Les différentes sources de lumière permettent de créer des ambiances différentes dans cette maison conçue par Arttek.  (Photo : Steve Troes)

Les différentes sources de lumière permettent de créer des ambiances différentes dans cette maison conçue par Arttek.  (Photo : Steve Troes)

L’éclairage dans une habitation joue un rôle important. En plus de son caractère purement pratique et fonctionnel, le travail de la lumière met en valeur l’architecture, souligne des effets de matière, crée des ambiances, provoque des émotions. L’architecte éclairagiste Maria Luisa Guerrieri Gonzaga nous guide dans les choix à faire.

«Il y a deux manières d’envisager le travail de la lumière», explique l’architecte éclairagiste Maria Luisa Guerrieri Gonzaga d’architecturaLLighting conception lumière. «On peut s’appuyer sur les prises et les points d’éclairage existants et, à partir de cette base, trouver des objets qui permettent l’éclairage. C’est une façon de faire qui relève plutôt de la décoration. Et il y a la possibilité de travailler en amont de la construction, avec les architectes et les architectes d’intérieur, afin d’intégrer dans les plans de construction la position des différentes sources lumineuses, ce qui est très important pour la réussite d’un projet.»

Comprendre la lumière

La lumière n’est pas nécessairement une matière facile à aborder pour un novice. Il faut tout d’abord comprendre que la lumière n’existe que lorsqu’elle se reflète sur une surface. Aussi, il faut trouver une hiérarchie dans les espaces à éclairer. «Même si l’espace est petit, il faut déterminer quelles seront les surfaces principales et les secondaires. À partir de cette hiérarchie, on détermine l’intensité lumineuse nécessaire. C’est un petit projet en soi. Il faut scénariser l’espace en amont et s’y projeter assez précisément. Comme on réalise des couches de surfaces, je travaille différentes couches de lumière», détaille l’architecte éclairagiste.

Y penser dès le début

C’est pour ces raisons qu’il faut penser à la lumière dès la phase d’avant-projet sommaire (APS), car le fait d’anticiper les sources lumineuses permet d’intégrer les circuits électriques nécessaires, les passages de câbles, des placements éventuels de sources lumineuses dans du mobilier. «L’idéal est de pouvoir intervenir au moment de la conception des espaces intérieurs», explique Maria Luisa Guerrieri Gonzaga. «La première étape de la conception est de déterminer les emplacements des sources lumineuses pour savoir où les câbles doivent être tirés. Pour définir cela, il faut déjà avoir au préalable envisagé un minimum son aménagement intérieur et la manière dont on souhaite vivre dans sa maison ou son appartement. Mais comme le projet n’est pas encore définitif à ce stade, il est toujours préférable de prévoir un peu plus de possibilités, ce qui permettra de réadapter le projet par la suite si besoin.»

C’est aussi pour ces raisons que Maria Luisa Guerrieri Gonzaga travaille en étroite collaboration avec ses clients et les architectes. «Pour bien faire un projet, il faut connaître l’usage et le client final puisqu’il faut comprendre les habitudes de vie et d’occupation de l’espace. C’est aussi pour cette raison qu’un projet d’éclairage conçu pour une location ne pourra pas être aussi abouti, car il faut alors envisager une multiplicité de configurations d’aménagement intérieur.»

Par ailleurs, au Luxembourg, beaucoup de maisons sont construites en béton vu ou avec des faux plafonds réduits. Or, il est quand même courant d’intégrer des luminaires au plafond. Il faut donc anticiper ces sources au plafond et prévoir des boîtiers suffisamment profonds et grands pour encastrer des sources lumineuses.

«Cela est encore plus vrai pour les maisons passives, qui ont des hauteurs de dalles réduites au minimum. Il ne reste alors plus d’espace pour la technique. Avec 6 ou 7 cm d’épaisseur, il devient impossible d’encastrer des luminaires de qualité, ce qui implique que la source sera visible, avec un fort risque d’éblouissement. En revanche, si cette question est anticipée, il est tout à fait possible de créer des réserves dans les dalles et de prévoir des boitiers d’encastrement adaptés.»

Par la suite, dans le développement du projet, les détails se feront de plus en plus précis, «jusqu’à se poser la question du type de source, de sa couleur ou encore du rendu de la couleur souhaitée».

Les effets de la lumière

La lumière n’est visible que lorsqu’elle touche une surface. Ainsi, les surfaces prennent vie grâce à la lumière. La position de la source lumineuse est donc importante. «Si on fait un éclairage rasant, le rendu de l’aspérité de la matière ne sera pas du tout le même que pour un éclairage plus diffus. Il n’y a donc pas un type d’éclairage plus préconisé pour un matériau ou un autre, mais des éclairages plus adaptés à la recherche de certains effets. On peut tout à fait envisager d’éclairer de différentes façons un même matériau par exemple.» De plus, la lumière permet de moduler l’espace, et en fonction de son orientation, un espace peut paraître plus petit ou, au contraire, plus grand.

