Gustav Sondén est un des trois fondateurs de la wealthtech française Colbr. (Photo: DR)

Gustav Sondén est un des trois fondateurs de la wealthtech française Colbr. (Photo: DR)

Colbr ambitionne de transformer l’industrie de la gestion de patrimoine en donnant accès aux mêmes moyens à tous. Rencontre avec Gustav Sondén, co-fondateur de la wealthtech française.

Comment est née Colbr?

«Mes associés, Romain Joudelat et Mickael Juvenelle, et moi-même venons de la gestion d’actifs. En tant que professionnels de la finance, mais aussi en tant que jeunes épargnants, nous rencontrions une vraie frustration sur la qualité des produits à notre disposition, mais également sur l’expérience client qui nous était proposée. Cette frustration a été le point de départ de notre aventure entrepreneuriale. Notre idée est de proposer les bons produits d’investissement sur une plateforme, construite en no code, à l’époque. Nous avons immédiatement collecté pas mal d’argent. Cette bonne réponse du public nous a permis de réussir une première levée d’un million d’euros et de poursuivre le développement de notre agrégateur d’investissement, intuitif et 100% gratuit.

Que proposez-vous aux utilisateurs?

«Notre offre se divise en trois axes. La première, c’est une plateforme d’agrégation en mode software as a service, qui permet de suivre l’ensemble de votre situation patrimoniale en temps réel. Nous sommes connectés à plus de 6.000 établissements financiers en Europe, mais également à différentes bases de données. À cela s’ajoute un ensemble d’outils qui permettent de réaliser votre propre bilan patrimonial. Cette vue globale donne ensuite la possibilité de prendre les premières décisions d’investissement, et c’est le deuxième axe de notre projet. Notre première offre démarre à 1.000 euros et s’adresse à peu près à tout le monde. Nous avons développé quatre mandats, où le mode de gestion définit le profil de risque, avec des objectifs de performance compris entre 4 et 10%, annualisés.

Les ETF seront le socle de l’épargne financière des nouvelles générations.
Gustav Sondén

Gustav Sondénco-fondateurColbr

Nous avons notamment un mandat 100% en actions, dont l’objet est de refléter la croissance mondiale des marchés financiers. Nous savons que les ETF seront le socle de l’épargne financière des nouvelles générations. Ça l’est déjà en Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis, et c’est en train d’arriver en France. En matière d’investissement, nous proposons d’autres produits haut de gamme. Nous sommes notamment des pionniers dans le domaine du private equity, notamment grâce à des feeders qui ont émergé sur le marché, mais aussi avec des fonds de fonds et notamment des fonds communs de placement. On commence ainsi à pouvoir proposer une offre institutionnelle au retail, à savoir qu’au moins 90% du passif de ses fonds sont détenus par des investisseurs institutionnels. Enfin, la dernière partie de notre offre, c’est le conseil, et c’est vraiment quelque chose qu’attendaient les épargnants. C’est ce qui nous différencie et fait notre réussite.

Quelle est la place du conseiller?

«Elle est centrale. Au-delà des utilisateurs, nous nous adressons à une nouvelle génération de conseillers qui souhaitait s’appuyer sur un outil en ligne, avec tout ce que la technologie peut offrir aujourd’hui. Nos conseillers ont accès à une seule base de données pour tous les applicatifs métiers. Ça peut paraître banal, mais ce n’est pas la norme sur le marché. Obligations de compliance, outil de souscription, suivi des clients, tout est accessible au même endroit.

Vous considérez-vous comme une fintech ou comme une néobanque?

«Notre vision est de devenir la banque privée de demain. Mais, aujourd’hui, ce serait présomptueux de parler de néobanque, dans le sens où nous ne proposons pas de services bancaires classiques comme des ouvertures de compte ou des prestations de crédit. Dans l’univers des fintech, nous nous positionnons dans le compartiment wealthtech, avec une vision patrimoniale forte. Aujourd’hui, la plupart des grandes fintech sont actives sur le segment mass market, avec des solutions qui s’adressent à un énorme marché. Pour nous, qui voulons être actifs dans l’investissement et la gestion de fortune, tout reste à faire.

