À quoi ont servi ces concerts?
Anne Vergison. – «Pour nous, l’important était de montrer que certaines activités peuvent reprendre sous certaines conditions. C’était un beau projet qu’on a pu concilier avec des mesures sanitaires bien installées. Et il a été très agréable de voir l’adhérence des gens à une reprise comme celle-ci. Tous les spectateurs ont été exemplaires au niveau du double test à effectuer avant le concert, peu importe le style de musique qu’ils venaient écouter. C’est très important de voir que les gens jouent le jeu.
Et sur un plan plus scientifique?
«C’était un ‘pilote’. On a peu vu de concerts de ce genre depuis le début de la pandémie. À part ceux organisés à Leipzig, cet été, et du côté de Barcelone, en décembre. Tandis que Paris devrait avoir le sien prochainement aussi. On va donc tout documenter scientifiquement et de manière rigoureuse. Beaucoup de questions se posent quant à l’organisation d’événements de grandeur bien supérieure. Jusqu’à combien de personnes peut-on réunir? Avec quelle densité de population?…
On a constaté que des soucis sur le plan mental se développaient […]. On voit ainsi concrètement que la consommation d’antidépresseurs ou de somnifères est en augmentation dans la population.
Ces concerts-tests peuvent-ils vraiment mener à l’organisation, malgré la présence du Covid-19, de concerts ou de manifestations culturelles de plus grande envergure que les 100 personnes qui étaient réunies tous les jours à la Rockhal?
«L’accumulation de données pourrait le permettre. Des événements comme ceux-ci restent expérimentaux et conditionnés au respect des normes sanitaires. Mais ils ont un côté important de par l’activité culturelle qu’ils proposent. Car on a constaté qu’en termes de santé, des soucis sur le plan mental se développaient en raison de la durée de cette crise et du manque d’activités culturelles ou sportives, notamment. On voit ainsi concrètement que la consommation d’antidépresseurs ou de somnifères est en augmentation dans la population. Il faut pouvoir en tenir compte. Si la dimension sanitaire est très importante, elle n’est pas tout. On essaie ainsi d’accompagner d’autres événements, notamment sportifs.
Lesquels?
«Le Meeting international d’athlétisme qui se disputait ce week-end à la Coque, par exemple. On est aussi en discussion avec l’ING Marathon. Pour l’instant, compte tenu des règles en vigueur, ce dernier ne pourrait légalement pas avoir lieu. Mais qu’en sera-t-il le 15 mai, jour où il est censé se dérouler? Les conditions seront meilleures, mais personne ne sait à quel point. Les organisateurs souhaiteraient être fixés. Mais dire oui ou non aujourd’hui est impossible. On leur a proposé de réduire le nombre de participants, mais c’est compliqué à leur niveau. Ils m’ont dit que pour rentrer dans leurs frais, ils ont besoin de 8.000 participants. Cela fait beaucoup… On doit fixer une réunion avec eux. Mais organiser une telle course semble difficile.
Pour le type d’événement qui a eu lieu à la Rockhal, il me semble envisageable de réunir jusqu’à 1.000 personnes.
Vous disiez, tout à l’heure, que l’accumulation de données pourrait permettre l’organisation de concerts de plus grande ampleur…
«Pour le type d’événement qui a eu lieu à la Rockhal, où le public est régulé de manière efficace, il me semble envisageable de réunir jusqu’à 1.000 personnes. Du moins, c’est l’impression que j’en ai. Et il me semble qu’à la Rockhal, ils y songent dans leur grande salle (dont la capacité «normale» est de 6.000 places). Ils sont en train de revoir leur ventilation. Et on sait à quel point cette dernière peut jouer un rôle-clé à l’heure actuelle. Après, il faut se rendre compte que la logistique qui entourerait une telle manifestation serait assez énorme. D’où la question: est-ce que tout cela serait rentable? Et ça, même si la Rockhal est un établissement public qui a donc pour but de défendre le secteur culturel. Les cinq concerts de ces derniers jours ont donné de l’espoir. Je l’ai constaté en assistant à une partie de deux d’entre eux.
Tous les tests antigéniques effectués à la Rockhal se sont révélés négatifs. Par contre, six tests PCR ont, eux, été positifs ou faiblement positifs.
Concrètement, qu’ont donné les différents tests effectués avant les concerts?
«Tous les antigéniques se sont révélés négatifs. Par contre, à l’heure actuelle et alors que tous les résultats ne sont peut-être pas en notre possession (cette interview a été effectuée lundi 15 février au soir, ndlr), six tests PCR ont, eux, été positifs ou faiblement positifs. Sans savoir si ces personnes étaient en début de maladie ou non. Mais on a donc ces résultats au temps zéro, celui des concerts, et on verra l’évolution en fonction du deuxième test PCR que les spectateurs présents doivent effectuer une semaine plus tard. On connaît la position des ‘positifs’ dans la salle et on pourra donc analyser ça après coup. Ce sera forcément intéressant. Et s’il n’y a pas de nouveaux cas, ce sera un argument qui ira dans le sens d’organisations de ce type.
Sur les réseaux sociaux, on a vu beaucoup de commentaires de gens qui ne comprenaient pas pourquoi on pouvait organiser un concert alors qu’on ne peut pas se rendre dans un restaurant. Vous les comprenez?
«Oui. Je comprends la frustration. C’est le fameux ‘pourquoi eux? Pourquoi pas nous?’. Mais il a été expérimenté que le fait de manger ou parler sans masque, comme on le fait au restaurant, était une des sources de transmission les plus risquées. Et c’est encore plus compliqué dans un bar où on est en mouvement, où on a tendance à un peu moins se contrôler quand on a bu. C’est pour toutes ces raisons qu’il était hors de question pour nous d’autoriser les boissons lors des représentations à la Rockhal. Le risque semblait trop grand.»