Arnaud Lambert, director Digital Innovation Hub, Luxinnovation. (Photo: Maison Moderne)

Arnaud Lambert, director Digital Innovation Hub, Luxinnovation. (Photo: Maison Moderne)

Pour perdurer, les entreprises doivent mieux appréhender les opportunités liées à l’usage de la technologie. Pour gagner en compétitivité au départ du numérique, explique Arnaud Lambert, director Digital Innovation au sein de Luxinnovation, il faut partir des attentes du client pour ensuite voir comment transformer toute la chaîne de valeur.

Affirmer que la digitalisation est un levier incontournable de l’amélioration de la performance des organisations a quelque chose de convenu. Mais qu’en est-il sur le terrain? Comment les acteurs appréhendent-ils le numérique? Il est plus difficile d’apporter une réponse à cette question. Il y a un an et demi, a pris ses fonctions de director Digital Innovation Hub au sein de Luxinnovation. Un des premiers chantiers qu’il a entrepris est d’aller à la rencontre des acteurs industriels, pour justement mieux comprendre la manière dont ils envisageaient leur avenir au regard des possibilités offertes par la technologie.

«Aujourd’hui, le problème des acteurs ne réside plus dans l’accès à la technologie ou la disponibilité des solutions numériques. Des solutions, il y en a à la pelle et elles se sont largement démocratisées, pour être à la portée de la plupart des PME», explique Arnaud Lambert. «Un des enjeux réside dans la nécessité de délivrer une meilleure information quant aux possibilités qu’offre la technologie. Il faut permettre à chaque dirigeant de mieux percevoir l’opportunité que l’utilisation de la technologie peut apporter à son organisation.»

Partir des attentes du client

Pour le responsable du Luxembourg Digital & Innovation Hub (L-DIH), les réflexions des entreprises liées à la transformation numérique se limitent trop souvent à la production, à leur cœur de métier. Le numérique est, à ce niveau, considéré comme un levier de performance opérationnel, un moyen d’optimiser les coûts de production. «Or, la vraie valeur du numérique se révèle lorsque l’on considère l’ensemble de la chaîne de valeur, en prenant comme point de départ le client et ses attentes et en remontant jusqu’à la gestion de ses fournisseurs», explique Arnaud Lambert.

Résultat tangible: fidélisation du client, attraction de nouvelles cibles et cross-selling du portefeuille.
Arnaud Lambert

Arnaud Lambertdirector Digital Innovation HubLuxinnovation

«Dans une société de plus en plus numérique, en effet, les consommateurs comme les partenaires attendent de pouvoir interagir avec leurs fournisseurs via des canaux numériques, que l’échange et le traitement de l’information soient beaucoup plus fluides, plus automatisés, plus transparents, plus proactifs, plus personnalisés et qu’ils puissent s’exécuter à tout moment. En cherchant à mieux répondre aux attentes du client, on peut alors imaginer comment transformer le business, faire évoluer l’ensemble des fonctions, en s’appuyant sur la technologie pour atteindre les objectifs fixés», précise Arnaud Lambert. «De cette manière, le numérique contribue à améliorer l’ensemble de la chaîne de valeur avec toujours une contribution centrée sur le client. Résultat tangible: fidélisation du client, attraction de nouvelles cibles et cross-selling du portefeuille.»

Remonter la chaîne de valeur

Autrement dit, il s’agit avant tout de proposer une nouvelle expérience client. Une entreprise qui permet de passer commande en ligne plutôt que par téléphone génère un avantage pour le client. Celui-ci, en effet, peut effectuer ses opérations à tout moment, mais surtout peut personnaliser son expérience à l’aide d’outils numériques. Au-delà, une succession de processus automatisés peuvent être mis en place, comme l’établissement du devis, la mise en planning, la facturation et, si l’on va plus loin, l’anticipation de l’approvisionnement en ressources pour garantir la continuité de la production. «En partant du client, on peut optimiser toute la chaîne de valeur et tirer un réel avantage des possibilités offertes par le numérique», confirme Arnaud Lambert. «Le client, lui, est rassuré, mis en confiance par un service transparent et personnalisé. C’est d’autant plus important aujourd’hui que chacun vit de telles expériences au niveau privé, en interagissant en ligne avec de nombreux services e-commerce ou encore avec l’État.»

Enjeu stratégique

 C’est surtout un enjeu business clé. Agir pour améliorer la relation client, que l’on évolue dans une sphère B2C ou B2B, est un levier de compétitivité fort sur le marché. Au-delà, cela induit une meilleure rentabilité. «Il est essentiel d’envisager sa transformation numérique en partant des attentes du client. Cependant, il faut que les projets envisagés puissent s’inscrire dans une stratégie bien définie. Il faut pouvoir déterminer où l’on veut aller à terme, à un horizon de cinq ans par exemple, afin de pouvoir fixer les priorités, établir une roadmap», ajoute le responsable du L-DIH, pour qui ces enjeux doivent intégrer la stratégie business. «Il faut considérer le marché, le produit, les ressources disponibles… et ajouter une dimension digitale au cœur de la stratégie de l’entreprise», explique-t-il encore.

Le client, lui, est rassuré, mis en confiance par un service transparent et personnalisé.
Arnaud Lambert

Arnaud Lambertdirector Digital Innovation HubLuxinnovation

Le défi des compétences

Pour une PME, toutefois, ces enjeux ne sont pas évidents à appréhender. Accompagner la transformation numérique de l’entreprise exige de disposer des ressources adaptées. Sur les 450 entreprises qui constituent le tissu industriel luxembourgeois, près de trois quarts comptent moins de cinquante employés. «Sur une structure qui emploie 30 personnes, on considère qu’une vingtaine assure la production, cinq constituent la force commerciale et cinq sont affectés au support. Dans cet ensemble, si une personne est dédiée à la gestion de l’IT, c’est heureux», commente Arnaud Lambert. «Si la transformation digitale constitue un élément-clé du développement du business, le premier défi sera de pouvoir s’appuyer sur une personne capable de l’accompagner en interne. Or, dans un marché en pénurie de talents, cela exige d’importants efforts de la part des acteurs de l’économie.»

 Afin de séduire ces talents, les entreprises doivent parvenir à attirer des profils numériques. Malgré des efforts importants pour améliorer la marque employeur, la tâche s’annonce ardue. Dans beaucoup de cas, cependant, les entreprises s’appuient en interne sur des salariés qui, ayant un intérêt pour la technologie, pourraient accompagner cette transformation. «Face aux enjeux, il y a une réelle opportunité à identifier d’abord en interne quelles personnes sont à même de s’investir, en s’appuyant ensuite sur des partenaires externes, pour mener à bien la transformation numérique du business», conclut Arnaud Lambert.