Malgré des délais de livraison qui s’allongent et des clients parfois impatients, les chiffres d’affaires des principaux distributeurs luxembourgeois ont été peu touchés par la crise mondiale. Jusqu’à présent du moins. (Photo: Shutterstock)

Malgré des délais de livraison qui s’allongent et des clients parfois impatients, les chiffres d’affaires des principaux distributeurs luxembourgeois ont été peu touchés par la crise mondiale. Jusqu’à présent du moins. (Photo: Shutterstock)

Tout le secteur automobile mondial est frappé par la pénurie actuelle de semi-conducteurs et donc des microprocesseurs. Avec des effets qui se font nettement ressentir au Luxembourg attestent plusieurs concessionnaires.

Trois mois, six mois, parfois presque un an d’attente pour réceptionner un véhicule neuf en concession et .  Tout cela Une crise mondiale que personne ne semble avoir anticipée.

Au Luxembourg, les concessionnaires et les sociétés de leasing doivent composer avec cette nouvelle réalité.

Quelles sont les conséquences sur l’industrie automobile?

La crise sanitaire a déjà impacté à elle seule, et lourdement, toute l’industrie automobile mondiale en 2020 puis encore après, causant des pertes de production, des retards dans les livraisons et faisant plonger les chiffres d’affaires. Le groupe Stellantis (Peugeot, Renault, Opel, Citroën…) a ainsi accusé une perte de production de 190.000 véhicules au premier trimestre 2021.

Et avec la reprise économique, on assiste à un effet ciseaux: sous la pression des clients qui veulent passer à l’électrique ou aux véhicules hybrides, les constructeurs accentuent leurs demandes auprès des sous-traitants, qui se retrouvent en difficulté puisque les fabricants de semi-conducteurs ont opéré des priorités d’attribution qui les ont conduits à d’abord servir d’autres marchés. Depuis le début de cette année, le phénomène est devenu une source d’inquiétude et de crise puisque la demande en semi-conducteurs explose dans de très nombreux domaines au point de générer un risque de pénurie totale… Or, l’Europe est en situation de faiblesse stratégique et de très grande dépendance, la production de semi-conducteurs est en effet concentrée dans une poignée de pays d’Asie notamment le géant taïwanais TSMC (50% de la production mondiale) et le sud-coréen Samsung Electronics. 


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Entre 6,3 et 7,1 millions de véhicules non produits en un an

Les patrons des grandes marques mondiales ont de quoi s’arracher les cheveux, car la demande est là et bien là, et la production avait été programmée en conséquence. Les prévisions mondiales envisageaient la sortie de 80,78 millions de véhicules légers des chaînes mondiales en 2021, selon une publication d’août dernier par le cabinet IHS Markit. Cela représente une hausse de 8,3% par rapport à 2020. La stabilisation ne devrait pas, selon le cabinet, se produire avant le deuxième semestre 2022.

Une ambition légitime, mais qui sera impossible à atteindre. «On estime que la production perdue en raison des perturbations de la chaîne d’approvisionnement en semi-conducteurs a atteint 1,44 million d’unités au premier trimestre et 2,60 millions d’unités au deuxième trimestre. (…) Cela placerait le risque annuel associé aux pénuries de semi-conducteurs entre 6,3 millions et 7,1 millions d’unités au niveau mondial», selon Mark Fulthorpe, directeur exécutif, prévisions mondiales pour les véhicules légers, chez IHS Markit.

Quel impact sur les distributeurs luxembourgeois?

Au Luxembourg comme ailleurs, la «crise» des semi-conducteurs se traduit par des retards de livraison de véhicules neufs chez les distributeurs, et aussi de véhicules disponibles en concession pour l’exposition et la vente. Mais d’une manière générale, les concessionnaires luxembourgeois semblent bien absorber les chocs avec une gestion des stocks mieux anticipée.

Benjamin Bauquin, directeur général chez Car Avenue Belux, reste cependant prudent: «Cette pénurie qui met en souffrance toute la filière automobile, va se prolonger encore et impactera toutes les marques et tous les modèles. Le délai de livraison pour un véhicule produit est désormais de 3 à 6 mois, selon les modèles. Les délais sont un peu plus courts pour les véhicules 100% électriques.» Le délai est également de 6 mois pour les marques de BMW et Mini, distribuées par le groupe Bilia-Emond «quelle que soit la gamme de véhicules et bien que notre production n’ait jamais été arrêtée totalement» souligne le managing director Baptiste Vallin.

Le groupe Car Avenue constate les mêmes problèmes de retard de production pour toutes les marques du groupe Stellantis. Le phénomène est un peu moins marqué sur les autres marques asiatiques Nissan, Toyota, Kia et Lexus.

Et les clients? Ils semblent faire preuve de patience, la situation étant identique partout. «Si le client ne veut pas attendre, on ne se bat pas», commente Baptiste Vallin, qui préfère répondre aux 5% de clients mécontents en proposant un véhicule d’attente.

Chez Car Avenue, on s’adapte: «les situations les plus problématiques concernent les artisans ou les petites entreprises qui parfois ont un besoin urgent de remplacer un véhicule. Mais nous parvenons à trouver des solutions de location court-terme ou de vente de véhicules d’occasion à faible kilométrage pour lesquelles nous disposons de plus de stock.»

Malgré cela, les chiffres d’affaires seraient peu contrariés.  Même si par exemple chez BMW, qui réalise une année 2021 meilleure que la précédente, on s’inquiète des livraisons pour le 4e trimestre «qui pourrait commencer à impacter les résultats satisfaisants jusqu’ici et donner le ton de 2022», analyse Baptiste Vallin. «Les marques ont revu leurs objectifs à la baisse, mais nous sommes quand même pénalisés par la baisse du niveau de facturation», souligne aussi Benjamin Bauquin.

Le délai de livraison pour un véhicule produit est désormais de 3 à 6 mois.

Benjamin BauquinDirecteur généralCar Avenue Belux

Des réponses locales sont donc apportées par les distributeurs, qui sont en première ligne. Mais qui sont aussi soutenus par les marques qu’ils représentent.  Miriam Eisenmenger, marketing manager du groupe Losch à Luxembourg, reste donc positive: «Au cours des derniers mois, la task force du groupe Volkswagen a travaillé intensément et avec succès pour minimiser les effets du goulot d’étranglement mondial des semi-conducteurs. C’est pourquoi, malgré la situation tendue, la production dans les usines Volkswagen n’a dû être ajustée que de temps en temps jusqu’à présent.»

La vigilance reste donc plus que jamais de mise.