2021 sera l’année de la vaccination. Mais dans le monde des médias, elle devrait également être celle du déploiement au Luxembourg du DAB+ (pour «digital audio broadcasting»), la radio numérique hertzienne souvent présentée comme la «HD de la radio». Pas au printemps, comme il avait été un temps envisagé, mais plutôt à la rentrée, en septembre. «On espère être prêt pour cette date. C’est l’objectif», glisse Jacques Thill, attaché au Service des médias et des communications (SMC) du ministère d’État. Et commanditaire d’une étude préparatoire, sorte de test grandeur nature, effectuée en décembre dernier, dont l’analyse des résultats mènera à l’élaboration (et à la publication, a priori durant ce mois de janvier) d’une feuille de route concernant le déploiement du DAB+.
Une couverture du territoire qui ne sera pas totale en 2021
Mais une chose paraît déjà certaine, tout le Luxembourg ne devrait pas bénéficier de cette nouvelle technologie. Du moins dans un premier temps. Tout simplement parce que le test réalisé voici quelques jours, au départ des émetteurs de Hosingen et Dudelange, a montré que la couverture du territoire n’était pas totale. «Elle sera bonne, mais on ne peut pas affirmer qu’elle sera complète dès 2021», confirme Jacques Thill. Apparemment, environ 90% du pays était couvert, certaines vallées encaissées comme la Moselle ou la Sûre posant problème. «Nos deux émetteurs ne sont pas suffisants. Du coup, si on envisage une couverture nationale, il faudra prévoir la création de plusieurs sites d’émission supplémentaires. Ce qui engendrerait une répercussion sur le modèle économique et les coûts. Actuellement, la question est encore ouverte. Il faut étudier cela en détail, avec les différents acteurs de notre paysage radiophonique.»
Qui va payer?
Néanmoins, on imagine mal, qu’à terme, tout le pays ne soit pas couvert. Vu la volonté politique, mais aussi le retard pris sur les voisins européens en la matière. Du coup, une question est née: qui paiera pour l’installation des futurs sites nécessaires? «L’État a prévu un budget de 100.000 euros pour accompagner le déploiement du DAB+. Cela permet d’effectuer certaines choses, mais ça reste, globalement, limité…», concède Jacques Thill.
Du côté des principales radios du pays, on s’interroge donc. «Comment les coûts vont-ils se répercuter sur les radios? L’État peut-il prendre davantage en charge?», réfléchit ainsi tout haut , directeur Audio chez RTL Radio et directeur d’Eldoradio.
Les médias radiophoniques font d’autant plus attention qu’ils ont bien en tête qu’une période de cohabitation entre le DAB+ et la FM s’annonce. Avec du coup, l’obligation de «simulcast», c’est-à-dire d’émettre sur ces deux vecteurs. Et de devoir passer à la caisse deux fois, plutôt qu’une aujourd’hui! Ce qui faisait d’ailleurs dire à David Gloesener qu’il faudra peut-être «trouver d’autres moyens de monétiser cet investissement. Par exemple, en essayant peut-être de voir si l’on ne peut pas se servir des possibilités visuelles supplémentaires du DAB+ pour sponsoriser la météo.»
La FM encore là pour 10 ans?
«Si j’en juge par ce qu’on a vu ailleurs, on est parti pour une période de transition entre la FM et le DAB+ d’une dizaine d’années», évalue Vincent Demarque, qui suit le dossier du DAB+ pour BCE (Broadcasting Center Europe), le prestataire technique de RTL au Luxembourg, qui a collaboré au test de décembre.
La feuille de route à paraître n’évoquera pas la fermeture de la bande FM. Cette dernière est donc loin d’être morte au Luxembourg. Et le pays loin de rejoindre la Norvège, première de tous à avoir définitivement éteint sa FM. C’était en 2017. La Suisse, elle, l’envisage pour 2024. Le Danemark et la Suède évoquaient, eux, 2022, avant de faire un peu marche arrière.
«En termes de déploiement de cette radio numérique, on est les derniers de la classe. Tout le monde a démarré avant nous…», avoue Vincent Demarque. Certains aiment imputer en partie ce retard à RTL, seule radio à couvrir véritablement tout le pays en FM et qui aurait été longtemps peu encline à voir ses concurrents bénéficier de la même couverture. Ce dont on se défend, bien évidemment, dans les couloirs de la première radio du pays.
Quoi qu’il en soit, aujourd’hui, tous les acteurs majeurs semblent contents et surtout prêts à prendre ce tournant du numérique. «Cela aidera à moderniser l’image globale de la radio», sourit David Gloesener, qui n’a pas peur de la concurrence, convaincu que ce que les auditeurs viennent chercher sur RTL, c’est avant tout la qualité et le côté local des programmes.
De nouveaux acteurs dans le monde radiophonique?
Tout le monde croit en l’avenir du DAB+ en termes de mobilité. C’est d’autant plus clair que depuis la fin du mois de décembre, il est devenu obligatoire dans l’Union européenne dans tous les véhicules neufs, qu’ils soient vendus ou loués. «Et au Luxembourg, avec les voitures de société, de leasing…, le renouvellement du parc automobile est plutôt rapide», glisse Sam Tabart, directeur des programmes de L’essentiel Radio. Ce dernier a été très satisfait, lors du test de décembre, de voir qu’avec le DAB+, sa chaîne pourra être captée en qualité optimale jusqu’aux portes de Nancy, côté français, et de Neufchâteau, en Belgique. De quoi le rendre heureux.
L’auditeur ne devrait, lui, pas être en reste. Avec la mise en place du DAB+, il devrait, en effet, y avoir plus de places de diffusion disponibles que de radios pouvant prétendre à être diffusées. Du coup, on pourrait assister à la création de nouveaux programmes, voire à l’arrivée de nouvelles radios depuis l’étranger. Certaines semblent d’ailleurs avoir déjà montré de l’intérêt…