Martine Backendorf, chargée de communication de l’asbl Les Auberges de jeunesse luxembourgeoises, et Joël Martins, le gérant de celle d’Echternach, dans une des salles communes. (Photo: Paperjam)

Martine Backendorf, chargée de communication de l’asbl Les Auberges de jeunesse luxembourgeoises, et Joël Martins, le gérant de celle d’Echternach, dans une des salles communes. (Photo: Paperjam)

Pas vraiment un hôtel ni même un camping, les auberges de jeunesse ont une carte à jouer dans le tourisme au Luxembourg. Présentation dans le cadre de notre opération «Un été pas comme les autres».

Les canards l’ont compris: endormis au bord du lac d’Echternach, les palmipèdes sont plus de 10, mais ils passent leurs vacances à l’abri du Covid-19 et ne risquent pas d’amende. Les pédalos bleu et jaune attendent leurs clients. Les deux terrains de beach-volley aussi. Les trampolines sont encore retournés.

À l’heure où le soleil matinal caresse cette route perdue vers Trèves et Bitbourg, l’auberge de jeunesse d’Echternach se réveille doucement. Le gros cube à la façade en bois casse les codes de l’architecture locale. Les rideaux ne sont plus en dentelle de grand-mère, les grands dortoirs ne sont plus tout à fait la règle, et les randonneurs au sac à dos ont souvent laissé place à des familles qui trouvent là un bon compromis entre prix très abordables et mobil-home ou clubs de vacances.

Avec ses 29 chambres et 118 lits, l’auberge attend les randonneurs avec impatience et les familles avec plaisir. «Les gens avec de gros sacs à dos, de passage pour une nuit, existent encore, mais ils sont de plus en plus rares», dit le responsable de la structure, ouverte toute l’année. Après l’École hôtelière de Diekirch, un job ou deux de cuisinier, Joël Martins a mis son envie de servir ses clients au service de cette auberge de jeunesse de nouvelle génération, qui a remplacé en 2005 celle du centre-ville, vers laquelle renvoie encore le GPS…

Le confinement, comme une ambiance western

«Il ne manquait que cette botte de paille qui traverse la rue, poussée par le vent, pour se sentir dans une ville fantôme d’un vieux western», explique-t-il, le regard dans le vide. «Surtout la première semaine de confinement. C’était étrange. Plus personne. Après, les gens sont revenus se promener un peu autour du lac, c’était un peu plus animé, même si nous avions mis une grande partie du personnel au chômage technique.»

Aujourd’hui, l’ambiance a changé. «On croise les doigts pour que l’évolution des cas positifs se stabilise», dit-il, entre deux clients qu’il s’empresse de servir avec attention. Au fur et à mesure des cas positifs, l’auberge a enregistré des réservations et des annulations.

«Les Allemands, les Belges, ou même des Suisses, réservent et annulent, faute de savoir s’ils pourront repartir chez eux ensuite. Tous les jours, une dizaine de demandes entrent ou sortent.» Un yo-yo que l’on doit à quelques fêtes de famille, à quelques fiestas entre amis ou quelques foyers d’infection de gens qui sont au mauvais endroit au mauvais moment. Il n’y a pas d’aigreur dans sa voix. Le gérant et ses 30 salariés se multiplient, renseignent un client qui veut aller faire une randonnée dans le Mullerthal, font remarquer à un père de famille d’Esch-sur-Alzette que son café est du café équitable et qu’il est offert, préparent le mur d’escalade de 14 mètres de haut, ou mettent en place les coussins sur la terrasse-lodge.


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«Les auberges de jeunesse ont évolué», explique à son tour Martine Backendorf, coordinatrice de l’animation et de la communication pour l’asbl. «Nous visons non seulement les voyageurs dans une ambiance sac à dos/dortoir, mais aussi des groupes, des écoles ou des groupes de cyclistes, par exemple, ainsi que des familles. Nous organisons des anniversaires ou nous louons nos salles de réunions à des entreprises qui veulent organiser du teambuilding.»

Les auberges appartiennent à une association sans but lucratif et, à ce titre, n’ont pas le droit de faire des bénéfices. Tous sont directement réinvestis au service des 200 personnes qui y travaillent et des rénovations. Presque toutes sont de nouvelles auberges, et celle de Vianden, parmi les plus demandées, avec Luxembourg-ville, aura, dans trois ans, une nouvelle infrastructure dans l’ancien cloître.

Produits locaux et habitudes ancestrales

M. Martins et Mme Backendorf montrent les espaces communs, où l’on peut (/où l’on doit) se rencontrer, discuter, jouer à un jeu de société. La cafétéria propose 90% de produits frais et locaux, «où chacun est invité à faire un petit geste», comme débarrasser son plateau, ou défaire son lit. «Nous voulons garder l’esprit des auberges de jeunesse, cette envie de pédagogie, du respect de la nature et de l’environnement», dit-elle. «Nous avons même deux chambres pour des personnes à mobilité réduite, et elles peuvent même accéder à leurs chambres sans problème», ajoute-t-il.

Les chambres sont propres et simples. La majorité n’a pas de grand lit pour les parents. «Il y a des familles où cela convient très bien à Madame. Et il y a des familles où cela convient très bien à Monsieur», s’amuse M. Martins.

L’initiative du gouvernement est non seulement la bienvenue, mais les auberges de jeunesse l’ont adaptée: pour les 50 euros du bon, le visiteur peut soit passer deux nuits avec les petits-déjeuners, soit passer une nuit en pension complète. Les «youth hostels», bien connus dans le nord de l’Europe ou en Allemagne, n’ont pas la même notoriété au Luxembourg, et l’opération du gouvernement est une belle opportunité de les faire découvrir.

Face aux hésitations, l’auberge tente de garder tout le monde «à bord», quitte à permettre aux visiteurs de venir plus tard. «Certains viennent ici une fois par an, ils viendront deux fois l’an prochain.» Au milieu de nulle part, l’auberge de jeunesse d’Echternach est au milieu de tout. La plus vieille ville du pays est riche de mille occupations et de paysages reposants. Pas étonnant que les canards y élisent domicile.