«Les politiques économiques ont été bien orientées», estime Michel-Edouard Ruben, économiste pour la Fondation Idea. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

«Les politiques économiques ont été bien orientées», estime Michel-Edouard Ruben, économiste pour la Fondation Idea. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Alors que la fin de l’année, synonyme de bilan, approche à grands pas, le Luxembourg semble avoir économiquement moins souffert de la pandémie de Covid-19 que ses voisins européens. Explications avec Michel-Edouard Ruben, économiste pour la Fondation Idea. 

Qu’est-ce qui explique que l’économie luxembourgeoise semble si bien résister à la crise sanitaire?

Michel-Edouard Ruben. – «C’est un ensemble de facteurs, la liste est très longue. Mais parmi eux, il y a la responsabilité de tout le monde, de la population, du gouvernement, notamment. On peut aussi dire que la structure sectorielle de l’économie a joué. Le cœur de l’économie est le secteur financier. Ce cœur a été moins touché que si l’économie avait été basée sur l’industrie, le tourisme. Et puis, il faut bien dire qu’il s’agit d’une crise de services. Il suffit de regarder les secteurs en difficulté, ce qui ferme. La structure sectorielle est plus forte, le cœur a été relativement épargné. Dans ce mix global, le fait que l’économie luxembourgeoise repose aussi sur des emplois très qualifiés avec une activité ‘télétravaillable’ dans une proportion plus élevée qu’ailleurs a beaucoup joué.

Ce qui a facilité la tâche du gouvernement?

«Le gouvernement a été réactif, a fait valoir son savoir-faire en anticipant, rassurant, en aidant avec le chômage partiel, le report de charges, les aides directes. On pourrait appeler cela du socialisme pandémique dynamique. Les politiques économiques ont été bien orientées. En termes d’emploi, l’aspect précarité joue un rôle important. Il y a des pays où la part de contrats en CDD est importante alors qu’elle tourne autour des 9% au Luxembourg. Près de 40% des gens occupent le même emploi depuis plus de 10 ans ici, il y a une stabilité. Et puis il ne faut pas oublier le facteur chance, difficile à quantifier. Si on refaisait l’histoire et que certains foyers importants qui se sont déclarés dans les pays voisins avaient explosé au Luxembourg, les choses seraient peut-être différentes.

Le gouvernement a-t-il été à la hauteur en matière de gestion de cette crise?

«C’est une crise inédite. La réponse serait, sans nuance, oui. Est-ce que certaines choses auraient pu être mieux faites? Oui. Mais ce qui compte, c’est l’orientation prospective, avec un gouvernement qui a donné l’impression d’être prêt à faire ce qu’il fallait, sans savoir ce qu’il faudrait faire. Ils ont soutenu et aidé autant que nécessaire, se sont basés sur des principes et non sur des règles. Donc, en termes de gestion de la crise, la réponse est oui.

À quoi peut-on s’attendre pour la suite?

«Quelques jours avant l’état d’urgence, j’avais expliqué que le nombre de possibilités était infini et qu’il était impossible de savoir ce qui allait se passer à l’avenir. De nombreuses incertitudes existent, de nombreuses inconnues également. Alors je pense qu’il faut surtout se méfier des gens qui savent, car c’est impossible à deviner. Néanmoins, j’espère que le gouvernement continuera d’orienter sa politique économique de cette manière et de piloter la situation avec cette dynamique.»