Dix leaders luxembourgeois confient leurs attentes concernant l’Union européenne. (Photo: Guy Wolff)

Dix leaders luxembourgeois confient leurs attentes concernant l’Union européenne. (Photo: Guy Wolff)

Dix leaders luxembourgeois, issus de divers secteurs économiques, partagent leurs priorités en vue de la prochaine législature européenne. Leurs attentes envers les eurodéputés mettent en lumière un enjeu-clé pour l’avenir de l’Europe: la compétitivité. De l’avis général, l’UE impose des contraintes excessives aux PME par rapport à l’objectif à atteindre.

Isabelle Lentz, CEO de Munhowen

Isabelle Lentz, CEO de Munhowen. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne)

Isabelle Lentz, CEO de Munhowen. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne)

« Il est essentiel que l’Europe reconnaisse et encourage les entreprises qui cherchent à opérer sur un marché ouvert et compétitif, plutôt que de restreindre leur champ d’action géographique », insiste Isabelle Lentz. La société mère de Munhowen, Brasserie Nationale, souhaite acquérir Boissons Heintz, une opération qui combinerait les deux principaux distributeurs en gros de boissons au Luxembourg. « Nous nous retrouvons aujourd’hui à devoir justifier la fusion devant la Commission européenne », déplore la dirigeante, qui y voit un obstacle à l’expansion de Brasserie Nationale dans la Grande Région.

Carole Muller, CEO de Fischer et présidente de Luxembourg Confederation

Carole Muller, CEO de Fischer et présidente de Luxembourg Confederation (Photo: Guy Wolff)

Carole Muller, CEO de Fischer et présidente de Luxembourg Confederation (Photo: Guy Wolff)

« Commencez par penser petit ! » Carole Muller coiffe sa casquette de présidente de Luxembourg Confederation pour s’adresser aux eurodéputés. « Les réglementations doivent être ajustées précisément aux réalités des PME. Nos responsables politiques doivent ériger la simplification législative en priorité centrale, aussi au niveau de l’Europe. En privilégiant des normes orientées vers les résultats plutôt que des procédures rigides, nous parviendrons à alléger considérablement les charges administratives imposées aux PME. Cette approche stratégique évitera l’adoption de solutions génériques et inefficaces. »

Claude Seywert, CEO d’Encevo

Claude Seywert, CEO d’Encevo (Photo: Guy Wolff)

Claude Seywert, CEO d’Encevo (Photo: Guy Wolff)

« Tout en respectant nos engagements climatiques, il est urgent de se recentrer sur la compétitivité de l’industrie et des PME européennes, considère Claude Seywert. Le marché intérieur doit être renforcé par des politiques pragmatiques, sans surcharge administrative et avec une mise en œuvre accélérée, car le coût du facteur temps est totalement sous-estimé en Europe. » Dans le domaine d’activité d’Encevo – l’énergie –, le CEO cite l’exemple des projets hydro­électriques, où la lenteur dans l’obtention des financements européens retarde les décisions d’investissement et le début des demandes d’autorisation.

Philippe Glaesener, vice-président senior chez SES Space & Defence

Philippe Glaesener, vice-président senior chez SES Space & Defence (Photo: Guy Wolff)

Philippe Glaesener, vice-président senior chez SES Space & Defence (Photo: Guy Wolff)

« Nous devons tout mettre en œuvre afin de ne pas être tributaires ou dépendants d’autres pays ou continents, fait valoir Philippe Glaesener. L’Europe, en général, et le Luxembourg, en particulier, doivent être des pionniers, encore plus agiles et innovants. Afin d’y arriver, il faudra réduire au plus vite la bureaucratie, soutenir ceux qui osent investir et former nos jeunes afin qu’ils puissent relever les nouveaux défis. » De cette Europe, le représentant de SES attend notamment qu’elle permette au Luxembourg de « se positionner sur les grands projets souverains » (cyber, digitalisation, énergie, défense…).

Linda Thiry, membre de la direction de Karp-Kneip

Linda Thiry, membre de la direction de Karp-Kneip (Photo: Guy Wolff)

Linda Thiry, membre de la direction de Karp-Kneip (Photo: Guy Wolff)

L’entreprise de travaux Karp-Kneip attend les décideurs européens sur le développement durable, domaine auquel elle se dit « sensible depuis de longues années ». « L’UE doit harmoniser les normes et promouvoir les bonnes pratiques européennes en la matière, déclare la membre de la direction Linda Thiry. Pour faciliter et inciter au développement durable, les pays membres de l’UE doivent avoir les mêmes normes, critères, démarches et exigences pour donner la possibilité aux entreprises d’avancer, d’investir et de s’adapter sur le long terme, notamment en ce qui concerne la réduction d’émissions de CO2. »

