou les sorties le vendredi soir.
Les données de TomTom sont plus récentes et fournies heure par heure. Lors du pic le plus haut, le vendredi 26 novembre à 18h, le niveau de congestion était de 111% (c’est-à-dire le pourcentage d’augmentation du temps de trajet par rapport à la durée classique). Le lundi suivant, à la même heure, il était de 84%; le mardi à 17h, de 82%; le mercredi à 17h, de 81%; le jeudi à 17h, de 65%, et le vendredi suivant, le 3 décembre, il remonte à 85%, cette fois à 16h. Des tendances qui se confirment dans leurs chiffres plus anciens et concernant les heures de pointe du matin.
Autant de monde le vendredi qu’avant la crise
Google fournit de son côté des données sur les déplacements uniquement entre le domicile et le lieu de travail, tous modes de transport confondus. Vincent Hein, économiste à la Fondation Idea, les a utilisées pour calculer l’évolution, pour chaque jour de la semaine, par rapport aux mêmes jours sur une période de référence d’avant-Covid, celle du 3 janvier au 6 février 2020.
Là encore, difficile de parler d’effet télétravail le lundi ou le vendredi. Au quatrième trimestre 2020, on est à -30,2% le lundi, -30,5% le mardi, -29,1% le mercredi, -28,2% le jeudi, -26,6% le vendredi. Mais sur le premier trimestre 2021, -28,4% le lundi, -28,7% le mardi, -28,1% le mercredi, -27,8% le jeudi et -30% le vendredi. Au quatrième trimestre de cette année, qui va pour l’instant jusqu’au 29 novembre 2021, les chiffres varient légèrement d’un jour à l’autre entre -13,4% (lundi) et -13,7% (mardi). Le vendredi, on est à -13,5% par rapport à la période de référence. Ici, cela ne signifie pas forcément qu’il y a moins de monde sur les routes le vendredi, mais que si c’est le cas, c’est proportionnel à l’avant-crise.
Encore beaucoup de voitures
S’il ne semble pas y avoir d’effet week-end, le télétravail décongestionne quand même légèrement les routes, à en croire les données de Google étudiées par la Fondation Idea. Un effet qui diminue cependant dans le temps, notamment depuis la rentrée. Mais qui pourrait reprendre avec la recrudescence des cas de Covid-19. On ne sait pas non plus, selon ces chiffres, à quel point la diminution touche les trajets en voiture ou en transports en commun. Sollicitées, les CFL n’ont pas fourni de données à Paperjam.
Et si on observe à nouveau les données de l’Administration des ponts et chaussées, le constat est clair: il y a toujours autant de monde sur les routes, voire plus.
Sur l’A3, entre la Croix de Bettembourg et Luxembourg, entre le 1er septembre et le 31 octobre 2021, le nombre de voitures par jour ouvrable, en moyenne, s’élève à 66.954. Sur la même période en 2019, elles étaient 63.239. Entre la Belgique et le Luxembourg, on passe de 43.667 à 46.103.
Le télétravail n’est pas la panacée
Les données de TomTom montrent quant à elles une baisse du niveau de bouchons moyen sur les routes en 2021 par rapport à 2019. Alors qu’il augmente en heure de pointe ces dernières semaines.
Par exemple, le vendredi 26 novembre, le niveau de congestion était de 111%, contre 53% en 2019 et 30% en 2020. Le lundi 29 novembre, on passe de 55% en 2019 à 33% en 2020, puis 84% en 2021. Le schéma se répète le mardi 30 novembre: 82% à 17h en 2021, contre 74% en 2019 et 41% en 2020. Pareil pour les jours suivants.
Si le télétravail , il semble donc bien moins utilisé depuis la rentrée 2021. Les dernières données à jour relevées par Idea font état d’un taux de télétravail de 41% au deuxième trimestre 2021, mais seuls les résidents sont pris en compte.
Au plus fort de la crise, il était de 52%. Mais ce n’est pas la seule explication, selon Vincent Hein: «Même avec un taux de télétravail élevé, nous avons un regain de mobilité. Quand on télétravaille, on se déplace aussi. Pour aller chercher ses enfants à l’école ou faire des courses. Le fait que les gens télétravaillent ne veut pas dire qu’ils ne vont plus prendre la voiture.»
S’il s’agit bien d’un des leviers pour pallier les problèmes de mobilité, ce ne serait donc pas la panacée, selon lui.