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Une analyse des trois sous-entités composant l’administration publique révèle que l’ensemble des soldes s’est détérioré, bien qu’à des degrés divers. Ainsi, c’est principalement le déficit au niveau de l’administration centrale qui explique la dégradation des finances publiques.

En analysant les recettes et dépenses de l’administration centrale, on constate l’apparition et le maintien d’un effet ciseaux. Les recettes diminuent de respectivement 4% et 0,8% en 2009 et 2010, alors que la hausse des dépenses s’élève à 9,2% et 5,9%

Il paraît donc très clair que le principal élément responsable de la détérioration du solde de l’administration centrale est à rechercher dans l’explosion des dépenses.

D’après la Chambre des Métiers une telle situation n’est pas tenable à moyen terme et des mesures correctrices devront être préparées et engagées dès à présent pour assainir les finances publiques.

A politique inchangée les déficits publics se maintiendront, même en cas de reprise La Chambre des Métiers est convaincue qu’à politique inchangée, le déficit public se maintiendra, même en cas de reprise. Plusieurs facteurs pourraient agir en cette direction:

• Dans les années à venir, les fonds spéciaux, plutôt que de constituer une réserve financière nécessiteront, à volume de dépenses inchangé, des moyens budgétaires conséquents.

• En raison des changements structurels s’opérant sur la place financière, le risque est réel que la croissance après la crise sera inférieure à celle d’avant la crise.

• La dynamique haussière des dépenses publiques entrave la consolidation des finances publiques. Les dépenses directement liées à la crise n’expliquent que respectivement 43% ou 53% (en fonction de la méthodologie retenue) de la hausse des dépenses.

• Même dans le cas de figure d’une reprise économique, le chômage continuera à croître.

La « stratégie de sortie »: sur quels leviers faut-il agir? Recettes ou dépenses?

Il faut préparer au plus vite la «stratégie de sortie» pour passer d’une politique acceptant les déficits budgétaires vers une politique générant des excédents budgétaires et réduisant la dette publique.

Or, la Chambre des Métiers s’oppose à une augmentation des impôts pour relever le niveau des recettes fiscales, alors que l’explosion des dépenses constitue le principal facteur explicatif du déficit public, bien avant la baisse des recettes.

Une hausse de la charge fiscale à supporter par les entreprises détériorerait davantage la compétitivité de l’économie.

Une augmentation de la charge fiscale des ménages quant à elle réduirait leur pouvoir d’achat et risquerait de pénaliser l’artisanat et le commerce.

La «stratégie de sortie»: les propositions de la Chambre des Métiers

1. Freiner les dépenses de fonctionnement

Pour la Chambre des Métiers il s’agit de ne pas augmenter la valeur du point indiciaire, d’ajuster le niveau des rémunérations de début de carrière des nouveaux entrants dans la fonction publique, de suspendre l’application de l’échelle mobile des salaires en 2010 ou de réduire le montant attribué au titre de 13e mois, de ne procéder qu’à des recrutements revêtant un caractère indispensable et de réorganiser les services publics de manière à rationaliser les procédures par une utilisation plus intense des nouvelles technologies.

2. Plus grande sélectivité au niveau des transferts sociaux

Il faut veiller à ce que les transferts alloués aux plus démunis ne soient pas touchés par les mesures d’assainissement à envisager. Au contraire, il s’agit de ne plus verser ou de réduire les transferts attribués à la frange de la population la mieux lotie en termes de revenus, et pour laquelle la perte (partielle) de cet avantage n’entrave guère le niveau de vie. En clair, il s’agit de s’attaquer à ce qu’en allemand on désigne par «Mitnahmeeffekte».

D’après la Chambre des Métiers, il faudrait lier le paiement des allocations familiales au revenu des bénéficiaires, de sorte qu’à partir d’un certain seuil, la prestation ne serait plus allouée.

Le même mécanisme devrait être introduit pour la bonification d’intérêt en matière d’aides au logement. En ce qui concerne le forfait d’éducation, la sélectivité pourrait être renforcée en passant d’un mécanisme prévoyant l’imposition de ce transfert vers un mécanisme liant son obtention à une condition de revenu, avec à la clé des économies dues à la suppression du «Mitnahmeeffekt ».

