Aux côtés d’Amélie Madinier, qui dirige le Hub@Luxembourg, Constanze Von Rheinbaben A. est venue distiller ses précieux conseils pour qui doit parler en public. Et convaincre. (Photo: Paperjam)

Aux côtés d’Amélie Madinier, qui dirige le Hub@Luxembourg, Constanze Von Rheinbaben A. est venue distiller ses précieux conseils pour qui doit parler en public. Et convaincre. (Photo: Paperjam)

Invitée par la directrice du Hub@Luxembourg du Crédit Agricole, Amélie Madinier, l’Américaine Constanze Von Rheinbaben A. est venue coacher une quinzaine de start-upper, jeudi, à la House of Startups. Trop brève rencontre.

«J’aime beaucoup son enthousiasme et son énergie, sa capacité à faire comprendre aux entrepreneurs que le storytelling compte autant que le langage du corps. Et comment ils peuvent progresser.» Amélie Madinier s’est assise dans une des salles du rez-de-chaussée de la House of Startups. Il neige à Luxembourg et la directrice du Hub@Luxembourg, structure d’accompagnement de start-up du Crédit Agricole, couve l’intervenante dont elle a souhaité proposer l’expertise à tout l’écosystème luxembourgeois.

Il ne faut pas plus d’une minute pour comprendre pourquoi. Constanze Von Rheinbaben A. tend sa carte de visite, met son index sur le «A.» afin que vous ne l’oubliiez pas dans son nom. «Il raconte mon histoire», explique celle qui s’est fait une spécialité de la prise de parole en public, que ses interlocuteurs soient des entrepreneurs ou des exécutifs de grandes sociétés. L’histoire de sa mère, mexicaine d’origine libanaise, et de son père, allemand, qui ont directement permis à cette experte, chanteuse et économiste, de se saisir du monde dans sa globalité.

La semaine dernière, un Américain s’est imposé dans la manche luxembourgeoise de la Coupe du monde des start-up avec un pitch «à l’américaine». Une minute pour installer son autorité et deux autres pour parler de son projet. Est-ce que l’Europe a un problème culturel avec l’idée de «vendre» ses projets?

Constanze Von Rheinbaben A. – «Je ne dirais pas les Européens, mais tous ceux qui ne sont pas anglo-saxons. En réalité, ils prennent très tôt l’habitude de se présenter et de parler en public. Non seulement leur société est déjà très extravertie, mais dès la garderie, ils font du ‘show and tell’, tous les lundis matin, pour commencer la semaine. Ils ne sont pas meilleurs intrinsèquement, ils se sont entraînés. Ensuite, quand des Européens croisent des Américains, ils se mettent instinctivement en retrait sur cette question-là et le jury qui y a goûté en redemande, plutôt que des présentations plus ‘sèches’. Le marketing n’est pas non plus le truc le mieux vu en Europe. Seulement, à quoi ça sert d’avoir le meilleur produit si personne ne le sait?

Le produit, est-ce que c’est le plus important du pitch? Avec le développement des fintech, des projets autour de la blockchain, des monnaies cryptées ou de l’intelligence artificielle, il devient difficile de faire comprendre ça…

«D’abord, il faut asseoir qui l’on est. Devenir très vite crédible. Pour toucher le cœur et la tête, parce qu’il faut toucher le cœur et la tête, il faut raconter une histoire personnelle. Soit votre parcours, quand une société va directement faire comprendre qui vous êtes, soit une anecdote, quand elle a un sens pour votre projet. Par exemple, une entrepreneure qui s’intéressait au compteur électrique a expliqué qu’elle avait commencé à s’y intéresser après son divorce, parce qu’avant, c’est son mari qui s’en occupait. Un autre a raconté qu’il s’était penché sur la qualité de l’eau à la naissance de son fils. L’entrepreneur, confronté à un problème, voit que d’autres ont le même problème et imagine une solution. C’est exactement ce qu’ont oublié les dirigeants de plus grandes entreprises qui ne jurent que par les résultats semestriels. Leur société s’est développée parce qu’ils avaient une solution, pas des bénéfices!

Il y a différentes «chapelles» du pitch, cet exercice de présentation d’un projet, d’une start-up, d’une vision. Qu’est-ce que vous placeriez au rang numéro un de ce que doit faire un entrepreneur?

«Un pitch, c’est comme un flirt, il doit donner envie d’avoir votre numéro de téléphone! Vous devez rendre les investisseurs curieux et affamés. Vous savez, ils voient tellement de start-up qu’à la fin, ils ne retiendront que celles qui ont touché leur imaginaire. Vous connaissez le ‘binge-watching’? Les épisodes sont construits sur la même trame et se terminent avec un cliffhanger qui vous donne envie de regarder le deuxième. Il faut leur donner envie de ça! Faut-il répéter son pitch mille fois ou apprendre une trame et rester sur l’émotionnel? Je dirais les deux. Apprenez assez bien votre texte pour pouvoir vous en détacher. Comme un musicien. Le musicien va répéter et répéter encore, si bien que le jour du concert, il est parfaitement à l’aise.»