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Rappelons que le 7 décembre 2001, la Banque Centrale du Luxembourg (BCL) et le STATEC ont diffusé, dans un communiqué de presse commun (statnews no 51/2001), les conclusions préliminaires d'une étude visant à analyser les effets possibles du basculement vers l'euro sur les prix à la consommation. Il s'agissait des résultats de simulations effectuées selon différents scénarios sur environ 7300 prix individuels relevés par le Statec pour le calcul de l'indice des prix à la consommation du mois d'octobre 2000. Ils ont montré que, dans l'hypothèse d'une  application pure et simple des règles de conversion, aucune augmentation ou diminution des prix, en moyenne, ne devrait avoir lieu. Dans le scénario pessimiste par contre - que d'aucuns ont qualifié de réaliste - qui prévoit que les prix attractifs en LUF sont systématiquement arrondis au prochain prix attractif supérieur en EUR, l'impact du basculement vers l'euro se monte à 0.5-0.6%, soit un résultat en ligne avec ceux obtenus dans d'autres pays pour des hypothèses analogues.

Le basculement vers l'euro fiduciaire étant réalisé, il a donc semblé indiqué de faire un premier constat de l'impact qu'il a pu avoir sur les prix à la consommation en janvier.

Comment isoler «l'effet euro» de l'inflation «normale»?

Le premier problème est celui d'isoler les ajustements de prix qui sont directement liés à la transition du franc vers l'euro de ceux qui sont intervenus  indépendamment de ce passage.

L'étude commune de la BCL et du STATEC, mentionnée ci-dessus, aborde le problème par le biais des prix attractifs, c'est-à-dire des prix ronds et de ceux fixés en fonction de critères psychologiques (prix se terminant par les chiffres 9, 95 et 98 et prix faciles à payer). Après identification de ces prix, on observe, pendant les périodes précédant et suivant le basculement vers l'euro, le résultat de la conversion opérée pour le passage éventuel à des nouveaux prix attractifs en euros, en chiffrant la variation (à la hausse ou à la baisse) que les prix connaissent à l'occasion de ce passage. Cette variation doit normalement correspondre à l'effet de conversion.

Quelle période faut-il observer ?

 

Une étude de ce genre doit porter sur une période prolongée, lorsqu'elle veut couvrir l'essentiel des mouvements liés à la conversion. Selon les recommandations de la Commission de l'UE et de la BCE, il faudrait considérer pour le moins la période de juillet 2001 à juillet 2002; la prise en considération de l'ensemble des années 2001 et 2002 serait encore plus appropriée.

En effet, le passage à l'euro ne s'effectue pas au même rythme dans les différents types de distribution et, surtout, ne se limite pas aux mois précédant ou suivant immédiatement la date du basculement. Pour certains circuits de distribution, ou certains secteurs, cette opération a été préparée longuement à l'avance; pour d'autres, où la saisonnalité a une importance primordiale, elle ne se fera qu'à partir de la mise en vente de nouveaux articles en 2002. Peu d'ajustements de prix en prévision de la venue de l'euro ont été pratiqués au cours du premier semestre 2001. Par contre il y a des exemples multiples de tels ajustements pour le second semestre, et particulièrement à partir de septembre 2001, quand des prix attractifs en francs ont été transformés en prix correspondant à des montants ronds ou psychologiques en euros.

De l'autre côté on a constaté qu'en janvier 2002 les prix attractifs en euros ont encore été minoritaires, et on peut supposer que la formation de prix fixés en fonction de critères psychologiques ne se généralisera qu'à partir du mois de mars avec l'abandon progressif du double affichage.

Quel a été l'effet du basculement vers l'euro sur l'indice du mois de janvier 2002 ?

Compte tenu de ce qui précède, il serait vain de vouloir estimer l'impact global de l'introduction de l'euro fiduciaire sur les prix à la consommation en se fondant sur les seules données du mois de janvier 2002. On peut toutefois essayer de chiffrer l'incidence partielle dans cet indice mensuel.

A cet égard, le mois de janvier donne lieu à des difficultés spécifiques, d'une part en raison des soldes d'hiver, qui font que beaucoup de prix ne sont pas comparables à ceux du mois précédent, d'autre part parce que c'est au 1er janvier qu'entrent en vigueur traditionnellement de nouveaux prix tarifaires, notamment en ce qui concerne les services publics.

Pour cette raison, le STATEC a limité l'analyse aux positions de l'indice des prix à la consommation qui ne sont pas touchées par les soldes et au sujet desquelles on n'a pas connaissance de raisons spécifiques justifiant les modifications de prix qui ont eu une incidence notable tant à la hausse qu'à la baisse. Pour ces agrégats élémentaires on a identifié les prix qui sont passés en janvier à un prix en euros attractif (selon une procédure simplifiée par rapport à celle de l'étude générale en cours). Les prix sélectionnés ont ensuite été remplacés par les prix du mois de décembre, la modification intervenue d'un mois à l'autre étant considérée comme due entièrement au basculement vers l'euro. Après recalcul, cet indice «hors effet euro» a été comparé à l'indice effectif du mois de janvier.

Les agrégats élémentaires sur lesquels a porté l'analyse couvrent environ un quart de la pondération de l'indice des prix à la consommation national (IPCN). Ils regroupent près de 1400 variétés sur un total de 7300 variétés entrant dans le calcul mensuel de l'indice, la proportion des prix en euros attractifs passant de quelque 28% en décembre 2001 à environ 42% en janvier 2002. En admettant l'hypothèse simplificatrice que les modifications de prix liées à ce passage sont entièrement dues au basculement vers l'euro, on peut conclure que l'incidence de la conversion sur l'indice des prix à la consommation du mois de janvier 2002 s'est située dans une fourchette allant de 0.10 à 0.15%. Ce résultat représente la borne supérieure de l'effet de la conversion des prix en euros sur l'inflation de janvier 2002.

L'estimation ci-dessus, partielle et provisoire, ne constitue évidemment qu'une première approximation, en attendant les résultats plus complets et plus fondés de l'étude commune menée par la BCL et le STATEC. Il indique néanmoins que l'introduction de l'euro sur les prix à la consommation n'a pas été entièrement neutre.