Pour Maître Yvette Hamilius, la liquidatrice de faillite, l’heure est venue de clôturer un dossier qui aura duré 14 ans et l’aura propulsée, bien malgré elle, sous le feu des projecteurs de l’actualité et devant les tribunaux français. (Photo: Maison Moderne)

Pour Maître Yvette Hamilius, la liquidatrice de faillite, l’heure est venue de clôturer un dossier qui aura duré 14 ans et l’aura propulsée, bien malgré elle, sous le feu des projecteurs de l’actualité et devant les tribunaux français. (Photo: Maison Moderne)

Info Paperjam – La justice française a tranché: dans l’affaire des prêts «equity release», aucune manœuvre relevant d’une escroquerie ne peut être reprochée à la banque, aujourd’hui liquidée. Les emprunteurs devront rembourser les sommes prêtées à partir de 2004 via des montages inventifs.

Y avait-il vraiment un suspense? Après avoir perdu devant le , puis en deuxième instance devant la , les emprunteurs français – le médiatique Enrico Macias en tête – qui s’estimaient victimes d’une escroquerie n’avaient plus qu’un seul espoir afin d’éviter un recouvrement des sommes empruntées à Landsbanki Luxembourg: que la Cour de cassation casse ces décisions et renvoie l’affaire devant les juridictions du fond.

Espoir déçu: la plus haute juridiction civile française n’a même pas examiné les arguments au fond, elle a déclaré ce 17 novembre les recours irrecevables. Suivant en cela les conclusions de l’avocat général et du rapporteur de la Cour de cassation.

Conséquence: depuis mercredi dernier, Landsbanki Luxembourg et les anciens employés sont définitivement relaxés du chef d’inculpation d’escroquerie.

Conséquence toujours: les épargnants déboutés étaient bien avertis du risque du produit qu’ils avaient souscrit et ils ont pris le risque. Bref, ils ont spéculé.

Conséquence enfin: les procédures de saisie en cours qui avaient été bloquées par la décision du juge français Renaud van Ruymbeke peuvent reprendre.

La faillite bientôt clôturée

Un soulagement pour la liquidatrice de faillite.

Celle-ci va pouvoir enfin clôturer la liquidation et transférer les avoirs restants de Landsbanki Luxembourg à sa maison mère, Landsbanki Islande. Principalement les prêts qui faisaient l’objet de cette joute judiciaire. Soit à peu près 320 millions d’euros, 180 millions devant venir de France et 140 millions d’Espagne. Charge à la banque islandaise de récupérer ces sommes auprès de ses créanciers. Chose d’autant plus facile que la banque dispose d’hypothèques sur les biens immobiliers de chaque emprunteur.

Soulagement et sentiment d’avoir bien travaillé: les créanciers privilégiés et chirographaires ont été remboursés à 100%. Étant entendu que les créances de Landsbanki Islande étaient subordonnées au paiement de celles des autres créanciers. «Cette liquidation n’a pas coûté un seul euro à l’État luxembourgeois, la Banque centrale du Luxembourg a récupéré l’intégralité des prêts qu’elle avait accordés à Landsbanki Luxembourg, aucun déposant au Luxembourg n’a perdu une quelconque partie de son dépôt et tous les salariés ont été indemnisés sans que l’Administration pour l’emploi ait à intervenir», détaille Yvette Hamilius, qui rappelle que cette liquidation a commencé avec un passif de plus de 2,5 milliards d’euros.

Un résultat qui aurait pu être atteint dès 2012 si les épargnants français n’avaient pas déposé des plaintes pour escroquerie devant les juridictions française et luxembourgeoise. Des plaintes qui visaient la banque et . Les plaintes visant Yvette Hamilius et la liquidation ont définitivement été classées par la justice luxembourgeoise par des ordonnances de la Chambre du Conseil de décembre 2020 et de janvier 2021.

Une stratégie de la terre brûlée

Porter l’affaire devant la justice pénale et devant le tribunal médiatique avait l’avantage de pouvoir geler toutes les exécutions et de poser la question de la dérive de la finance et de cibler le Luxembourg.

Yvette Hamilius se souvient d’un face à face avec le magistrat instructeur, Renaud van Ruymbeke, qui lui disait dans les yeux: «Je ferai tout pour que les emprunteurs puissent rester 10 ans dans leur maison.» «On avait l’impression que M. van Ruymbeke et le Parquet voulaient cette inculpation. On avait l’impression que pour eux, le Luxembourg, ce n’était rien ou pas grand-chose, juste une place bancaire qui s’enrichit au détriment de je ne sais qui. Et l’Islande n’était pas mieux considérée… Lorsque je parlais du fond, j’étais inaudible.»

Une stratégie finalement peu payante pour les emprunteurs.

Surtout si l’on se rappelle qu’en 2012, une offre de transaction leur avait été faite: rembourser la partie reçue en cash avec les intérêts. Une offre qui a séduit en Espagne avec 170 acceptations contre seulement 10 en France. Le tout sur un total de 400 dossiers.

Pourquoi aussi peu d’accords avec les Français? «Ils ont été mal conseillés», pense Yvette Hamilius. Qui indique que Landsbanki a gagné tous ses procès au pénal et n’a, jusqu’à présent, perdu aucun procès au civil… «Tous les emprunteurs français assignés en remboursement du solde de leurs prêts ont été condamnés et 95% de ces condamnations sont définitives.»

Autant de procédures ont un coût: 50,5 millions d’euros ont été déboursés par la liquidatrice.