Le directeur général d’OVH, Benjamin Revcolevschi, et celui de Post, Claude Strasser, ont consacré une union annoncée en novembre. (Photo: Post Luxembourg/Anthony Dehez)

Le directeur général d’OVH, Benjamin Revcolevschi, et celui de Post, Claude Strasser, ont consacré une union annoncée en novembre. (Photo: Post Luxembourg/Anthony Dehez)

Un trimestre après avoir annoncé officiellement leurs fiançailles, Deep by Post et OVH Cloud ont officialisé leur union, ce lundi à Kayl, dans les locaux d’Editus, pour offrir au marché une solution de cloud souverain à 100% «US technologies free».

«Je vois que la confiance règne: les 19 pages que vous venez de signer, vous ne les avez même pas relues.» Le ministre de l’Économie, (DP), n’est resté que cinq minutes à la cérémonie protocolaire qui consacre l’union de Deep by Post et d’OVH Cloud mais sa punchline fait mouche.

Comme des vœux que deux promis seraient prêts à s’échanger, le directeur général de Post, , et celui d’OVH, Benjamin Revcolevschi, viennent de rappeler tour à tour:

—  «qu’ils se sont bien trouvés», «qu’ils sont fait l’un pour l’autre», que «Deep est un acteur de confiance du numérique et OVH un des rares champions européens», qu’ils partagent «un ADN commun et forment les partenaires idéaux pour une solution de cloud souverain» pour le Luxembourgeois,

— que «la technologie est aussi une affaire d’hommes et de femmes et de confiance», qu’il a le sentiment qu’en un an de discussions est né «quelque chose de très fort qui ira très loin», que ce sont «deux boîtes de la tech qui adorent la tech», «motivées pour faire réussir ce partenariat», pour le Français.

La souveraineté, un triple enjeu

, laquelle s’appuie sur la technologie en open source d’OVH Cloud et ses services aussi. Ce qui permettra à des entreprises ou à l’État, d’avoir la garantie que leurs données ne quitteront pas le Luxembourg (ou l’Europe) et que les technologies pour les opérer seront toujours disponibles. 

Car l’élection du président américain a accéléré la prise de conscience de la nécessité de devoir rapidement garder le contrôle de ses données, et plus elles sont sensibles comme la santé ou les données financières, plus il faudra pouvoir les protéger. «Il faut éviter le shut down», avance le directeur de Deep by Post, Sébastien Genesca. «Un service qui pourrait être ouvert ou coupé», selon des considérations politiques.

«Il y a le shut down», lui répond autour de la table ronde le monsieur Cybersécurité du Luxembourg, François Thill, «ou la multiplication du prix du service par dix, ce sont des choses qu’on a déjà vues et dans un pays comme le nôtre, c’est important.»

Parce que la souveraineté comprend en réalité trois volets: la souveraineté des données, mais aussi opérationnelle et technologique, le directeur d’OVH Cloud évoque le nécessaire développement de capacités européennes de cloud souverain. «Car il y a des alternatives européennes. Des acteurs européens crédibles. Dans ce domaine où l’on dénombre 15 briques, parfois le leader n’est pas européen, mais il y a toujours quatre ou cinq acteurs européens crédibles», assure-t-il, invitant les dirigeants d’entreprises au Luxembourg et en Europe à exiger de leurs équipes qu’elles optent pour ces technologies, même quand cela n’est pas «naturel».  «Il y a cinq ans, nous réalisions un chiffre d’affaires annuel de 500 millions d’euros. Aujourd’hui, de près d’un milliard d’euros. Nous ne faisions pas de cloud souverain. Aujourd’hui, il représente 20% de notre résultat.»

Où se voient-ils dans cinq ans?

«Aujourd’hui, les hyperscalers ont 72 à 75% de parts de marché du cloud en Europe. J’espère que, malgré l’adoption rapide du cloud et le développement de l’intelligence artificielle, nous parviendrons à préserver les 20 à 25% de parts de marché qui vont à des solutions européennes», dit Benjamin Revcolevschi, à la tête d’une imposante délégation française, dont plus de la moitié de son comex, témoin de ce partenariat.

Clarence, l’union à trois qui fait parler

Préserver ses parts, ça ne paraît pas un projet de vie «fou fou», mais «cinq ans, au rythme actuel, c’est loin», rassure Sébastien Genesca. Sans compter que, comme dans toutes les bonnes histoires d’amour, théâtre de vaudeville ou pas, un autre trio a déjà consommé son union avec ses deux premiers clients: la CSSF et l’État: Clarence, née de LuxConnect, Proximus et Google.

Laquelle a dû avoir les oreilles qui ont sifflé tant les petites piques pour insider ou les phrases magiques ont fusé ce lundi après-midi. Comme le «nous aussi, nous aurions pu signer avec une technologie américaine qu’on aurait pu maquiller» de M. Genesca. Ou «le grand problème de Clarence, c’est que le client doit construire ses applications lui-même. Ici, avec OVH, vous avez probablement la possibilité de créer des solutions qui sont vendues par une autre société luxembourgeoise, qui est Deep. C’est beaucoup plus difficile dans Clarence. Parce que là, il y a une séparation par serveur physique en raison de la réglementation du secteur bancaire: deux banques ne peuvent pas partager le même serveur. Ça a une grande répercussion sur le prix. L’Europe s’est donné un programme qui s’appelle Digital Decade 2030, où chaque pays a comme cible d’amener 80% des PME dans le cloud. Dans ce cas-ci, avec des technologies européennes qui sont connues — je suis client — qui ne sont pas trop chères, c’est intéressant pour les PME», de François Thill. Ce n’est pas forcément faux, mais d’un haut serviteur de l’État, qui a justement passé un premier contrat avec Clarence, c’est au moins maladroit. Ce que le monsieur Cybersécurité compensera quelques instants plus tard par un grand sourire, pour dire qu’il a seulement voulu bien expliquer les différences.