Emna Rekik (Jones Lang LaSalle [JLL]). (Photo: Emna Rekik/Jones Lang LaSalle)

Emna Rekik (Jones Lang LaSalle [JLL]). (Photo: Emna Rekik/Jones Lang LaSalle)

Emna Rekik, Country Lead & Head of Markets chez Jones Lang LaSalle (JLL), partage ses insights sur les tendances qui façonnent l’avenir du secteur immobilier, à l’occasion du «Paperjam 10x6 – Key Takeaways from Mipim 2025», organisé par le Paperjam Club le mercredi 23 avril.

  Comment les investisseurs internationaux perçoivent-ils le marché luxembourgeois aujourd’hui? Sommes-nous toujours un hub attractif?  

– «Le marché luxembourgeois continue de briller sur la scène internationale, conservant son statut de hub attractif pour les investisseurs du monde entier. Malgré les défis économiques mondiaux, le Grand-Duché démontre une stabilité remarquable et une capacité d’adaptation qui ne cesse d’attirer l’attention des acteurs financiers. 

Alors que les investisseurs institutionnels ont été moins actifs les deux dernières années, les family offices  , ayant une stratégie d’investissement sur le long terme, ont pu tirer leur épingle du jeu et acquérir des immeubles emblématiques. Cette diversification des investisseurs témoigne de la capacité du pays à séduire un éventail plus large d’acteurs économiques, renforçant ainsi sa position de place financière polyvalente. 

Par ailleurs, le Luxembourg continue d’exercer un attrait sur les sociétés anglo-saxonnes et américaines. Ces entreprises, reconnues pour leur dynamisme et leur innovation, poursuivent leur implantation dans le pays, contribuant à enrichir le tissu économique local et à renforcer la réputation du Luxembourg en tant que centre d’affaires international de premier plan. 

Cette capacité à se réinventer tout en maintenant ses atouts historiques — stabilité politique, cadre réglementaire favorable, position géographique stratégique — est ce qui permet au Luxembourg de demeurer une destination privilégiée pour les investissements internationaux.     

Face à l’évolution des exigences ESG, comment les investisseurs et promoteurs doivent-ils adapter leurs stratégies pour rester compétitifs? 

«Face à l’évolution rapide des exigences ESG, le moment est crucial pour les investisseurs et promoteurs immobiliers. L’heure n’est plus à l’attentisme: c’est maintenant que tout se joue. Repousser les décisions importantes en matière d’ESG n’est plus une option viable. Les acteurs qui agiront rapidement et de manière décisive se positionneront comme les leaders de demain, tandis que ceux qui temporisent risquent de se retrouver rapidement dépassés. Pour rester compétitifs, les investisseurs et promoteurs doivent adapter leurs stratégies selon plusieurs axes clés : 

Tout d’abord, l’intégration complète des critères ESG dans les processus décisionnels et opérationnels est devenue incontournable. Il ne s’agit plus simplement de se conformer aux réglementations, mais d’adopter une approche proactive et holistique de la durabilité. Cette démarche doit s’accompagner d’une transparence accrue, avec la mise en place de systèmes de reporting ESG robustes permettant de communiquer clairement sur les performances, les objectifs et les progrès réalisés. 

L’innovation technologique joue un rôle central dans cette transformation. L’adoption de technologies vertes et intelligentes dans les projets immobiliers, tels que des systèmes de gestion énergétique avancés ou des solutions de smart building, est désormais une nécessité. Parallèlement, une attention particulière doit être portée à la rénovation et à l’amélioration de la performance énergétique du parc immobilier existant, qui représente un enjeu majeur dans la transition écologique du secteur. 

L’engagement des parties prenantes est également crucial. Les investisseurs et promoteurs doivent collaborer étroitement avec les locataires, les fournisseurs et les communautés locales pour aligner les objectifs ESG et maximiser l’impact positif de leurs actions. Cette approche collaborative s’étend également à la diversification des portefeuilles, en incluant des actifs à fort potentiel ESG, comme les bâtiments certifiés ou les projets à impact social positif. 

Enfin, l’anticipation réglementaire devient un avantage concurrentiel majeur. Les acteurs du marché doivent non seulement se tenir informés des évolutions réglementaires en matière d’ESG, mais aussi les anticiper. Cette proactivité permettra d’éviter les risques de non-conformité et de saisir de nouvelles opportunités avant la concurrence. 

En conclusion, l’adaptation aux exigences ESG n’est pas une option, c’est une nécessité urgente. Les investisseurs et promoteurs qui agiront rapidement et de manière décisive sur ces différents fronts se positionneront favorablement pour l’avenir, tandis que ceux qui tarderont à agir risquent de se retrouver marginalisés dans un marché en pleine mutation.   

En un mot, quelle est la leçon la plus marquante que vous retenez du Mipim 2025? 

«La leçon la plus marquante du Mipim 2025 est sans conteste la nécessité impérieuse de construire une vision à long terme de l’immobilier, en se projetant à l’horizon 2035, pour en déduire une stratégie immobilière robuste et pertinente. 

Cette approche prospective s’impose comme une évidence face aux transformations profondes que connaît notre secteur. L’accélération des changements technologiques, l’urgence climatique, l’évolution des modes de vie et de travail, ainsi que les mutations économiques, nous obligent à repenser fondamentalement notre vision de l’immobilier. 

Construire une vision pour 2035 n’est pas un simple exercice de style, mais une nécessité stratégique. Elle nous permet d’anticiper les tendances de fond, d’identifier les opportunités futures et de nous préparer aux défis à venir. Cette vision à long terme doit englober des aspects tels que la durabilité environnementale, l’adaptabilité des espaces, l’intégration des technologies émergentes, et la réponse aux nouveaux besoins sociétaux. 

À partir de cette vision, il devient possible d’élaborer une stratégie immobilière cohérente et résiliente. Cette stratégie doit être suffisamment flexible pour s’adapter aux évolutions imprévues, tout en restant ancrée dans une compréhension profonde des tendances à long terme. 

En un mot, la leçon du Mipim 2025 est "anticipation". Anticiper les changements, anticiper les besoins, anticiper les défis. C’est en adoptant cette posture proactive et visionnaire que les acteurs de l’immobilier pourront non seulement survivre, mais prospérer dans un environnement en constante mutation. 

Cette approche nous invite à dépasser les cycles courts traditionnels de l’immobilier pour embrasser une perspective plus large, plus durable et ultimement plus créatrice de valeur. C’est un appel à l’action pour tous les professionnels du secteur : il est temps de lever les yeux de nos préoccupations immédiates et de tracer la voie vers l’avenir de l’immobilier.»