Cet article a été rédigé initialement en anglais, traduit et édité pour le site de Paperjam en français.
La Banque centrale européenne devrait abaisser ses taux directeurs de 25 points de base dans la zone euro pour la troisième fois cette année, alors que l’inflation continue de baisser régulièrement, lors de sa réunion de fixation des taux qui se tiendra à Francfort cette semaine. Eurostat, l’organisme statistique de l’UE, prévoit que le taux d’inflation annuel des prix à la consommation dans la zone euro atteindra 1,8% en septembre, contre 2,2% en août.
Une enquête Paperjam auprès des principaux économistes indique un fort consensus sur la décision d’octobre. Cependant, en ce qui concerne la probabilité d’une dernière réduction de 25 points de base en décembre 2024, seul un économiste prévoit une probabilité inférieure à 50 %, tandis que les autres anticipent cette réduction, ce qui se traduit par un ajustement total des taux de 100 points de base pour l’année.
Michael Krautzberger, directeur mondial des investissements pour les titres à revenu fixe chez AllianzGI, a noté que les données économiques de la zone euro continuaient de s’assouplir. Dans ses commentaires à Paperjam, il a souligné que plusieurs indicateurs s’étaient encore affaiblis au cours du mois précédent, tandis que les données du marché du travail suggéraient une augmentation du chômage par rapport à des niveaux historiquement bas.
M. Krautzberger a également souligné que la croissance des salaires ralentissait et que l’indice global des prix à la consommation (IPC) de la zone euro était revenu à l’objectif à moyen terme de la BCE de 2%, avec des estimations rapides de 1,8% en glissement annuel en septembre. Il a fait remarquer que les récentes déclarations de la BCE reconnaissaient la faiblesse de l’inflation et laissaient entrevoir une baisse potentielle des taux en octobre. M. Krautzberger a conclu que le marché avait presque entièrement intégré cette réduction attendue, suggérant une poursuite du cycle de réduction en décembre.
Hugo Le Damany, économiste de la zone euro chez Axa IM, a affirmé qu’une réduction des taux de 25 points de base était attendue lors de la prochaine réunion, notant que l’inflation de la zone euro en septembre contrastait fortement avec les projections de la BCE. Il a fait remarquer que si la BCE était consciente des données de juillet et d’août, elle avait sous-estimé les chiffres de septembre de 20 points de base, ce qui a eu un impact sur les perspectives d’inflation sur l’ensemble de leur horizon de prévision.
M. Le Damany a ajouté que la demande intérieure ne montrait aucun signe de reprise imminente, ce qui soulève le risque d’une faiblesse prolongée de la demande. Il a souligné que les commentaires récents de Christine Lagarde, présidente de la BCE, de François Villeroy, gouverneur de la Banque de France et membre du conseil d’administration de la BCE, et d’autres membres du conseil d’administration de la BCE, qui sont favorables à une réduction plus rapide des taux, établissent une réduction de 25 points de base au cours des trois prochaines réunions comme base de référence. Tout en reconnaissant les risques potentiels, tels que l’élection américaine et les tensions géopolitiques au Moyen-Orient, il a affirmé que «les cicatrices sur l’économie européenne deviennent assez visibles et pourraient nécessiter de toute façon une politique moins restrictive».
Ruben Segura-Cayuela, responsable de la recherche économique sur l’Europe à la Bank of America, a prédit des réductions consécutives de 25 points de base en octobre et décembre, ainsi qu’en janvier 2025. Il s’attend à ce que la BCE réduise tous les taux de 25 points de base sans surprise, ce qui conduirait à un taux de dépôt de 2 % en juin et de 1,5% à la fin de 2025. M. Segura-Cayuela a averti que la BCE pourrait être trop divisée pour fournir des indications claires sur la politique future dans sa déclaration écrite, mais il a suggéré que Mme Lagarde pourrait donner des indications plus souples au cours de la conférence de presse.