Qui sont vos clients, aujourd’hui?

«Ils sont ceux que nous avions imaginés au départ. Il s’agit d’une clientèle de flux (affluent en anglais, ndlr), des gens qui ont entre 200.000 euros et deux millions d’euros de patrimoine, mais qui ont surtout des revenus importants et la possibilité d’épargner. En français, on parle de gestion de patrimoine, mais le terme anglais de wealth planning est plus approprié. Notre client a en moyenne 38 ans et le ticket moyen est toujours légèrement au-dessus de six chiffres.

Nos conseillers ont accès à une seule base de données pour tous les applicatifs métiers.
Gustav Sondén

Gustav Sondénco-fondateurColbr

Votre volonté est de démocratiser la banque privée. Comment comptez-vous vous y prendre?

Autrefois, les contraintes réglementaires et opérationnelles étaient d’une telle importance que ce n’était juste pas possible. Aujourd’hui, grâce à la technologie et à la rationalisation des bases de données, on peut avoir accès facilement aux bonnes informations, créer des applicatifs avec des API fonctionnelles, etc. L’investissement est un pan de notre métier qui, quelque part, est démocratisable à l’extrême. En revanche, le conseil patrimonial ou successoral et la structuration fiscale sont d’autres domaines qui ne sont pas démocratisables de la même manière, mais on peut faire beaucoup mieux, selon nous, que ce qui est proposé par les acteurs traditionnels.

Quel est votre business model?

«La plateforme est gratuite. Elle nous permet de faire connaissance avec nos clients, et inversement. Nous nous rémunérons dans le cadre des prestations d’investissement. C’est du courtage, et c’est la formule qu’ont plébiscitée nos clients. Maintenant, notre spécificité, par rapport au marché, c’est la transparence. Les gens veulent plus de conseil, plus de digital, mais pas forcément au prix le moins cher possible. Ils veulent surtout comprendre ce qu’ils paient.

Votre activité est aujourd’hui concentrée sur la France. Quels sont vos objectifs de développement?

«Nous sommes effectivement concentrés sur le marché français, qui est déjà énorme. Aujourd’hui, les fintech actives dans le domaine de l’investissement représentent moins de 1% de part de marché. Il y a un véritable enjeu à capter plus de clients, et les wealthtech ont aujourd’hui le vent en poupe. Après, environ 20% de nos clients sont des expatriés. Il s’agit de profils assez jeunes, qui ont de l’argent, qui profitent parfois de régimes fiscaux qui leur permettent d’épargner beaucoup. C’est une première manière de nous internationaliser et de nous familiariser avec d’autres marchés. Récemment, par opportunité, nous avons aussi demandé une extension d’agrément pour servir des clients en Belgique.»

L’iA au service du conseil

«L’IA prend une place grandissante dans cet univers, ajoute Gustav Sondén. Nous sommes en train de bâtir les fondations. Et pour l’IA, les fondations, c’est la data. Sans data, vous ne pouvez rien faire. Il faut bien sûr une grande quantité d’informations, mais il faut surtout structurer ces données pour en retirer le meilleur. Notre équipe technique travaille aujourd’hui sur l’intégration de l’IA à l’expérience utilisateur. Cela va permettre d’introduire une couche de conseil dès les premières décisions d’investissement.

Un bon conseil demande de bien connaître le contexte. ChatGPT et d’autres solutions d’IA générative, étant donné la base de données qu’elles exploitent, sont capables d’expliquer très facilement le contexte: historique de performance, volatilité… Les premières prestations d’investissement peuvent être guidées par cette intelligence artificielle, ce qui amène un avantage pour l’utilisateur, en complément de l’intervention des conseillers qui peuvent intervenir sur les questions à plus forte valeur ajoutée. L’enjeu est de rendre le conseil le plus modulable possible, et l’IA va le permettre.»

Cet article a été rédigé pour le supplément  de l’édition de  parue le 24 avril. Le contenu du magazine est produit en exclusivité pour le magazine. Il est publié sur le site pour contribuer aux archives complètes de Paperjam. 

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