Frederic  V an Ingelgom  et  Sébastien   Danloy  de chez HSBC racontent la stratégie de crise de la banque.  (Photos: HSBC)

Frederic V an Ingelgom  et  Sébastien   Danloy  de chez HSBC racontent la stratégie de crise de la banque.  (Photos: HSBC)

La pandémie a frappé vite et par surprise. La plupart des entreprises ont su s’adapter. Notamment grâce à l’obligation d’avoir des procédures de poursuite d’activités prêtes en cas de besoin. Et si, pour la majorité, «le cas où» prévu n’était sûrement pas une crise sanitaire mondiale, les plans ont fonctionné. Exemple.

«D’une façon générale, l’industrie des fonds et les banques ont confirmé leur résilience. Ce qui montre qu’il y a eu une bonne gouvernance en place et que beaucoup de travail demandé par les régulateurs en matière de résilience et de continuité a été fait correctement», estime Sébastien Danloy, global head of asset owners & managers, HSBC Securities Services.

Au Luxembourg, opérationnels en une semaine

Cela a été le cas pour HSBC. «La priorité a été la sécurité et la santé de nos salariés», poursuit Sébastien Danloy. Ce qui n’a pas été évident pour un groupe de taille mondiale qui a dû «gérer la crise de manière globale, mais aussi sur le terrain, face à des employés et des organisations locales dont les manières de travailler sont différentes. En janvier, la Chine était totalement fermée, tandis que l’activité était normale en Europe. Six mois plus tard, c’est tout le contraire. L’utilisation de nouvelles technologies a permis de travailler comme si tout allait bien. Si cette crise s’était déroulée il y a une vingtaine d’années, cela aurait été difficile.»

Au Luxembourg, «nous avons eu la chance d’être opérationnels en une semaine avec tout notre staff à la maison», détaille Frederic Van Ingelgom, head of business development & client management – asset managers, HSBC Securities Services, Luxembourg. Mais il estime que la question de la préservation de la santé des personnels est toujours d’actualité. «Le sujet de la santé mentale des salariés devient aussi important que celui de la contamination par le Covid. D’autant qu’il faut se préparer à passer l’hiver à la maison.»

Faire évoluer les ressources humaines

La crise a mis en avant un autre défi lié aux ressources humaines. Et plus précisément à l’évolution de celles-ci.

«Ce dont on se rend compte, c’est que l’expérience et l’éducation requises des employés seront différentes de ce qu’elles étaient précédemment. Nous aurons moins besoin d’opérationnels, mais plus de profils commerciaux, réglementaires et nouvelles technologies. Trois éléments cruciaux si nous voulons continuer à opérer sur nos métiers», résume Sébastien Danloy. C’est-à-dire de collaborateurs, capables de faire des choses différentes tout au long de leur carrière et de challenger les processus: «comprendre pourquoi on le fait, plutôt que le comment on le fait».

Dans le contexte de guerre des talents, qui est la règle au Luxembourg, l’accès aux talents et à la diversité de ceux-ci ne sera pas chose simple. «C’est un gros challenge du Luxembourg que de continuer à développer les compétences des personnes», insiste Frederic Van Ingelgom, qui reconnaît que le pays fait énormément d’efforts par rapport à sa compétitivité et pour attirer de la main-d’œuvre compétente.

Le boom des investissements verts

L’autre priorité de la banque reste évidemment ses clients. «Il a fallu éviter que la crise actuelle ne les impacte», explique Sébastien Danloy. Qui a vu des évolutions majeures dans leurs attentes. «D’abord celle de rationaliser et consolider leur activité. La simplification des processus, le recours à l’automatisation et à l’externalisation de certaines activités seront une tendance importante à laquelle nous devons nous préparer. Des tendances qui préexistaient à la crise, et que celle-ci a accélérées.»

La crise a également boosté le développement des investissements ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance). «Nos clients se tournent vers ces produits et lancent leurs fonds. Nous avons l’objectif de devenir la banque durable du 21e siècle en les aidant dans le financement et la promotion de leurs produits. Il y a trois mois, notre branche Gestion d’actifs, ou Asset Management, a lancé un premier Green Bond Fund, ou fonds d’investissement proposant uniquement des obligations vertes, c’est-à-dire répondant au standard de l’UE sur le sujet. Obligation qui a collecté 350 millions d’euros en deux jours. Une deuxième obligation est en préparation, et un de nos clients, un grand gestionnaire d’actifs européen, prépare le lancement d’un fonds impact», détaille Frederic Van Ingelgom.

Un environnement juridique adéquat

Pour HSBC, les investissements ESG, et plus largement les investissements alternatifs comme l’immobilier, le private equity, les infrastructures ou encore la dette privée, sont l’avenir. Et la filiale luxembourgeoise a un rôle de choix à jouer. «Le Luxembourg a su créer l’environnement juridique adéquat. Nous profitons de l’augmentation de la demande, et de nombreux nouveaux produits sont lancés ici.»

La crise a également reposé la question de la consolidation du secteur. Une question récurrente ces dernières années. Sébastien Danloy ne voit pas dans un avenir proche des disparitions d’acteurs. «L’industrie est très résiliente.» Mais pour lui, dans une industrie des fonds très compétitive et où les clients sont très demandeurs en matière de contrôle de coûts, les investissements pour rester compétitifs sont significatifs. «Il faut générer suffisamment de revenus pour pouvoir réinvestir dans le métier pour le futur. Ce qui me fait dire que les acteurs de petite taille et sans valeur ajoutée vont se retrouver dans une situation plus compliquée.»