Kevin Thozet, membre du comité d’investissement de Carmignac, a noté un changement dans l’approche de la BCE «d’une baisse du taux directeur par trimestre à une baisse par mois». Il a expliqué qu’alors que la BCE espérait initialement que la croissance économique s’accélère sur fond d’inquiétudes quant à la persistance de l’inflation, les indicateurs avancés pointent désormais vers un nouveau ralentissement de la croissance, l’inflation revenant à des niveaux qu’elle n’avait pas connus depuis plus de trois ans.
M. Thozet a affirmé que le discours de Mme Lagarde sur la dépendance des données soutenait une politique monétaire plus agressive à l’avenir, ajoutant que le risque pour les taux directeurs était orienté à la baisse, car les marchés à revenu fixe indiquaient que les taux de la zone euro se stabiliseraient autour de 2%, alors que l’inflation devrait tomber en dessous de ce niveau.
David Chappell, gestionnaire principal de fonds à revenu fixe chez Columbia Threadneedle Investments, a observé que les perspectives après la dernière réunion de la BCE indiquaient un changement potentiel de la pause attendue en octobre à une réduction des taux, si les données le justifiaient. Il a noté que la 50 points de base de la Réserve fédérale avait créé un précédent, incitant la BCE à signaler des réductions consécutives. M. Chappell a souligné que, sauf données positives inattendues sur la croissance ou l’inflation, la BCE opterait probablement pour une nouvelle baisse des taux en décembre. Il a toutefois ajouté que les perspectives à plus long terme demeuraient incertaines, notamment en raison d’un éventuel changement de leadership aux États-Unis.
Ulrike Kastens, économiste senior chez DWS, s’est fait l’écho de l’attente d’une réduction de 25 points de base en octobre, citant une amélioration des perspectives d’inflation et une nouvelle détérioration du climat des affaires. Elle s’attend à ce que la communication sur la politique monétaire reste largement inchangée. Étant donné les incertitudes politiques et économiques actuelles, Mme Kastens s’attend à ce que la BCE maintienne son approche «dépendante des données» et «de réunion en réunion», avec de nouvelles baisses de taux probables à l’horizon. Elle a indiqué que les prochaines étapes pourraient se dérouler en décembre 2024, lorsque les projections s’étendant jusqu’en 2027 seront disponibles, influençant de manière significative les évaluations de l’objectif d’inflation.
Volker Schmidt, gestionnaire de portefeuille chez Ethenea, a lui aussi exprimé sa confiance dans des baisses de taux consécutives de 25 points de base en octobre et décembre 2024. Il a fait référence à l’affirmation de Mme Lagarde selon laquelle la conviction de la BCE concernant la réalisation de son objectif d’inflation s’était renforcée. M. Schmidt s’attend à ce que cette conviction se reflète dans la prochaine décision sur les taux d’intérêt, qui suivra la révision régulière des attentes économiques de la banque centrale en décembre. Il a noté que la baisse actuelle du taux d’inflation était plus forte que prévu dans la dernière projection, confirmant ainsi la tendance désinflationniste.
Salman Ahmed, responsable mondial de la macroéconomie et de l’allocation stratégique d’actifs chez Fidelity International, a fait remarquer que la communication de la BCE indiquait clairement que la réunion d’octobre était désormais active à la suite d’indicateurs d’inflation et de croissance décevants. Il a noté que plusieurs risques de baisse soulignés dans la dernière mise à jour des prévisions des services de la BCE s’étaient matérialisés, ce qui a conduit la BCE à sembler prête à accélérer son cycle de réduction à une réunion par an. M. Ahmed a conclu qu’en dépit de la croissance persistante des salaires, la BCE semblait plus confiante dans sa volonté de s’orienter vers une politique neutre pour soutenir la croissance économique.
Paul Jackson, responsable mondial de la recherche sur l’allocation d’actifs chez Invesco, s’attend à ce que la BCE continue d’abaisser progressivement les taux, indiquant qu’il ne prévoit pas la nécessité d’une réduction de 50 points de base. Il a noté que l’économie de la zone euro semblait avoir perdu de son élan par rapport au début de l’année, alors que l’inflation évoluait dans la bonne direction. M. Jackson a laissé entendre que la prochaine réduction pourrait avoir lieu le 17 octobre, mais si ce n’est pas le cas, elle pourrait suivre en décembre, avec potentiellement une autre réduction en janvier 2025. Il a souligné que les marchés avaient revu à la hausse leurs attentes concernant les taux directeurs de la Réserve fédérale, mais que si les données américaines s’affaiblissaient et que les marchés anticipaient des réductions plus agressives de la part de la Fed, cela pourrait permettre une réponse plus affirmée de la part de la BCE.
