Dans les salles blanches du campus de microconducteurs, plus de 500 experts s’assurent en permanence de la propreté des installations. Une des attitudes qui permettent pour l’instant à Samsung de rester en tête de la propriété de brevets. (Photo: Samsung)

Dans les salles blanches du campus de microconducteurs, plus de 500 experts s’assurent en permanence de la propreté des installations. Une des attitudes qui permettent pour l’instant à Samsung de rester en tête de la propriété de brevets. (Photo: Samsung)

Si Samsung reste à la tête du plus gros portefeuille de propriété intellectuelle au monde avec 90.416 familles de brevets, il est talonné par des acteurs chinois, emmenés par l’Académie chinoise des sciences et qui occupent six des dix premières places. Mais ce n’est pas le plus surprenant.

La crise? Quelle crise? Observée sous l’angle de la propriété intellectuelle, Samsung a enrichi sa collection de brevets de près de 20% depuis 2019,  publiées cette semaine, et reste (encore) de très loin le leader mondial. Avec 90.416 familles de brevets, le conglomérat sud-coréen est talonné par les Chinois.

Dans le top 10, pour la première fois, figurent six sociétés et institutions chinoises. Dont l’Académie chinoise des sciences, sorte de porte d’entrée de toute la recherche chinoise, mandatée par le Parti communiste chinois, qui passe de 1.370 brevets en 2019 à 78.415 brevets en 2021. Comme si le monde de la recherche avait bien compris le message du secrétaire général du Parti communiste, fin 2020, Xi Jinping, qui regrettait la faiblesse de la propriété intellectuelle locale.

«Nous devons nous orienter davantage vers la création de nouvelles choses afin de stimuler l’innovation originale, adopter une approche clairvoyante afin de renforcer la recherche fondamentale et les technologies de pointe, et tirer parti de notre nouveau système de mobilisation à l’échelle nationale pour résoudre les problèmes difficiles liés aux technologies de base dans des domaines-clés», . «Nous devons également redoubler d’efforts pour créer, accumuler et protéger la propriété intellectuelle autochtone dans des domaines-clés, en particulier ceux qui ont une incidence sur la sécurité nationale, tels que les technologies de l’information et de la communication de nouvelle génération, la cartographie génétique, les semences de cultures de base et les produits alimentaires et pharmaceutiques importants. Pendant ce temps, un soutien actif devrait être fourni aux industries-clés pour leur configuration IP à l’étranger, car ce n’est qu’en prenant le dessus à la source du problème que la Chine pourra surmonter les obstacles qui étouffent son développement de la propriété intellectuelle et résoudre progressivement le problème de la quantité excessive et de la qualité insuffisante de la propriété intellectuelle chinoise.»

Le message a été bien entendu si l’on en juge par la présence de six acteurs chinois dans le top 10, tandis que la China National Petroleum Corp n’est plus qu’à un millier de brevets de Panasonic. 

Dans les 150 premiers au classement, notons la 15e place de Microsoft (32.173), la 24e d’Intel (25.784); la 31e d’Alphabet (22.822), avec une autre présence dans le classement avec Amazon.com (64e avec 12.484); la 37e place d’Apple (20.491) ou encore la 140e place de Meta (5.976).

Le premier européen est le groupe allemand Robert Bosch, à la 12e place. Volkswagen est 35e et Philips 40e.

La part de la Chine dans les brevets internationaux est passée de 16% en 2010 à 49% en 2020, s’était déjà ému, fin janvier, , soulignant que la part des États-Unis pendant cette période est passée de 15% à 10%, celle du Japon de 35% à 15%, et la part des pays de l’Union européenne de 12% à 8%.

Les 11 domaines de recherche à suivre

Si le poids de la Chine ne fait que s’accentuer, c’est que l’Empire du Milieu a commencé à méthodiquement regarder toutes les technologies de la planète et tous les brevets, pour juger de la pertinence de compléter son propre écosystème.

Dans le Research Fronts de 2021, qu’elle publie avec Clarivate, l’Académie chinoise des sciences met l’accent sur 11 domaines de recherche entre plus de 12.000 depuis 2015 qui, selon elle, ont le meilleur potentiel à venir.

«Nous tirerons parti de nos ressources de recherche pour effectuer une meilleure analyse prospective de la percée scientifique et technologique clé de la Chine qui pourrait affecter l’avenir du monde, ainsi que pour mieux soutenir le plan stratégique de la Chine en matière d’innovation scientifique et technologique», y explique le vice-président de la CAS, Gao Hongjun. 

Ses concurrents aux avant-postes de la recherche (les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie, la France, l’Australie, le Canada, l’Espagne et les Pays-Bas) sont prévenus.

Où va se jouer la guerre maintenant que la Chine a structuré sa marche en avant, assure un soutien très net au monde de la recherche et a mappé l’écosystème mondial? Réponse: dans l’attractivité des talents.

«Le maintien de voies pour les talents étrangers et l’offre d’opportunités éducatives aux étudiants internationaux sont essentiels pour soutenir la main-d’œuvre STEM [science, technologie, ingénierie et mathématiques]», concluent les auteurs du rapport américain, non sans souligner que si la Chine était sur le point de rattraper les États-Unis en nombre de doctorats décernés en sciences et en ingénierie, de nombreuses lacunes, régionales, démographiques ou sociales, retardent son rattrapage.