Il faut aussi adapter la lumière en fonction de ce que l’on souhaite éclairer. Une lumière ponctuelle permettra de mettre en valeur un objet, une sculpture ou un tableau par exemple, grâce une lumière localisée et resserrée sur le sujet. À l’inverse, une lumière diffuse offre un éclairage enveloppant, plus doux, qui se répartit harmonieusement dans toutes les directions autour de la source lumineuse.

C’est aussi grâce à la multiplicité d’implantations des sources lumineuses qu’un travail plus subtil peut être réalisé et participer à la qualité du projet.

«Si on a une source unique de lumière dans le centre d’un espace, cela tue le projet et n’améliorera en aucun cas la qualité de l’ambiance. Mieux vaut avoir plusieurs sources, positionnées à différents endroits, pour multiplier les effets, les ressentis et, par conséquent, permettre la création d’ambiances différentes», développe Maria Luisa Guerrieri Gonzaga. C’est aussi pour cela qu’il convient de mélanger dans un même espace lumière directe et indirecte.

Directe ou indirecte?

La lumière directe est celle qui arrive directement sur l’objet ou la surface qu’on souhaite éclairer, comme une table de salle à manger ou le sol d’un bâtiment. Elle ne rencontre pas d’obstacle. Mais il faut aussi avoir conscience que cette lumière provoque de nombreuses ombres.

La lumière indirecte, elle, est une lumière qui est réfléchie par une surface, verticale ou horizontale, comme un mur ou un plafond, avant d’atteindre ce qu’elle doit éclairer. Sa source lumineuse n’est pas visible. Mais attention : si une lumière est encastrée, mais dirigée vers une surface horizontale, cela reste une lumière directe, même si la source lumineuse n’est pas visible. La lumière indirecte doit être réfléchie par un autre élément. Comme cette lumière est douce et que les ombres portées sont plus floues, c’est un type d’éclairage qui apporte aussi un certain confort visuel. «La lumière indirecte ne se trouve pas uniquement cachée dans une gorge. Elle peut se trouver derrière une porte, encastrée dans une plinthe. Il y a aussi des endroits auxquels on ne pense pas spontanément pour positionner des lumières indirectes, mais qui peuvent être intéressants, comme des tablettes de fenêtres ou dans les chiens assis. Cette approche peut mettre en valeur un élément architectural, le souligner avec une lumière délicate, qui va ensuite se diffuser dans le reste de la pièce.»

Du bon usage de la LED

L’usage de LED (light-emitting diode) s’est très largement généralisé, surtout depuis la suppression du marché des ampoules à incandescence. «Toutefois, le potentiel des LED n’est pas exploité à son maximum. On pourrait les utiliser de manière beaucoup plus délicate, plus poétique, imaginer un papier peint parsemé petites LED ou une surface vitrée animée par des LED… L’industrie restreint beaucoup les possibilités de cette technologie qui pourrait pourtant proposer beaucoup plus que ce qu’on trouve actuellement.» Mais les LED offrent une grande efficacité lumineuse et des économies d’énergie et d’entretien qui sont très appréciables. C’est pour cela que leur usage s’est tant répandu.

Quel éclairage dans les pièces à vivre?

Si le choix de la technologie d’éclairage n’est donc plus vraiment une question, il convient toutefois de ne pas se tromper dans les intensités de lumière, car celles-ci diffèrent d’une activité à l’autre.

«Mes clients ont souvent peur que leur salon ne soit pas assez éclairé», avoue la spécialiste. «C’est typiquement une pièce où des spots au plafond ne sont absolument pas utiles, car placés trop loin des éléments à éclairer, et créent de nombreuses zones d’ombres. Il vaut mieux étudier quelles sont les surfaces qui doivent être touchées par la lumière et avoir plusieurs sources, comme je l’ai déjà expliqué. Toutefois, les lustres peuvent conserver un intérêt décoratif, ou un réel intérêt s’ils sont placés au-dessus d’une table à manger. Mais un lustre central dans un salon n’est pas la meilleure manière d’éclairer cette pièce. Bien qu’il n’y ait pas de solution type, je préconise quand même de réfléchir à intégrer de la lumière dans des éléments de mobilier, d’avoir une lampe de lecture avec une lumière directe dirigée qu’on pourra déplacer au gré de ses envies, et de positionner des lumières indirectes dans les coins, par exemple.»

Dans la cuisine, par contre, on privilégiera les lumières directes sur le plan de travail et la zone de cuisson tout en ayant une lumière d’ambiance, surtout pour les cuisines ouvertes. «Idéalement, il faut pouvoir séparer la zone de préparation et la zone de repas ou, à défaut, pouvoir faire varier l’intensité pour qu’elle corresponde aux différentes activités. Il faut aussi veiller à pouvoir éteindre les lumières des hottes, qui ne sont pas toujours de très bonne qualité», note l’architecte éclairagiste. «Il ne faut pas oublier non plus qu’on ouvre les meubles de sa cuisine, et qu’il peut être intéressant d’avoir de la lumière à l’intérieur de ses placards, spécialement pour ceux qui sont profonds.» Pour les cuisines ouvertes, il ne faudra pas omettre de garder une vision d’ensemble avec le salon et éviter que la lumière de la cuisine ne parasite celle du salon, et inversement.

