Alexis Berger: «Nous restons sur un redémarrage prudent, il n’y a pas eu de grande effervescence.» (Photo: Matic Zorman / Maison Moderne)

Alexis Berger: «Nous restons sur un redémarrage prudent, il n’y a pas eu de grande effervescence.» (Photo: Matic Zorman / Maison Moderne)

Les fleurs ont fait leur retour chez Novea après deux mois de fermeture. Alexis Berger, gérant, pointe du doigt le manque d’aides de l’État durant une période difficile. Il garde espoir pour la suite et mise sur la Fête des mères.

Lorsqu’on entre chez le fleuriste Novea à Esch-sur-Alzette, le parfum printanier des roses et des lys nous effleure les narines, même à travers le masque. Entouré de ses orchidées, son gérant, Alexis Berger, se réjouit d’avoir pu rouvrir lundi 11 mai. Il revient sur deux mois difficiles.

«Nous avons été surpris par l’annonce de la fermeture des commerces le 15 mars. Elle a été faite le dimanche après-midi pour le lendemain. Nous travaillons avec des produits périssables, et nous avons été obligés de tout jeter. C’est dommage. Avec plus de temps, nous aurions pu les donner.» Détruire la marchandise a un coût «financier, mais aussi psychologique», souligne-t-il. En tout, il a jeté un millier de tiges pour son magasin à Esch-sur-Alzette, et un peu plus pour celui de Dudelange.

Approvisionnement difficile

Quand la réouverture a été officialisée, il a donc fallu refleurir les deux boutiques. Une fois encore, «nous n’avons pas eu beaucoup de temps pour nous préparer». L’annonce a été faite une semaine à l’avance. Alexis Berger a passé une demi-commande par rapport aux volumes habituels. «Nous ne savions pas à quoi nous attendre en termes de demande de la part des clients, et les prix sur le marché étaient exorbitants, justifie-t-il. Le Luxembourg, la France et la Belgique ont repris l’activité en même temps. Les fournisseurs, principalement hollandais, ont dû fournir les trois pays en fleurs.» Le prix des roses a par exemple été multiplié par trois. «Nous ne pouvons pas le tripler pour le client», relève-t-il. Au lieu de 2,50 euros la tige, il la vend donc 3,50 euros en ce moment.

Il n’a pas pu compter sur ses fournisseurs plus lointains. «Beaucoup de fret voyage avec le transport de personnes, qui a été arrêté. Par exemple, nous n’avons pas reçu d’œillets, qui viennent d’Italie ou du Portugal», illustre-t-il tristement.

Malgré tout, il est fier d’avoir pu rouvrir le 11 mai. «Les clients étaient contents de nous revoir», raconte-t-il. Les grandes roses se sont particulièrement bien vendues, malgré leur prix élevé. «Nous restons sur un redémarrage prudent, il n’y a pas eu de grande effervescence», relativise Alexis Berger.

Horaires aménagés

Le fleuriste a dû adapter sa façon de travailler. Ses trois employés sur chaque site portent un masque, tout comme les clients. Des vitres en plexiglas et du gel hydroalcoolique ont été installés aux caisses. Au lieu de 8 h à 19 h, les magasins ouvrent de 9 h à 18 h.

La mise à l’arrêt a entraîné un manque à gagner de 100.000 euros en termes de chiffre d’affaires. «Nous avons perdu Pâques, le Premier Mai. Il n’y aura pas de mariages ni de communions cet été. Il ne nous reste plus que la Fête des mères en juin, et la Toussaint en novembre», détaille le gérant. Un coup dur, «quand nous voyons que les jardineries ont eu le droit de rouvrir plus tôt».

Aucune aide directe

Sans oublier les coûts fixes, qui s’élèvent à 10.000 euros par mois pour les deux magasins. L’entrepreneur se plaint de n’avoir reçu aucune aide directe. «En tant qu’employeur, je suis considéré comme indépendant, donc je n’ai pas droit au chômage partiel», ajoute-t-il, agacé. Pour affronter cette période compliquée, «j’ai demandé à ma banque une suspension des remboursements d’emprunt, qui a été accordée, explique le fleuriste. Si nous étions restés fermés pour la Fête des mères, qui aura lieu le 14 juin, nous n’aurions pas pu continuer.»

L’entreprise n’a pas souhaité poursuivre la livraison pendant le confinement. «Quand on vous dit que c’est très dangereux et que tout le monde va mourir, comment voulez-vous demander à un employé de venir travailler pour livrer des fleurs?»

L’objectif aujourd’hui: «Ne pas perdre d’argent et espérer des jours meilleurs.» Il vise 90% de son chiffre d’affaires de 2019, non communiqué, d’ici la fin de l’année. La plus belle rose de son chapeau: «Nous avons la chance d’avoir une clientèle très locale et de ne pas dépendre des travailleurs frontaliers.»

Même si cette pause lui a permis de se retrouver et «d’avoir beaucoup de temps libre», sa plus grande crainte reste un retour du confinement. Auquel il ne serait pas sûr de survivre.