Andrzej Szczepaniak, économiste européen senior chez Nomura, a prévu que la BCE réduirait ses taux de 25 points de base à chaque réunion entre octobre 2024 et juin 2025, suivie d’une dernière réduction de 25 points de base en septembre 2025. Il a prévu que cela aboutirait à un taux de dépôt terminal de 1,75% en septembre 2025. M. Szczepaniak a déclaré qu’il s’attendait à ce que la BCE réduise les taux à un niveau légèrement inférieur au taux neutre, estimant que le taux neutre dans la zone euro se situe entre 2% et 2,5%. Il s’est dit préoccupé par le fait que l’inflation globale des prix à la consommation risque d’être inférieure à l’objectif de 2% de la BCE à moyen terme. Il a également noté que la récession en Allemagne, la stagnation en France et l’absence d’une reprise tirée par les consommateurs de la zone euro suggéraient que la BCE allait de plus en plus se concentrer sur les préoccupations liées à la croissance économique, ce qui pourrait conduire à des réductions modérées des taux pour soutenir l’économie.
Axel Botte, responsable de la stratégie des marchés chez Ostrum Asset Management, a déclaré que la BCE était susceptible de réduire les taux d’intérêt de 25 points de base cette semaine, notant que l’inflation était tombée en dessous de 2 %, un signal clé pour des réductions de taux dans un contexte de risques de croissance à la baisse. Il a fait remarquer qu’un mois plus tôt, la BCE avait résisté à une action préventive en raison des pressions persistantes sur les prix intérieurs, l’inflation des services s’étant maintenue autour de 4% depuis la fin de 2022.
Alors que la Réserve fédérale a réduit ses taux de 50 points de base le 18 septembre, M. Botte a souligné que l’assouplissement monétaire mondial a créé des conditions favorables à l’action de la BCE. Il a ajouté que la BCE restait silencieuse sur sa politique quantitative, malgré la fin prévue des réinvestissements du programme d’achat d’urgence en cas de pandémie (Pepp) en 2024, et a fait valoir que le resserrement quantitatif était en contradiction avec une stratégie de réduction des taux, soulignant la nécessité d’une politique claire.
Konstantin Veit, gestionnaire de portefeuille chez Pimco, a convenu que la BCE réduirait le taux de facilité de dépôt de 25 points de base en octobre. Il a noté que des conditions macroéconomiques plus faibles ont probablement poussé la BCE à agir plus tôt que la réduction prévue en décembre. M. Veit a suggéré que le taux restrictif actuel de 3,25% pourrait être ajusté si l’inflation augmentait de manière inattendue, tandis que la réduction protégerait contre les risques de baisse. Il s’attend à ce que la BCE continue d’adopter une approche axée sur les données, réunion par réunion, et a noté que, malgré une inflation intérieure élevée, la politique monétaire resterait restrictive pour l’instant, avec une autre baisse de taux probable en décembre 2024.
Mathieu Savary, chief European investment strategist chez BCA Researchhez BCA Research, a déclaré que BCA s’attend à ce que la BCE réduise les taux de 25 points de base lors de ses réunions d’octobre et de décembre. Avec l’affaiblissement de l’économie de la zone euro, l’atténuation des pressions salariales et une inflation sous contrôle, les récentes déclarations des dirigeants de la BCE signalent un rythme plus rapide de baisses de taux. Savary a également noté que la probabilité d’une réduction de 50 points de base a augmenté, car la baisse agressive des taux par la Fed donne à la BCE la marge nécessaire pour accélérer l’assouplissement sans affaiblir l’euro.
Le conseil des gouverneurs de la BCE, l’organe chargé de définir la politique monétaire, se réunit jeudi après-midi.