Yves Biewer, président du comité de direction de la Banque Raiffeisen, indique que les activités de l’établissement de crédit se trouvent peu exposées à la crise ukrainienne. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne)

Yves Biewer, président du comité de direction de la Banque Raiffeisen, indique que les activités de l’établissement de crédit se trouvent peu exposées à la crise ukrainienne. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne)

La banque Raiffeisen affiche des chiffres positifs pour l’année 2021. Commentant les résultats, Yves Biewer, le président du comité de direction, décrit les conséquences de la guerre en Ukraine pour les activités de la banque et annonce un renforcement des fonds propres.

La banque Raiffeisen, spécialisée dans l’épargne, le crédit et les placements, a présenté ce jeudi ses résultats annuels pour l’année 2021. Soit un résultat net d’intérêt en croissance de 3,3%. Les commissions nettes, quant à elles, enregistrent une hausse de 13,8% sur l’année. La banque indique que l’année 2021 a été particulièrement propice pour les placements de titres.

Dans la foulée, la banque a annoncé un produit net bancaire, métrique désignant la valeur ajoutée créée au travers des activités de la banque, qui affiche une progression annuelle de 5,1%. L’institution bancaire explique ce résultat par le caractère temporaire des économies réalisées en 2020 et les investissements effectués dans les outils digitaux.

Ce qui est toujours très important au niveau de la banque Raiffeisen, et ça ne change pas qu’il y ait crise ou pandémie ou autre chose, il faut être en contact proactif avec ses clients. Il y a toujours moyen de joindre un gestionnaire, que ce soit via agence mais aussi via les outils digitaux.
Yves Biewer

Yves Biewerprésident du comité de directionbanque Raiffeisen

Alors qu’il aborde le sujet de la digitalisation, , président du comité de direction de la banque Raiffeisen explique à Paperjam l’approche adoptée: «Ce qui est toujours très important au niveau de la banque Raiffeisen, et ça ne change pas qu’il y ait crise ou pandémie ou autre chose, il faut être en contact proactif avec ses clients. Il y a toujours moyen de joindre un gestionnaire, que ce soit via agence mais aussi via les outils digitaux.» Combinant de la sorte une approche physique traditionnelle et une autre digitale, la banque comptait l’année dernière 34 agences traditionnelles et une agence en ligne.

Au 31 décembre 2021, la banque a fait état d’un bilan en progression. De la sorte, elle indique que le total de son bilan a connu une hausse de 5,4% par rapport à l’exercice 2020, se portant à 10.156 millions d’euros.

Un emprunt subordonné

En ce qui concerne son passif, la banque Raiffeisen note une augmentation de 6% des fonds confiés par la clientèle non bancaire, soit l’équivalent de 505 millions d'euros, dont 284 millions sont liés à l’épargne des ménages. Pour rappel, les services non bancaires constituent généralement une gamme de services et produits légalement distribués par des institutions bancaires, sans pour autant être leur cœur de métier.

Toujours au niveau de sa clientèle non bancaire, la banque note que les grands déposants institutionnels ont renforcé sa position de liquidité avec un apport de 226 millions d’euros ainsi qu’un allongement de la durée des dépôts.


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Du côté de l’actif, l’établissement de crédit a connu une croissance de 4,3%, soit 308 millions d’euros, dans son activité des crédits à la clientèle. Ceci s’explique en partie par la progression de 6,2% de son activité principale, en l’occurrence le financement de l’accès à la propriété. Une tendance qui doit cependant être relativisée avec le ralentissement des investissements professionnels, conséquence immédiate de la crise des matières premières qui cause des ruptures dans les chaînes d’approvisionnement mondiales.

Grâce au niveau de la réserve de liquidité auprès de la Banque centrale du Luxembourg qui a démontré une certaine stabilité par rapport à la fin de 2020, les placements de la trésorerie de la banque Raiffeisen ont connu une croissance de 8,5% sur un an. Ce qui constitue le montant de 209 millions d’euros.

Pourquoi la banque n’affiche pas des résultats spectaculaires? Nous mettons énormément d’argent en réserve, tout simplement parce que nous n’avons pas besoin de payer un dividende à un actionnaire. (…) Chez nous, les résultats sont thésaurisés et c’est par ce biais-là que nous finançons notre croissance.
Yves Biewer

Yves Biewerprésident du comité de directionbanque Raiffeisen

Dans la présentation de ses résultats, la banque Raiffeisen déclare aussi avoir augmenté ses capitaux propres de 4%. Cela notamment en raison de la mise en réserve des bénéfices nets, tout en lui permettant de préserver son niveau de solvabilité. Elle explique pouvoir ainsi poursuivre ses activités de financement. Le président de son comité de direction précise que le lancement d’un emprunt subordonné se trouve en cours de préparation. «Nous avons de la demande auprès de notre clientèle qui veut participer à la croissance de notre organisation.»