3. Suspension de l’application de l’échelle mobile des salaires (EMS)

Une suspension de l’application de l’EMS en 2010 pourrait contribuer à une réduction des dépenses publiques budgétisées, alors que la plupart d’entre elles sont liées à ce mécanisme.

4. Réformer le régime de pension et de l’assurance maladie

Dans son avis, la Chambre des Métiers analyse les problèmes de financement inhérents aux deux systèmes et présente des pistes de réflexion pour en assurer la viabilité à plus long terme.

5. Eviter les solutions de facilité consistant à réduire les investissements publics

Une baisse des investissements risque, à terme, de détériorer sérieusement la compétitivité de l’économie luxembourgeoise. Par ailleurs, une réduction des investissements publics risque d’avoir des conséquences directes sur le plan économique et social.

Conscient de la situation précaire des finances publiques, la Chambre des Métiers voudrait attirer l’attention sur le fait que des économies non négligeables pourraient être réalisées en optimisant les processus de définition des besoins, de conception et de programmation ainsi que de la construction par une meilleure collaboration de tous les acteurs (maître d’ouvrage, maîtres d’oeuvre et opérateurs économiques).

6. Moderniser la procédure budgétaire et prévoir un plafond pour la dette publique

Il s’agit de passer d’une nomenclature excessivement fragmentée vers une structure qui s’articule autour des principales missions politiques, de réaliser une évaluation systématique des politiques publiques et de bénéficier d’une flexibilité accrue dans le choix des moyens à mettre en oeuvre pour atteindre les objectifs définis à l’avance. Un autre avantage de cette nouvelle procédure réside dans la plus grande responsabilisation des gestionnaires publics.

Concernant la dette publique, le Gouvernement devrait clairement déterminer un seuil maximum en-dessous duquel celle-ci devrait évoluer. Pour le cas où la dette risquait de dépasser le plafond défini, il devrait prévoir à l’avance un train de « mesures de crise » à mettre en oeuvre pour stabiliser, voire réduire le niveau de la dette.

Le rétablissement de la compétitivité: nécessité fondamentale de l’après-crise

Il ressort d’une multitude de «benchmarks» internationaux que la compétitivité du Luxembourg s’est détériorée en 2008. Afin de la renforcer, la Chambre des Métiers propose plusieurs pistes de réflexion.

1. L’ «indexation» constitue un mécanisme anti-économique et anti-social

D’après la Chambre des Métiers, il faudra trouver un modèle présentant moins d’inconvénients, tant du point de vue économique que social. Une solution pourrait consister à plafonner l’application du système d’indexation actuel ou à lier l’adaptation des salaires à l’évolution de la productivité.

2. Les zones d’activités économiques: pôles de développement des entreprises

La Chambre des Métiers espère que le plan sectoriel «zones d’activités économiques» trouvera un large assentiment parmi les décideurs politiques, tant au niveau national que local et qu’il permettra à moyen terme d’améliorer la situation des PME nationales, confrontées à une pénurie de terrains, disponibles à des prix abordables.

3. L’éducation et la formation: socle de la compétitivité

La Chambre des Métiers encourage le Gouvernement à poursuivre ses réflexions rassemblées dans le « Plan d'action pour le réajustement de l'enseignement des langues ».

Concernant l’orientation des jeunes, elle se prononce pour la création d’une « Instance nationale d’Orientation et de Conseil en Formation » dotée des moyens humains et financiers adéquats pour mener à bien sa mission.

4. Réduction des charges administratives: source de diminution des coûts

La Chambre des Métiers regrette que l’objectif de réduction des charges administratives du Luxembourg de 15% est moins ambitieux que celui de la Commission européenne qui se situe à 25%. Le Gouvernement devrait se donner les capacités en personnel et les moyens financiers pour mener à bien une politique de simplification administrative à large échelle.

5. L’innovation: le levier de la compétitivité de demain

Les instruments créés ou développés au Luxembourg en matière de recherche et d’innovation afin de faire face aux besoins spécifiques des PME ne sont malheureusement pas utilisés de manière optimale. Par ailleurs, les avis de tous les acteurs concernés devraient être continuellement pris en considération pour l’élaboration des priorités en matière de recherche et d’innovation.