Arnaud Despinoy (Photo: Jan Hanrion/Maison Moderne)

Arnaud Despinoy (Photo: Jan Hanrion/Maison Moderne)

Nous ne voyons pas l’intérieur des autres, nous ne voyons que leur apparence, leurs comportements, ce qu’ils font. Et nous en déduisons ce qu’ils sont. Nous avons des comportements et nous sommes qui nous sommes. Confondre les deux, c’est considérer que nous sommes nos comportements. Parler de l’autre revient alors à parler de son « être » et à juger.

REVETIR DES COMPORTEMENTS COMME DES COSTUMES

Pour sortir de cette difficulté, de cette confusion, il nous faudrait un outil descriptif des comportements, indépendant de la personne. Une grille de lecture de ce que la personne fait, déconnectée de ses intentions présumées. Factuelle et impersonnelle. Une façon d’aborder les comportements comme des costumes qu’unetelle ou untel pourrait porter, indépendamment de qui il ou elle est. Des savoir-faire comportementaux séparés de l’être et de ses ressorts intimes. Par exemple : une façon de dire « Bonjour » indépendante des personnes, de leur état et des circonstances.

UNE GRILLE DE LECTURE DES FACONS DE FAIRE

L’outil existe. Il propose de décrire 4 façons de faire la même chose. Quelle que soit la personne qui la fait. Une description factuelle, observable, mesurable dans certains cas. Les 4 façons de faire étant hiérarchisées, de la moins efficace à la plus efficace. Ce qui implique de définir des critères de performance. Si le critère de performance de la fabrication d’un gâteau est la vitesse, la façon de faire la plus efficace sera la plus rapide. Mais si le critère est la qualité gustative, la façon de faire la plus efficace sera sans doute différente. Idem pour toute opération matérielle, pour tout processus, pour tout comportement. Si le critère de performance du salut matinal entre collègues est la rapidité, on ne procèdera pas comme quand le critère de performance est la convivialité.

LA CLEF : PARTAGER LES REPRESENTATIONS

Avec cet outil, on peut donc analyser, décider des critères de performance d’une opération matérielle comme d’un comportement. Et décrire ensuite 4 façons de faire, des moins efficaces au plus efficaces pour satisfaire les critères. Au niveau comportemental, cela passe par expliciter ce qui est souvent implicite. Cette clarification génère du confort, de l’équité. Ainsi, la grille de lecture permet de se représenter concrètement comment on peut faire mieux ou plus mal. Au niveau collectif, ce partage de représentation fournit un cadre. On n’échange plus sur des intentions, sur des évaluations discutables. On peut échanger sur des comportements mutuels, comme on le ferait de recettes de cuisine ou de tours de mains. On peut évaluer, fixer des objectifs pragmatiques, concevoir des formations efficaces, constituer des référentiels de compétences, des chartes.

UNE DEMARCHE REELLEMENT PEDAGOGIQUE

On peut imaginer une grille de lecture générique pour tel ou tel comportement. Applicable partout. Mais la construction de la grille de lecture par les acteurs concernés, dans leur environnement, constitue une démarche pédagogique originale et puissante. L’outil de terrain est construit en formation par les stagiaires. Les critères de performance, les différents niveaux de pratiques sont formalisés, validés, et opposables à tout le monde. Il s’agit d’une démarche collective d’intelligence et de progression. C’est pourquoi l’outil porte le nom d’Échelles : un moyen pour progresser vers les niveaux supérieurs.

Un grand merci à Pierre MASSOT.

Pour plus d’informations :