Aujourd’hui au Parlement européen, les députés ont décidé de recourir à une mesure de flexibilisation des règles pour le secteur automobile, avec l’ambition de soutenir le secteur automobile européen. Cette procédure d’urgence fait suite au plan d’action industriel de la Commission pour le secteur automobile européen annoncé le 5 mars. S’ils se sont mis d’accord sur cette procédure, sa mise en place sera soumise au vote le 8 mai.
Les députés ont ainsi donné le feu vert à la mise en place d’une procédure d’urgence qui permet aux constructeurs de mesurer leurs objectifs en matière d’émissions de CO2 non plus sur un an, mais en calculant une moyenne sur les années 2025, 2026 et 2027. «Cette approche leur permettra d’équilibrer les émissions annuelles excédentaires en dépassant l’objectif au cours de l’année ou des années suivantes», a précisé le Parlement. Les députés ont de nouveau rendez-vous ce jeudi 8 mai pour procéder au vote sur le fond du projet.
Cette procédure concerne les nouveaux véhicules personnels et les véhicules utilitaires légers. Une flexibilité réclamée par les constructeurs européens, à l’image de Stellantis ou Renault dont les dirigeants ont appelé à une meilleure flexibilité réglementaire afin de contribuer à relever le secteur automobile confronté à une concurrence accrue et à des changements technologiques conséquents.
«L’étalement sur trois ans proposé par la Commission de l’UE apporte une aide indispensable aux constructeurs, alors que notre industrie est confrontée à une crise de compétitivité sans précédent et que le marché des véhicules électriques ne se développe pas aussi rapidement que nécessaire. Notre secteur étant sous pression, la rapidité est désormais essentielle et la certitude en période de turbulences est primordiale. Nous demandons au Parlement européen d’adopter rapidement la proposition de la Commission européenne», a réagi l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA) qui se refuse à tout commentaire supplémentaire pour l’heure.
L’ambition de l’Europe avec cette décision contestée est de soutenir le secteur automobile, un pilier de l’économie européenne qui représente 7% du PIB européen. Mais selon plusieurs députés, l’UE ne va pas assez loin. «Nous voulons garantir son avenir mais beaucoup de constructeurs ne vont pas pouvoir atteindre leurs objectifs climatiques. Ils sont menacés d’amendes fortes, si Bruxelles en impose, ce serait un message néfaste qui contribuerait à renforcer la concurrence. Il est nécessaire d’avoir de la flexibilité mais nous voulons tout de même maintenir les objectifs climatiques», est intervenu le député allemand du Parti populaire européen, Jens Gieseke. Pour le député du Groupe des conservateurs et réformistes européens, Carlo Fidanza, la mesure va dans le bon sens mais ne répond pas à la problématique des amendes. «Il faut réviser l’ensemble de la politique. Car on pousse nous-mêmes l’Europe vers un déclin.»
Il nous faut mettre l’accent sur la mise sur le marché de voitures électriques plus abordables avant d’être éjectés de ce marché si nous n’agissons pas.
D’autres ont insisté sur la nécessité d’avancer – malgré la flexibilité – sur la généralisation des véhicules électriques, comme le député du S&D Groupe de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates au Parlement européen Mohammed Chahim (Pays-Bas) qui parle d’une proposition d’urgence qui devra rester ponctuelle. «Nous reconnaissons les craintes légitimes et les incertitudes des travailleurs du secteur automobile en Europe et ce sont eux qui vont subir les affres des erreurs commises par leurs patrons qui n’ont pas reconnu l’évolution de la situation. Cela signifie que cette mesure ne peut être que ponctuelle, et qu’il faut la considérer comme un dernier avertissement. Il nous faut mettre l’accent sur la mise sur le marché de voitures électriques plus abordables avant d’être éjectés de ce marché si nous n’agissons pas.
Les Verts ont clairement montré leur mécontentement par une analogie avec le monde du football. «Imaginez un marché des véhicules électriques dans un match de foot Europe contre le reste du monde. À la première mi-temps, on s’endort. On est mené un à zéro. On a conscience que lors de la seconde mi-temps, il va falloir rattraper le retard. Et nous, nous sommes ici dans le vestiaire. En 2025, les ventes de véhicules électriques ont atteint des records et nous, nous avons un coach qui nous dit ‘baissons les bras, laissons les autres marquer’. Or, c’est précisément de véhicules électriques dont on a besoin pour marquer. Bientôt, la Chine va contrôler l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. Et notre coach reste sur la ligne de touche à s’autoféliciter. Quelle honte!» a lancé l’Allemand Kai Tegethoff (Groupe des Verts/Alliance libre européenne).
«On passe par une procédure d’urgence pour court-circuiter le débat. Si nous cessons de diluer les certifications écologiques, pourquoi prendre la peine de les adopter?», s’est également offusqué l’eurodéputé Per Clauser (groupe de la gauche au Parlement européen). Pour rappel, les voitures et les camionnettes produisent environ 15% des émissions de CO2 de l’UE. Le Parlement a soutenu la proposition de la Commission visant à atteindre zéro émission de CO2 pour les voitures et les camionnettes d’ici 2035. Cette proposition s’accompagne d’objectifs intermédiaires de réduction des émissions pour 2030 à 55% pour les voitures et 50% pour les camionnettes.