Swift attend encore de pouvoir étudier les détails de l’exclusion des banques russes de son réseau avec les autorités européennes. (Photo: Shutterstock)

Swift attend encore de pouvoir étudier les détails de l’exclusion des banques russes de son réseau avec les autorités européennes. (Photo: Shutterstock)

La liste des banques russes qui seront exclues de Swift se fait toujours attendre. La complexité du réseau Swift en tant qu’infrastructure de marché internationale systémique et son degré de supervision rendent l’exclusion de la Russie difficile. Malgré tout, aussi bien le régulateur que l’industrie confirment l’impact de la sanction.

Les efforts diplomatiques bilatéraux au cours du week-end dernier par le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba, avec ses principaux homologues occidentaux ont finalement porté leurs fruits. Dans un communiqué de presse, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a confirmé que «d’importantes banques russes seront exclues du système Swift».

La Commission européenne n’a cependant pas encore indiqué les noms des entités financières russes concernées par cette exclusion. Pour rappel, le réseau Swift compte près de 400 codes d’identification de participants russes.

L’impact confirmé pour la Russie

Josep Borrell, haut représentant de l’UE aux affaires étrangères, a pour sa part souligné que l’exclusion de la Russie ne peut «se faire en un coup de ciseaux». «Ce degré de déconnexion est soigneusement calibré pour infliger le maximum de dommages au système financier de la Russie tout en maintenant un niveau minimum d’interconnexion avec les autres systèmes financiers.»

Du côté de l’industrie bancaire, il nous est confirmé que l’éviction d’une partie du marché financier russe sera lourde de conséquences, le système Swift étant utilisé par les acteurs du marché international pour communiquer au sujet des transactions financières. Des sources familières avec le dossier indiquent que l’exclusion de certaines banques russes des plateformes de messagerie financière, conjuguée aux sanctions déjà appliquées par l’UE, le Royaume-Uni et les États-Unis, aura des répercussions négatives importantes sur l’environnement d’investissement et le secteur financier de la Russie.

Même son de cloche du côté de la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF), qui explique à Paperjam que l’exclusion de certaines banques russes du réseau aura un impact direct sur celles-ci. Elles devront ainsi mettre en place d’autres canaux de communication avec leurs contreparties. Les échanges ne seront donc pas rendus impossibles, mais plus compliqués.

Swift et l’industrie dans l’expectative

À son tour interrogé par Paperjam sur la façon dont elle implémentera le bannissement des entités russes concernées, le réseau Swift a répondu avoir pris connaissance de la décision et déclare: «Nous nous engageons avec les autorités européennes pour comprendre les détails des entités qui seront soumises aux nouvelles mesures et nous nous préparons à nous conformer sur instruction légale.»

Des sources dans l’industrie bancaire luxembourgeoises nous informent que l’éviction de la Russie ne devrait pas énormément affecter les banques de la Place qui ont un lien avec Swift. Les autorités européennes doivent d’abord statuer sur la liste des banques russes qui seront visées, et ensuite la publier.

Aussitôt la liste reçue, Swift pourra alors bloquer dans ses systèmes les codes des institutions financières russes faisant l’objet d’une exclusion. De la sorte, les banques occidentales n’auront rien à implémenter de leur côté.

Une supervision internationale complexe

Incorporée en Belgique, Swift est notamment régulée par la Banque nationale de Belgique (BNB). Contactée par Paperjam, la BNB indique: «La Banque nationale de Belgique est effectivement le superviseur principal de Swift puisque la société est basée en Belgique et opère avec une licence délivrée par notre banque centrale.» Toutefois, la BNB n’est pas le seul régulateur en charge. «En raison de l’ampleur de l’activité mondiale de Swift, nous sommes assistés (principalement) par les banques centrales du G10», nous informe-t-elle.

Interrogée sur la façon dont elle va veiller à la bonne implémentation de l’exclusion des participants russes au réseau Swift, la BNB déclare qu’elle ne peut pas donner de commentaire au sujet des entités sous sa supervision. Dans sa réponse, la BNB renvoie tout de même à son rapport annuel qui comprend un chapitre entier sur les activités de Swift. On y apprend que «les activités de correspondance bancaire et les infrastructures des marchés dépendent de manière systémique de Swift». Raison pour laquelle «les banques centrales du G10 ont classé Swift comme étant d’importance systémique vitale».

Comme déjà , évincer des entités financières russes du réseau Swift relève d’une certaine complexité. Selon le rapport annuel de la BNB, la supervision de Swift par les régulateurs financiers du G10 est complétée par le Swift Oversight Forum (SOF), un groupe de travail représentant les 15 pays dont le volume du trafic Swift est le plus important. La Banque centrale de Russie en fait partie.

Empêcher de refinancer la dette russe

Dans son dernier paquet de mesures de réponse à l’agression de l’Ukraine par l’armée russe, la Commission européenne a également annoncé interdire les transactions de la Banque centrale de Russie et geler tous ses actifs, «afin de l’empêcher de financer la guerre de Poutine».

Josep Borrell explique que «grâce à cette mesure, plus de la moitié ou environ la moitié des réserves financières de la Banque centrale russe seront gelées». En effet, «elles sont détenues dans les banques des pays du G7, et cela représente, plus ou moins, la moitié des réserves du gouvernement russe». C’est sans compter que cela va aussi affecter une grande partie du système financier de la Russie. À cela s’ajoute aussi le gel des actifs d’oligarques russes.