«Pourquoi la banque n’affiche pas des résultats spectaculaires?», interpelle Yves Biewer qui poursuit: «Nous mettons énormément d’argent en réserve, tout simplement parce que nous n’avons pas besoin de payer un dividende à un actionnaire. (…) Chez nous, les résultats sont thésaurisés et c’est par ce biais-là que nous finançons notre croissance.»

Les conséquences macroéconomiques

Dans la perspective de la crise sanitaire, Yves Biewer commente le résultat réalisé en 2021: «Nous sommes une banque qui est très prudente. Nous sommes connus pour cela. Il n’y a jamais d’extravagances et vous voyez dans nos chiffres qu’il y a toujours de la continuité.» De ce fait, il souligne: «Nous ne cherchons pas à maximiser notre bénéfice, nous cherchons à avoir une croissance continue. Qu’il y ait alors une crise ou qu’il n’y en ait pas, ça a moins d’importance.»

La réalité économique en cours a toutefois amené la banque à créer des corrections de valeur et des provisions sectorielles. Avec la guerre en Ukraine, Yves Biewer prévoit une série de conséquences directes pour une partie de la clientèle: «À un moment donné, la note d’électricité, les prix de l’alimentation, le loyer augmentent, il ne reste alors plus assez d’argent en fin de mois pour rembourser les prêts, amenant à un défaut de paiement.»

Nous sommes une banque qui est très prudente. Nous sommes connus pour cela. Il n’y a jamais d’extravagances et vous voyez dans nos chiffres qu’il y a toujours de la continuité.
Yves Biewer

Yves Biewerprésident du comité de directionbanque Raiffeisen

Des conséquences indirectes qui se répercuteront sur la banque: «Et nous aussi, nous avons des obligations vis-à-vis de nos déposants qui nous ont confié leur argent pour que nous l’investissions. Puisque nous faisons cela de façon prudente, comme ça s’est vu durant la pandémie et comme ça se verra durant la crise que nous vivons actuellement, nous nous mettrons autour de la table pour trouver une solution socialement responsable vis-à-vis du particulier.»

Un marché local peu exposé

Le monde commercial et industriel sera également impacté. «Forcément, les entreprises qui consomment énormément d’énergie ne vont pas atteindre les résultats qu’elles comptaient atteindre en situation normale», analyse Yves Biewer. Il explique d’ailleurs que «c’est la même chose avec les productions agricoles où les prix de l’engrais sont en train d’exploser». Et «sans engrais, pas de récolte, je pèse mes mots», conclut-il, en indiquant qu’il faudra dès lors «mettre en place des moratoires pour essayer de permettre aux clients de travailler dans des situations encore relativement confortables, malgré la situation globale.»

Nous travaillons sur un marché exclusivement local. Nous connaissons notre marché, nous ne nous sommes jamais aventurés à l’étranger. Nous sommes en face d’une clientèle plutôt aisée et qui se retrouve dans un pays qui a quand même un certain nombre de moyens pour apporter de l’aide.
Yves Biewer

Yves Biewerprésident du comité de directionbanque Raiffeisen

La situation macroéconomique européenne constitue également une source de conséquences indirectes pour la banque. «La Banque centrale européenne considérait l’augmentation de l’inflation, surtout au deuxième semestre de l’année passée, comme un phénomène passager. Maintenant, on se rend compte que c’est loin d’être un phénomène passager», souligne Yves Biewer. Alors que les prévisions de l’inflation ont été revues à la hausse, Yves Biewer s’attend à une légère augmentation des taux d’intérêt d’ici la fin de l’année. «Nous sommes dans une situation de stagflation», insiste-t-il, indiquant que «si les taux augmentent, il y aura un espoir pour les épargnants sur les livrets d’épargne».

Au regard du contexte de crise ambiant, Yves Biewer tient en revanche à relativiser les impacts pour le marché luxembourgeois: «Nous travaillons sur un marché exclusivement local. Nous connaissons notre marché, nous ne nous sommes jamais aventurés à l’étranger. Nous sommes en face d’une clientèle plutôt aisée et qui se retrouve dans un pays qui a quand même un certain nombre de moyens pour apporter de l’aide.» Également, au niveau des activités de la banque, «nous n’avons pas de risques sur des secteurs à problèmes majeurs et certainement pas à l’étranger».