Le directeur de la coopérative Vinsmoselle voit la production durable comme une nécessité.  (Photos: Domaines Vinsmoselle/Maison Moderne Archives)

Le directeur de la coopérative Vinsmoselle voit la production durable comme une nécessité.  (Photos: Domaines Vinsmoselle/Maison Moderne Archives)

Les Domaines Vinsmoselle, le plus grand producteur de vin et crémant du pays, ont obtenu le label Fair’n Green qui certifie leur engagement en faveur d’une viticulture plus durable. La coopérative – qui fédère 170 vignerons – y voit aussi une façon d’anticiper certaines réglementations et de satisfaire les demandes des clients, en pleine évolution.

Les Domaines Vinsmoselle, qui fédèrent 170 membres et commercialisent quatre marques de vins et crémants produits sur 600 hectares dans l’est du pays, ont officiellement reçu la certification Fair’n Green, qui confirme leur engagement en faveur d’une «viticulture durable et raisonnée». Autrement dit, une production de vin qui peut «être pratiquée au même endroit, sur le long terme, c’est-à-dire sur plusieurs générations», définit justement l’organisme Fair’n Green.

Et plus concrètement? À la différence de la viticulture biologique qui se caractérise par l’absence d’utilisation de produits chimiques dans la culture des vignes, la viticulture durable est une démarche plus globale de gestion du domaine et qui ne cible pas uniquement les vignes et le processus de vinification. Les critères en vue d’une labellisation concernent la mise en place de mesures visant à préserver la biodiversité, protéger les sols et l’eau, réduire les combustibles fossiles. Cela implique d’intégrer cette durabilité également au niveau des objectifs économiques et sociaux.

C’est bien cette démarche globale qui a séduit les Domaines Vinsmoselle. «Le verre a une empreinte de CO2 catastrophique. Nous travaillons maintenant avec des bouteilles plus légères, des emballages en carton, qui produisent beaucoup moins de CO2», indique le directeur, André Mehlen. La coopérative a aussi ainsi que les herbicides sur certaines AOC premium. Elle a remplacé 40% de ses engrais chimiques par des engrais naturels et limite les interventions avec traitements phytosanitaires à des cas d’extrême nécessité. «Nous produisons 50% de notre consommation d’électricité sur notre site de production et, l’an prochain, nous voulons en installer encore pour parvenir jusqu’à 75%», prévoit-il.

Durabilité rime avec… anticiper

Si pour André Mehlen, c’est bien la volonté de contribuer à préserver la planète qui doit guider les vignerons dans cet engagement, il concède que, d’un point de vue business, il s’agit aussi d’un choix stratégique, en matière de demande du consommateur et de réglementations. «Il faut s’adapter, moderniser la structure, regarder vers le futur. Nous avons voulu nous engager, parce que les vignerons ont plus d’intérêts à travailler de façon écoresponsable. On le fait déjà et on veut pouvoir le prouver. Nous sommes persuadés que, dans quelques années, de plus en plus de pays vont exiger ce type de certificat. C’est déjà le cas des pays scandinaves. On voit que les consommateurs font de plus en plus le choix de se tourner vers des produits conçus plus durablement. Nous voulons être parmi les premiers dans cette voie. Mais, bien sûr, nous devons aussi toujours garder un œil vers le consommateur, s’il s’oriente de plus en plus vers ce genre de produits, alors il faut le suivre», plaide-t-il.

Nous avons conscience qu’aujourd’hui, les gens ont moins d’argent en poche, ils consomment moins.

André Mehlendirecteur Coopérative Domaines Vinsmoselle

D’une façon générale, aujourd’hui en Europe, le client boit moins, mais il boit mieux. C’est-à-dire qu’il consacre une consommation limitée à des produits de qualité. «Aujourd’hui, le label bio est plus parlant pour le consommateur, il sait ce que c’est, ce label est mieux identifié. Mais le consommateur comprend aussi de plus en plus ce que veut dire produire de façon plus durable et je crois que ce label deviendra de plus en plus important dans le futur», explique André Mehlen. 

En parlant de consommateur, qu’est-ce que cette certification va changer pour lui? Dans un premier temps, peu de chose. Le goût du vin ne changera pas, mais les bouteilles du millésime feront mention du label sur l’étiquette. Quant au prix, la certification ne devrait pas le faire augmenter, déclare André Mehlen. «On revoit chaque année les prix. Pour le moment, on n’a pas encore pris de décision, mais, si on les montait, cela ne serait pas à cause de la certification. Nous avons conscience qu’aujourd’hui, les gens ont moins d’argent en poche, ils consomment moins. Donc on ne va pas augmenter le prix à cause du label.»

… et avec parts de marché

Pour André Mehlen produire avec plus de durabilité ne signifie pas rogner sur la rentabilité. «Il faut s’adapter, moderniser la structure, se rendre conforme et anticiper les attentes futures. Certains vignerons étaient réticents et le sont peut-être encore, mais il faut y aller, car, à un moment, nous n’aurons plus le choix de le faire. On ne le fait peut-être pas pour gagner plus d’argent, mais pour ne pas perdre de parts de marché.» Il raconte par exemple qu’il n’y a pas moins d’une semaine, une enseigne belge a annoncé qu’elle demanderait bientôt aux producteurs de prouver leur engagement durable. «En s’engageant dans cette voie, on anticipe pour ne pas perdre de marchés et pour stabiliser et garantir les ventes.»

Désormais, la coopérative compte élaborer une nouvelle analyse interne et redéfinir quelques priorités, pour conforter son engagement. «Ce qui pourra engager des coûts et des investissements, mais il est encore un peu tôt pour dire ce qui devra prioritairement changer», dit André Mehlen, qui évoque un «processus permanent d’amélioration».  La certification est active jusqu’au 31 décembre 2024, date fixée pour mesurer les avancées et renouveler le label.