La lumière dans les pièces secondaires

«Les chambres sont des espaces généralement faciles à éclairer», déclare Maria Luisa Guerrieri Gonzaga. «De manière simplifiée, il faut placer deux sources de lumière au niveau de la tête de lit – des lampes de lecture orientables de part et d’autre du lit – et une lumière d’ambiance indirecte. Si la chambre dispose en plus d’un balcon, il pourra être intéressant de mettre une lumière à l’extérieur qui éclaire de manière discrète cet espace et offre ainsi une ouverture visuelle au-delà des murs de la chambre.»

Souvent attenantes aux chambres, les penderies doivent être correctement éclairées. «Dans cet espace, le choix de la couleur de la lumière est très important pour ne pas dénaturer la couleur des vêtements.» Pour les salles de bains, l’approche est un peu différente. «On a besoin d’un éclairage soutenu au niveau du miroir pour pouvoir correctement se raser ou se maquiller. Pour cela, il convient de placer une lumière qui aille en direction du visage sans pour autant éblouir. Dans le reste de la pièce, il sera intéressant de disposer des lumières indirectes qui permettront de créer une ambiance calme et relaxante, si désiré. C’est pour cela qu’il est bien de demander aux électriciens de mettre en place au minimum deux circuits et de les équiper de câbles à cinq fils sur lesquels pourront être branchés des variateurs. Ainsi, les utilisateurs pourront faire varier l’intensité de la lumière en fonction de l’ambiance recherchée. Ce n’est pas un grand surcoût et cela apporte beaucoup de confort.»

Les zones de passage

Les escaliers sont, par contre, un espace plus difficile à éclairer et demandent une bonne adaptation à l’espace disponible. «Cela dépend beaucoup des dimensions et du volume de l’escalier. On peut envisager, par exemple, un lustre qui embrasse la hauteur de l’espace ou un éclairage direct au niveau des marches. Là encore, il n’y a pas de solution type», avoue l’architecte éclairagiste.

Pour les couloirs, qui sont, par définition, des zones de passage, un éclairage fort n’est pas nécessaire. Une bonne lumière d’ambiance peut suffire. Toutefois, c’est aussi souvent un espace où l’on aime accrocher des photos ou des tableaux. Dans ce cas, un éclairage par spots orientables au plafond peut être une bonne option. On peut aussi choisir d’installer des éclairages encastrés qui descendent sur le sol pour éclairer le chemin. Il ne faut pas oublier non plus que la lumière permet de fragmenter l’espace et qu’en fonction du type d’éclairage choisi, un couloir peut sembler plus long ou plus court.

Profusion de lumière pour cet espace pourtant en sous-sol : lumière dans les placards, directe sur le plan de travail, indirecte vers le plafond et le sol (architecture d’intérieur : NJOY) (Photo: LCGDP/UPPERCUT

Profusion de lumière pour cet espace pourtant en sous-sol : lumière dans les placards, directe sur le plan de travail, indirecte vers le plafond et le sol (architecture d’intérieur : NJOY) (Photo: LCGDP/UPPERCUT

Les couleurs de la lumière

Enfin, il conviendra de se poser la question de la couleur de la lumière. «En fonction de sa culture, on n’aborde pas la couleur de la lumière de la même façon. Les peuples du sud ont tendance à rechercher une lumière claire, alors que ceux du nord recherchent une lumière plus chaude. Au Luxembourg, on utilise fréquemment un éclairage à 3.000 kelvins, alors qu’en Belgique, le 2.700K est courant. En Italie du Sud, on sera plus proche des 4.000K tandis qu’à l’opposé, dans les pays nordiques, on privilégiera un éclairage à 2.400K. En fonction de sa culture, on peut aussi rechercher différents effets de lumière: les Russes ou les personnes en provenance des Émirats arabes unis apprécient beaucoup les lumières avec une certaine brillance, synonyme pour eux d’opulence, alors que les Japonais, par exemple, sont plutôt à la recherche d’une lumière délicate et accordent une grande importance à l’ombre. Il y a donc différentes approches culturelles dont il faut tenir compte lorsqu’on conçoit un éclairage pour un espace domestique.»

Il est aussi possible de faire varier les couleurs de lumières: une lumière chaude sera parfaitement adaptée à un éclairage dans une niche, tandis qu’une lumière plus froide conviendra mieux à un éclairage général. Pour faciliter ces choix, le marché propose aussi des solutions intéressantes: des luminaires «Dim-to-Warm», c’est-à-dire équipés de variateurs qui modifient à la fois l’intensité et la couleur de la lumière. Plus l’intensité baisse et plus la lumière devient chaude. Cela permet de créer aisément des atmosphères intimes et conviviales, tout en bénéficiant d’un éclairage plus fort quand cela est voulu.