Le Dr Antonio Marchini. (Photo: Luxembourg Institute of Health)

Le Dr Antonio Marchini. (Photo: Luxembourg Institute of Health)

Aujourd’hui, le Luxembourg Institute of Health (LIH) et le célèbre centre de recherche allemand «Deutsches Krebsforschungszentrum» (DKFZ) ont inauguré une nouvelle unité de recherche binationale intitulée LOVIT -«Laboratory of Oncolytic Virus Immuno-Therapeutics» - en présence des directeurs des deux instituts. Cette unité développera de nouvelles stratégies innovantes pour lutter contre le cancer dans le domaine encore récent de la virothérapie oncolytique, une thérapie qui utilise des virus pour détruire les cellules cancéreuses.

La nouvelle unité de recherche LOVIT a été créée suite à la signature d’un accord entre les deux institutions en décembre 2016. Financée conjointement, elle s’est également vu accorder une importante subvention de la part de la Fondation Cancer. Le Dr Antonio Marchini, un chercheur italien fort de 10 ans d’expertise dans le domaine de la virothérapie, dirigera l’unité. Son équipe, composée d’environ huit membres, travaillera dans des laboratoires du «Departement of Oncology» du LIH à Luxembourg-Ville et dans des locaux du DKFZ à Heidelberg.

Les virus, une thérapie anticancéreuse prometteuse

La virothérapie oncolytique est un traitement basé sur des virus qui infectent préférentiellement les cellules cancéreuses, s’y multiplient et les détruisent ensuite par lyse, c’est-à-dire qu’ils les font «éclater». Les virus oncolytiques sont des agents anticancéreux prometteurs car ils sont capables de tuer sélectivement les cellules cancéreuses et de provoquer en plus une réponse immunitaire solide qui stimule le corps à lutter plus efficacement contre le cancer.

Récemment, le premier virus oncolytique a été approuvé pour le traitement du cancer de la peau métastatique par la «Food and Drug Administration» aux États-Unis et l’Agence européenne des Médicaments en Europe. Suite à cette avancée majeure, la virothérapie oncolytique rencontre un intérêt croissant, avec plusieurs virus oncolytiques actuellement testés au cours d’essais cliniques pour le traitement de différentes tumeurs.

Le parvovirus H1-PV, qui infecte normalement le rat et ne cause pas de maladie chez l’homme, est un virus de ce type. C’est l’un des virus les plus petits dans la nature. On peut le considérer comme une «nanoparticule intelligente» avec une propension naturelle à cibler les cellules cancéreuses humaines. Le Dr Marchini explique son action: «Tel un parasite, ce virus se multiplie dans les cellules cancéreuses en utilisent les fonctions cellulaires à son profit. Une fois sa multiplication réussie, le virus - que l’on pourrait comparer à une bombe à retardement - déclenche la destruction de la cellule cancéreuse. Les particules virales sont alors relâchées, peuvent entrer dans d’autres cellules cancéreuses environnantes pour se multiplier, et progresser finalement à travers toute la tumeur. Remarquablement, les cellules saines restent intouchées dans ce processus.»

Une nouvelle génération de virus

Au DKFZ, le Dr Marchini et ses collaborateurs ont conçu par génie génétique une première génération de virus présentant une activité anticancéreuse accrue. Ils ont introduit l’ADN (information génétique) du parvovirus H1-PV dans un autre virus couramment utilisé dans les vaccins, qui est l’adénovirus, pour générer ce que l’on appelle une chimère. Il s’agit d’une stratégie de cheval de Troie dans laquelle l’adénovirus (cheval de Troie) est utilisé comme navette pour amener l’ADN du parvovirus dans les cellules cancéreuses. Les particules de parvovirus (les soldats dans cette comparaison) sont ensuite produites et libérées à l’extérieur, prêtes à infecter et tuer d’autres cellules cancéreuses.

L’équipe de LOVIT fera avancer le développement de ces virus chimériques. Ceux-ci permettent par ailleurs d’introduire des gènes thérapeutiques qui pourraient aider à stimuler davantage les défenses immunitaires du corps. Les expériences avec les chimères devront d’abord être confirmées dans des études précliniques sur des modèles animaux. Le Dr Marchini espère qu’un premier essai clinique sur des patients pourra être lancé dans environ cinq ans. «La virothérapie se prête à être utilisée en combinaison avec d’autres traitements pour générer des effets anticancéreux synergiques», explique le Dr Marchini. «Il serait palpitant de tester nos nouveaux virus en combinaison avec de la chimio-, radio- et immunothérapie.»

Des options thérapeutiques pour différents types de cancer

LOVIT, intégrée dans le «Department of Oncology» du LIH, collaborera étroitement avec les autres unités de recherche du département, en particulier avec le «NorLux Neuro-Oncology Laboratory» qui s’est spécialisé sur des tumeurs cérébrales. «Au début,» - raconte le Dr Marchini - «avec nos collaborateurs au LIH et au DKFZ, nous ciblerons les tumeurs cérébrales et le cancer du pancréas, qui sont parmi les cancers les plus mortels et pour lesquels des thérapies efficaces manquent toujours. À l’avenir, nous envisageons d’étendre nos recherches au cancer du poumon. Notre objectif est d’établir des collaborations additionnelles à l’intérieur comme à l’extérieur du Luxembourg afin d’accélérer la recherche sur le cancer et de faire bénéficier les patients de nouvelles découvertes. Nous allons travailler dur et donner le meilleur de nous-mêmes avec l’espoir de fournir de nouvelles options de traitement aux personnes atteintes de cancers.»

«La recherche sur le cancer au Luxembourg a atteint un niveau scientifique élevé au cours de ces dernières années, ce qui nous permet de collaborer avec des instituts reconnus tels que le DKFZ», souligne le Dr Catherine Larue, CEO ad interim du LIH. «Grâce à la création de LOVIT, nous pourrons étudier de nouvelles voies thérapeutiques très prometteuses pour les patients.»