Gérard Doucet, directeur, Gedeon. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne)

Gérard Doucet, directeur, Gedeon. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne)

Gedeon Cosmetic a développé la vente en ligne de ses produits à destina­tion de salons de beauté avant la crise sanitaire, qui a affecté son marché quatre mois durant. Un pari gagnant pour cette TPE particu­lièrement résiliente.

Du rehaussement des cils aux crèmes de traitement contre les callosités plantaires, Gedeon Cosmetic propose ses produits destinés aux professionnels de l’esthétique sur son site web inZeBox, qui a été remis à neuf suite à un programme Fit 4 Digital Packages de Luxinnovation initié juste avant le confinement du printemps 2020. «Finalement, le Covid-19 nous a aidés en accélérant une mutation dans notre business du terrain vers le digital», explique Gérard Doucet, 58 ans, à la tête de cette TPE mondorfoise. Lui qui travaillait depuis 2013 avec un réseau de six distributeurs répartis en Europe et quelques centaines d’instituts de beauté a dynamisé ses ventes en ligne, qui équivalent aujourd’hui au travail de deux intermédiaires. Ses principaux marchés se situent au Luxembourg, en Belgique, en France, en Allemagne, en Espagne, en Italie, ainsi qu’au Maroc et en Algérie. Son cœur de métier? Gedeon développe les formulations de ses produits, qui sont ensuite fabriqués en Europe, ainsi qu’en Corée du Sud.

Comme de nombreux secteurs, les salons d’esthétique ont accéléré leur digitalisation et revu leur mode de commande sous l’effet de la pandémie. Après les deux fermetures forcées, chaque minute s’est avérée précieuse pour prendre en charge la clientèle lors de la réouverture. Difficile, dans ce contexte, pour les esthéticiennes de recevoir un délégué commercial. Si l’entrepreneur disposait déjà d’un portail de vente en ligne, celui-ci était sommaire. «C’était juste un catalogue, une sorte de carte de visite sur le web», évoque l’indépendant. Ses ventes en ligne avaient quadruplé en quatre ans, mais restaient marginales, à environ 20% du chiffre d’affaires global.

«J’étais très loin de ce que je pouvais potentiellement faire»

Fin 2019, Gérard Doucet assiste à une série de workshops organisés par la House of Entrepreneurship à destination des PME. Référencement, CRM, site web au design responsif, mais aussi réseaux sociaux: «Tout cela m’a permis de confronter les chiffres de mon site à la moyenne des sites B2B et de me dire que j’étais très loin de ce que je pouvais potentiellement réaliser.»

L’entrepreneur intègre alors le programme Fit 4 Digital Packages à destination des TPE et opte pour le package Marketing digital après avoir passé son Digital Checkup. Son offre en ligne est alors perfectionnée au printemps 2020, avec l’intégration d’outils promotionnels, et sa visibilité s’en voit décuplée. Réseaux sociaux, référencement sur les moteurs de recherche, mais aussi segmentation de la clientèle pour personnaliser l’offre: le site web se professionnalise.

Si l’aide de 5.500 euros prévue dans le cadre du programme est pour l’entreprise une incitation, elle est vite freinée par un incident inattendu: le piratage de son site web en août 2020. Au final, les coûts se chiffrent à 10.000 euros, dont la moitié reste à charge de Gérard Doucet. «L’aide allouée est au final dérisoire par rapport au coût de lancement d’une véritable politique digitale, déplore-t-il. Mais elle permet de faire le premier pas.» Il regrette aussi l’absence d’accompagnement de la Chambre de commerce dans la phase de sélection du consultant en digitalisation. Son conseil aux TPE qui envisagent de franchir le cap de la digitalisation? «Choisir un partenaire adapté à la taille de votre entreprise et être ouvert à des conseils différents de nos ressentis de novices! L’agence Vous nous a permis de fixer nos priorités en fonction de notre budget serré et a été garante de la réussite du projet. Il faut également mobiliser toutes les aides possibles, en complément de la Chambre de commerce. L’ODL nous a été d’un bon soutien.»

Pas que des avantages

Cette percée du canal digital revêt de nombreux atouts commerciaux: la rapidité de pénétrer une nouvelle zone de chalandise, la veille clients proactive et l’absence d’intermédiaire, ce qui permet au producteur de générer une marge nettement plus confortable. Mais le web n’est pas dépourvu de faiblesses: «Le distributeur présent sur le terrain me permet d’avoir des retours que l’on n’a pas forcément sur internet», observe Gérard Doucet. Et puis, la Toile est un lieu où la concurrence fait rage, d’où l’importance de proposer des offres commercialement alléchantes: «Internet nécessite une politique d’offres commerciales constantes.» Si l’entrepreneur peut se rendre moins dépendant de ses distributeurs, du renfort logistique ne serait pas du luxe pour répondre aux nouveaux volumes d’activité générés par les ventes en ligne. Pas question pour autant de quitter son canal de vente physique, qui représente actuellement 60% de ses ventes, bien que cette part se tasse progressivement face à la croissance du web, qui a doublé en cinq ans. Notre témoin a ainsi terminé l’année 2020 sur une croissance de ses ventes en ligne de 25% par rapport à 2019, et s’attend à un rebond de 50% fin 2021, malgré les fermetures imposées aux instituts de beauté dans une grande partie de sa zone de chalandise.

Un canal de fidélisation

«Mon panier moyen a doublé en cinq ans», se félicite Gérard Doucet. Car la professionnalisation de son e-shop a permis d’accroître son taux de transformation, de fidéliser la clientèle, de proposer des offres couplées aux salons d’esthétique qui se laissent tenter par de nouveaux produits du fabricant. Sans abandonner son développement de partenariats dans chaque pays, il ambitionne désormais d’approcher de grandes plateformes de vente en ligne dédiées aux professionnels. «Cela nécessite des investissements en matière de stock, de logistique et de personnel. Car les plateformes ont beaucoup d’exigences en matière de disponibilité, de faible taux de retour et de bonnes notations des clients.» Un nouveau défi se profile donc pour la TPE, qui réalise chaque année plus de 40.000 ventes, rien que dans le segment du rehaussement de cils.

Cet article a été rédigé pour l’ parue le 28 octobre 2021.

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