Des centaines de bornes de recharge pour voitures électriques ont pu être installées au Luxembourg grâce au Plan pour la reprise et la résilience mis en place par la Commission européenne. (Photo: Shutterstock)

Des centaines de bornes de recharge pour voitures électriques ont pu être installées au Luxembourg grâce au Plan pour la reprise et la résilience mis en place par la Commission européenne. (Photo: Shutterstock)

Alors que l’industrie automobile européenne plaide pour un report à 2027 des normes sur les émissions de CO2, la conférence sur le Plan pour la reprise et la résilience, organisée par la Commission européenne, le mardi 17 septembre à l’Abbaye de Neumünster, a mis en lumière l’importance de la transition vers la voiture électrique.

Sept mois après le début de l’année, les immatriculations de voitures neuves dans l’Union européenne ont augmenté de 3,9%, dépassant les 6,5 millions d’unités contre environ 6,2 millions sur la même période en 2023. À l’inverse, le marché des véhicules électriques enregistre un net ralentissement de ses immatriculations, selon les .

Entre juillet 2023 et juillet 2024, les immatriculations de voitures électriques ont chuté de 10,8%, soit 12.395 véhicules en moins. Une baisse qui s’est produite malgré les progressions en Belgique (+44,2%), aux Pays-Bas (+8,9%), en France (+1%) ou encore au Luxembourg (+38,5%). Le recul de l’Allemagne (-36,8%) – le principal producteur de voitures européen – n’a pas pu être compensé, faisant ainsi chuter la part des voitures électriques dans le marché total de 13,5% à 12,1% en un an.

Résultat? L’industrie automobile réclame un report du durcissement de la norme CAFE (Corporate Average Fuel Economy) de 2025 à 2027, concernant les émissions de dioxyde de carbone.

Pour rappel, à partir de 2025, le seuil moyen autorisé par véhicule devra être réduit de 15%. Les constructeurs qui dépasseraient cette limite s’exposeraient à des amendes qui pourraient «atteindre 13 milliards d’euros pour les voitures particulières et trois milliards pour les véhicules utilitaires», , risquant de freiner davantage un marché de l’électrique déjà en difficulté.

Une situation d’autant plus difficile à encaisser pour l’industrie européenne, qui a investi des milliards dans l’électrification des véhicules et peine déjà à rivaliser avec l’industrie chinoise,

Le Luxembourg sur la bonne voie

Si le Luxembourg n’est pas si en retard dans le secteur de l’électrique, c’est notamment grâce au Plan pour la reprise et la résilience (PRR) instauré par l’UE, dont «l’objectif était de relancer l’économie des pays membres mais aussi d’améliorer leur transition écologique et digitale pour renforcer leur compétitivité», a expliqué la directrice générale de la Task Force pour la relance et la résilience, Céline Gauer, à l’événement annuel du PRR au Luxembourg.

Le directeur du Trésor, Bob Kieffer, y a présenté les principales initiatives en matière de mobilité verte. Parmi celles-ci, figure le programme de soutien à l’installation de bornes de recharge pour voitures électriques, lancé en juillet 2022. Le projet a représenté un investissement total «d’environ 40 millions d’euros, dont 75% – soit 30 millions pour être précis – ont été financés par l’Union européenne». Une initiative qui a permis d’ajouter «1.500 nouveaux points de recharge à travers le pays».

Pour réduire sa dépendance au gaz et au pétrole russe, le Luxembourg a intégré le plan REPowerEU proposé par la Commission européenne, ce qui lui a permis de tripler les fonds disponibles dans le cadre du Plan pour la reprise et la résilience, qui passent ainsi de 83 millions d’euros à 241 millions d’euros.

Le gouvernement a utilisé cet investissement pour présenter «», selon le ministre de l’Économie,  (DP), des propos réitérés par son collègue Bob Kieffer lors de la conférence de l’après-midi. Parmi les initiatives notables, figure l’électrification d’une partie du réseau de bus, pour un montant total de 35 millions d’euros.

«La nécessité urgente de décarboner»

Des investissements qui ont maintenu le Luxembourg à flot et permis de se préparer pour l’avenir, selon le panel de spécialistes invités à discuter lors de l’événement. «La transition vers l’électrique est inéluctable, puisqu’», rappelle l’économiste à la Chambre de Commerce, Anthony Villeneuve. Il ajoute: «Sans compter les raisons économiques, étant donné les vastes dépenses que l’industrie automobile a engagées dans le domaine».

Il est également impossible de faire demi-tour pour le directeur à la Commission européenne Jakob Wegener Friis, mais cette fois pour des raisons environnementales: «La voiture électrique améliore la qualité de l’air par rapport à la voiture thermique.» Un propos confirmé par le chercheur au Luxembourg institute of socio-economic research (Liser), Philippe Gerber, qui, chiffres à l’appui, précise: «Les voitures thermiques représentent 60% des émissions de CO2, d’où la nécessité urgente de décarboner».

Les pouvoirs publics veulent accompagner les citoyens dans cette transition en les sensibilisant et en les incitant à investir dans l’électrique, ce que le Luxembourg a réussi à faire avec son . De l’autre côté de la Moselle, «la fin des aides en Allemagne a été catastrophique pour l’industrie allemande», analyse Anthony Villeneuve, mettant également l’accent sur l’importance de soutenir non seulement l’achat de voitures électriques, mais aussi la location et le marché de l’occasion. «Le leasing représente une grande partie du marché électrique luxembourgeois, mais une fois le leasing terminé, les véhicules se retrouvent sur le marché de l’occasion sans trouver preneur, et finissent souvent à l’étranger.»


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L’économiste conclut en soulignant l’importance d’investir, comme le préconise le , et de mettre en place des politiques industrielles et climatiques ambitieuses au sein de l’UE, mais surtout adéquates avec le secteur de l’automobile.

«L’UE manque toujours des conditions cruciales pour l’adoption par le marché de masse de voitures et de camionnettes à zéro émission: des infrastructures de recharge et de remplissage d’hydrogène, ainsi qu’un environnement de fabrication compétitif, une énergie verte abordable, des incitations à l’achat et des incitations fiscales, et un approvisionnement sûr en matières premières, en hydrogène et en batteries», ont prévenu les constructeurs le 12 septembre. Dans ce petit jeu revisité de « qui de la poule ou de l’œuf», chacun regarde l’autre pour avancer.