L’ambition du ministre était d’amener le taux de remplissage des voitures qui arrivent à Luxembourg-ville à 1,5 personne d’ici 2025. Klaxit pourra-t-elle mieux faire qu’iDVROOM, qu’elle vient de racheter? (Photo: Shutterstock)

L’ambition du ministre était d’amener le taux de remplissage des voitures qui arrivent à Luxembourg-ville à 1,5 personne d’ici 2025. Klaxit pourra-t-elle mieux faire qu’iDVROOM, qu’elle vient de racheter? (Photo: Shutterstock)

Le rachat, annoncé jeudi, d’iDVROOM par Klaxit permet de s’apercevoir que le Luxembourg avait misé sur le mauvais cheval pour développer son offre de covoiturage. La filiale de la SNCF avait pourtant remporté l’appel d’offres européen en 2017.

(Cet article a été mis à jour à 11h30 avec les réponses du ministre)

25 mai 2018. Le ministère luxembourgeois des Transports annonce avoir retenu Ecolutis, filiale à 100% de SNCF Mobilités et opératrice d’iDVROOM, pour lancer son offre de covoiturage, baptisée «Copilote».

«Nous sommes fiers de développer la plate-forme de covoiturage Copilote pour le Grand-Duché de Luxembourg, c’est une reconnaissance de l’expertise du covoiturage et de notre savoir-faire sur la mobilité du quotidien. Nous avons déjà conçu et accompagné près de 200 entreprises et institutions publiques avec des solutions de covoiturage sur mesure», souligne Frédérique Ville, directrice générale iDVROOM, dans le communiqué de presse du ministre.

Les Français ont remporté un appel d’offres européen lancé un an plus tôt par le ministère luxembourgeois. Dans le dossier de presse (page 7), iDVROOM annonce 650.000 utilisateurs actifs à la fin avril 2018, et la courbe ne laisse planer aucun doute sur la forte croissance de la filiale de la SNCF.

Un an plus tard, et à l’occasion du rachat d’iDVROOM par Klaxit pour un montant non communiqué, badaboum...

Jeudi, , très différents: 900.000 utilisateurs inscrits... et seulement 30% d’utilisateurs actifs, soit moins de 300.000 utilisateurs actifs, à peine la moitié de ce qui avait été annoncé au Luxembourg. Ces chiffres, jalousement tenus secrets par le milieu, ont été récupérés pour le journal français par l’entreprise de marketing digital spécialisée dans le mobile Ogury.

Soit l’application française a fourni de mauvaises données dans le cadre de l’appel d’offres, soit l’intérêt pour l’application a diminué de 50% en un an, depuis son lancement au Luxembourg. Selon le journal français, iDVROOM est aussi la seule application de covoiturage dont le nombre de téléchargements a diminué.

«iDVROOM a investi massivement dans l’acquisition d’utilisateurs, sans trop se préoccuper de ce qui se passait après», constate le fondateur de Klaxit, Julien Honnart, dans le même article. De fait, après , la SNCF n’avait guère intérêt à développer une filiale concurrente sur le covoiturage, explique encore le journal.

Pour , «iDVROOM est encore une diversification ratée pour la SNCF». 

Klaxit revendique sa position de leader en Europe

Klaxit, elle, se frotte les mains. Dans son communiqué, ce jeudi, elle s’est directement revendiquée «le leader du covoiturage courte distance en Europe», forte de sa présence en Suisse, et donc au Luxembourg, où elle remplace iDVROOM. Selon ses propres statistiques, elle passe de 200 à 265 entreprises partenaires (dont BNP Paribas, Carrefour, Decathlon, Nestlé ou Orange) et de 10 à 30 collectivités associées au projet. De quoi atteindre le total de deux millions de trajets proposés chaque jour par ses utilisateurs.

Depuis sa dernière levée de fonds, trois millions d’euros auprès de RATP, Sodexo, Via ID, MAIF et Inco, et annoncée en février 2018, Klaxit a multiplié par 2,5 son chiffre d’affaires réalisé avec les entreprises et par 10 le nombre de trajets réalisés sur l’application, .

Julien Honnart a été élu à la présidence de l’Alliance des mobilités qui regroupe les principales start-up de la mobilité en France. Et après avoir remporté un contrat avec la Ville de Nantes, Klaxit va créer un centre d’excellence pour le «mobility as a service» (MaaS) pour mieux intégrer le covoiturage dans les solutions de mobilité.

Quid de Copilote?

Ce rachat change-t-il quelque chose pour Copilote, l’application de covoiturage lancée par le ministère luxembourgeois des Transports l’an dernier? Est-ce que les trajets se feront dans le cadre de l’application de Klaxit? Est-ce qu’une nouvelle stratégie va voir le jour, dans le sens où Klaxit préfère signer des partenariats avec des entreprises ou des collectivités pour rallier ces deux types d’organisation à l’intérêt du covoiturage?

«M. Honnart n’aura pas le temps de vous répondre», fait savoir la start-up par téléphone. 

«Le ministère se réunira avec Klaxit en septembre», explique la responsable de la communication du ministre, Dany Frank. «Nous ne pensons pas que cela change grand-chose, sinon pour du mieux, car Klaxit a un bon produit qui a connu un bon développement. Nous ne nous sommes pas fait avoir. Si Copilote a stagné, c’est que l’infrastructure routière ne se prête pas encore au covoiturage et que quand deux covoituriers se sont trouvés, ils ne passent plus par la plate-forme.»

Il faut se souvenir du contexte du lancement de ce service. a toujours dit vouloir développer toutes les solutions de mobilité possibles pour tenter d’améliorer la situation des bouchons sur les routes et aux frontières avec les 200.000 frontaliers.

«Chaque jour, 250.000 sièges vides entrent dans Luxembourg-ville», disait le dossier de presse. Le taux de remplissage des voitures était de 1,16 pour les résidents et 1,24 pour les frontaliers. L’ambition du ministre est d’amener ces deux chiffres à 1,5 personne par voiture, soit deux personnes dans chaque deuxième voiture d’ici 2025.

Selon les dernières statistiques, Copilote compte 4.900 membres. En juillet, l'application a généré 450 offres de trajets et sur un mois, 220 offres sont devenues réalités.