Pour «Anachronisms», la nouvelle exposition de Deimantas Narkevičius, la Konschthal Esch a été de nouveau entièrement transformée avec l’aide du bureau 2001. Une «black box» géante d’un nouveau genre, multiple et sensible, venant soutenir le propos des œuvres de l’artiste lituanien et parfaitement adaptée aux œuvres présentées: dix objets cinématographiques et trois installations qui retracent ainsi près de 25 ans de travail pour cet artiste dont la qualité de l’œuvre est reconnue internationalement.
Un travail qui, à la lumière des récents événements entre la Russie et l’Ukraine, prend une autre tournure, se lit sous une autre lumière. Alors que, jusqu’à une date récente, l’idéologie communiste et certains événements liés nous semblaient d’une époque révolue, obsolète et loin de notre existence quotidienne, voici qu’ils reviennent de plein fouet tenter de remodeler les paysages européen et mondial.
Cette exposition trouve également sa source dans le fait qu’une autre ville en Lituanie, Kaunas, est aussi Capitale européenne de la culture en 2022. Du coup, Christian Mosar, le directeur de la Konschthal et commissaire de cette exposition, a saisi l’occasion pour montrer au Luxembourg le travail de l’un des artistes lituaniens les plus intéressants du moment: Deimantas Narkevičius, pas tout à fait inconnu du public luxembourgeois, puisqu’on avait déjà pu découvrir une de ses œuvres à l’occasion de Manifesta2 en 1998.
Une rupture de la linéarité
L’œuvre de Deimantas Narkevičius est complexe. «On peut affirmer sans rougir que cet artiste est un intellectuel», confie Christian Mosar. «Il déjoue sans arrêt la linéarité temporelle et utilise des techniques cinématographiques peu orthodoxes pour remettre en question la narration conventionnelle des documents et souvenirs historiques qu’il utilise.»
Ainsi, ses films sont un enchevêtrement de références des périodes soviétiques et post-soviétiques en Lituanie, conjuguées à des éléments autobiographiques et des références à l’art du cinéma. De plus, l’artiste, qui se déclare d’ailleurs plutôt sculpteur, n’hésite pas à utiliser différentes techniques qui permettent de remettre le film dans l’espace.
Pour que les visiteurs ne perdent pas le fil et surtout profitent de toute la richesse de l’œuvre qui est présentée, il est vivement conseillé de prendre le guide du visiteur et de lire les textes explicatifs sur chaque œuvre. Ainsi, certaines références qui sembleront évidentes pour les personnes venant de l’Europe de l’Est seront éclairées pour les autres, tout comme les références à l’art du cinéma, et permettront de mieux saisir toute la subtilité et le jeu de va-et-vient de ces œuvres qui se déploient par effet de superposition et de parallélisme.
Enfin, saluons l’engagement du centre d’art qui a permis à l’artiste de produire une nouvelle œuvre, «Wailing Waters», un univers cinématographique stéréoscopique dans lequel la Lituanie du 19e siècle et le monde actuel cohabitent simultanément.
Jusqu’au 15 janvier à la .