Karin Scholtes, directrice du marché luxembourgeois et de la banque d’affaires et d’investissement à la Bil

Karin Scholtes, directrice du marché luxembourgeois et de la banque d’affaires et d’investissement à la Bil (Photo: Guy Wolff)

Karin Scholtes, directrice du marché luxembourgeois et de la banque d’affaires et d’investissement à la Bil (Photo: Guy Wolff)

« Prévenir une crise financière est primordial, soutenir la compétitivité des banques, et des entreprises en général, l’est tout autant, estime Karin Scholtes. Il est essentiel que le processus législatif prenne en compte la réalité de l’activité économique. Pour le secteur bancaire, cela signifie baisser la charge admini­strative issue des exigences réglementaires. » La représentante de la Bil attend des décideurs européens qu’ils établissent « un cadre dans lequel les entreprises pourront se développer, créer de l’emploi, innover, apporter de la valeur aux clients et, par ricochet, aux citoyens ».

Alessandro Rizzo, CEO d’EuroCaution

Alessandro Rizzo, CEO d’EuroCaution (Photo: Guy Wolff)

Alessandro Rizzo, CEO d’EuroCaution (Photo: Guy Wolff)

« Dans les décisions des instances de l’UE et ses projets d’actes législatifs, le principe de proportionnalité doit être renforcé. » Alessandro Rizzo résume un sentiment largement partagé dans le monde économique : « Bien trop souvent, l’UE impose des contraintes excessives aux PME par rapport à l’objectif à atteindre. Cela crée trop de bureaucratie. » Le CEO du courtier EuroCaution critique également la politique monétaire restrictive de la Banque centrale européenne : « Elle ne semble plus adaptée à notre époque. Plutôt que de trop chercher à contrer l’inflation, l’UE devrait faciliter l’augmentation de l’offre. »

Gerry Wagner, directeur des relations institutionnelles internationales chez Arval BNP Paribas Group

Gerry Wagner, directeur des relations institutionnelles internationales chez Arval BNP Paribas Group (Photo: Guy Wolff)

Gerry Wagner, directeur des relations institutionnelles internationales chez Arval BNP Paribas Group (Photo: Guy Wolff)

« En tant qu’acteur du secteur automobile au Luxembourg, je soutiens la priorité accordée par l’UE aux enjeux environnementaux », pose d’emblée Gerry Wagner. Pour autant, insiste celui qui officie aussi comme porte-parole de la House of Automobile, il faut garder un équilibre entre le Green Deal et la compétitivité de l’économie. « L’UE, déjà coincée entre une concurrence déloyale de l’est et le protectionnisme de l’ouest, doit revoir certaines contraintes réglementaires et surtout le reporting excessif en matière de RSE, fort pénalisant en termes de coûts pour les entreprises et paralysant toute innovation. »

Michèle Eisenhuth, associée et co-présidente chez Arendt

Michèle Eisenhuth, associée et co-présidente chez Arendt (Photo: Guy Wolff)

Michèle Eisenhuth, associée et co-présidente chez Arendt (Photo: Guy Wolff)

« L’inflation réglementaire entraîne des coûts ingérables pour les petits acteurs, assène Michèle Eisenhuth, citant l’exemple des règles ESG. L’UE doit adopter une méthode plus proportionnée, basée davantage sur les principes, plutôt que de vouloir réglementer les moindres détails. » L’associée d’Arendt pointe également un problème de cohérence : « D’un côté, l’UE promeut l’union des marchés de capitaux. De l’autre, le nouveau règlement Eltif 2, destiné à faciliter le financement de l’économie par les épargnants, a été alourdi de contraintes qui pourraient l’empêcher d’atteindre ses objectifs initiaux. »

Gérard Hoffmann, CEO de Proximus Luxembourg

Gérard Hoffmann, CEO de Proximus Luxembourg (Photo: Guy Wolff)

Gérard Hoffmann, CEO de Proximus Luxembourg (Photo: Guy Wolff)

« L’essor de l’IA nécessite une souveraineté numérique des données. » C’est le message central du patron de Proximus Luxembourg, Gérard Hoffmann. « L’UE devra se concentrer sur la mobilisation de capitaux conséquents dans la recherche et le développement, des politiques rigoureuses de protection des données et la promotion de normes éthiques strictes. Par le biais d’une coopération entre États membres, entreprises et institutions académiques, nous pouvons bâtir un écosystème numérique européen solide et compétitif. Cela signifie également implanter un marché de capitaux pour soutenir nos entreprises innovantes. »

Cet article a été rédigé pour l’édition magazine de Paperjam paru le 22 mai 2024. Le contenu du magazine est produit en exclusivité pour le magazine. Il est publié sur le site pour contribuer aux archives complètes de Paperjam.  

 

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