Vous avez été élue à l’unanimité . Vous en étiez auparavant la vice-présidente, pourquoi avoir proposé votre candidature au poste de présidente?
. – «Il y a trois ans, (qui a donc passé le relais après huit années de présidence, et qui reste dans le bureau exécutif de la CLC en tant que vice-président, ndlr) est venu me proposer de m’engager plus au sein de la confédération, pour la moderniser et amener une nouvelle dynamique. Il m’avait vue évoluer en tant que présidente de la Fédération des jeunes dirigeants d’entreprise, donc il m’a demandé si je n’étais pas intéressée de m’investir un peu plus, et de prendre plus de responsabilités. J’ai donc été élue vice-présidente il y a deux ans, et Fernand m’avait dit que lorsque je m’en sentirai prête, il proposerait ma candidature au conseil d’administration, et ce fut le cas le 31 mai dernier et j’ai eu la chance d’être élue par le CA.
Ces deux années à la vice-présidence ont été deux années de réflexion?
«J’avais en effet besoin de temps pour comprendre comment la CLC fonctionne, pour voir dans quoi je m’engageais, parce que mon entreprise vient du secteur du commerce, mais la CLC représente le transport, les services et le commerce, et c’était important pour moi de prendre le temps de comprendre les enjeux de la confédération. Une des principales raisons pour lesquelles j’ai accepté en premier lieu, c’est que je crois vraiment qu’il faut un patronat bien représenté vis-à-vis du gouvernement pour que nous, en tant que chefs d’entreprise, puissions nous concentrer sur l’opérationnel.
Quelles sont vos priorités en tant que présidente de la CLC?
«Je veux continuer l’excellent travail mené par l’équipe précédente, que l’on soit un vrai partenaire pour nos gouvernants, pour la politique en général, pour aussi leur faire comprendre les enjeux de nos entreprises, les problématiques auxquelles nous sommes confrontés, surtout à une époque comme celle-ci où nous sortons à peine d’une crise pour entrer dans une autre. Mais est-ce que finalement on appelle cela une crise ou un monde qui change très rapidement et où il faut être très résilient? Je pense qu’aujourd’hui, une de mes priorités c’est aussi ça: accompagner nos entreprises afin qu’elles soient plus résilientes, ou en tout cas les encourager à être ouvertes aux changements, les accepter, mais surtout aussi les accompagner et en tirer le meilleur pour elles. En tant que chef d’entreprise, c’est un peu dans notre ADN de voir les challenges qu’il y a, les opportunités, de changer les risques en opportunités. Il faut être agile, mais il est certain qu’il y a des secteurs où c’est plus facile de s’adapter que dans d’autres.
Une autre de mes priorités est de créer de nouvelles fédérations, car tous les secteurs ne sont pas encore représentés. La fédération du drone vient d’être créée et nous allons également créer la fédération du retail. Le but est de regrouper nos membres qui ont des intérêts communs. Et je dois apprendre à connaître nos 1.800 membres et 22 fédérations, c’est aussi une de mes priorités.
Y a-t-il des choses que vous souhaitez changer?
«Je crois vraiment que la CLC fonctionne très bien. (qui en a été le directeur durant quatre ans et demi, ndlr) et Fernand Ernster l’ont vraiment mise sur de très bons rails, la confédération a pris une très bonne dynamique. Donc, aujourd’hui, j’ai la chance de pouvoir construire sur cette dynamique avec un nouveau directeur, , mais qui possède aussi une très grande expérience au sein de la Chambre de commerce. Donc je pense qu’avec Tom, le bureau exécutif et le conseil d’administration, nous sommes bien armés pour bien défendre les intérêts de nos entreprises.
Quelles sont les grandes problématiques des entreprises luxembourgeoises?
«Une des premières est le recrutement, et on voit aussi qu’il manque des formations dans le pays. Nous manquons d’emplois non qualifiés, mais aussi d’emplois très qualifiés, c’est donc un des grands challenges et ça touche tous les secteurs, le transport, le commerce ou les services. Il faut travailler avec les entreprises parce que ce sont elles qui savent vers quels métiers il faut se tourner et lesquels vont émerger dans les années à venir. Il faut aussi former notre jeunesse pour accéder à des emplois dont nous aurons vraiment besoin dans le futur. Et il faut donner envie aux jeunes du pays de faire nos métiers, qu’ils ne les voient pas comme des voies de garage. Mais les mentalités sont en train de changer, je trouve.
Quel est votre sentiment concernant la loi sur l’accord tripartite, auriez-vous préféré des aides directes pour les entreprises?
«Non, je crois qu’aujourd’hui cet accord nous donne une certaine visibilité en tant que chefs d’entreprise. Actuellement, un des facteurs les plus difficiles à gérer, c’est l’énergie, et nous avons des aides pour l’énergie. On a eu beaucoup d’aides de l’État pour le Covid-19, on a vraiment été soutenus, pas seulement en quantité, mais aussi dans le timing. Les aides ont été rapides, le gouvernement a été là aussi pour nous écouter, pour garantir le maintien des emplois.
Quelles conséquences voyez-vous au conflit en Ukraine?
«Je pense que cette crise a un impact très différent de celui de la pandémie de Covid-19. Il y a des secteurs qui ont été très impactés par le Covid qui ne le seront pas par la guerre en Ukraine. Cette dernière est avant tout un drame humain et un drame européen. Elle a un énorme impact sur nos économies, sur l’énergie, sur les matières premières.
Vous-même, en tant que CEO des boulangeries Fischer, rencontrez-vous des problèmes au niveau de l’approvisionnement en matières premières?
«Il y a des problèmes qui sont liés à la situation en Ukraine, mais d’autres qui sont encore liés au Covid, comme des machines ou des matières premières qui viennent de Chine par exemple. Nous avons régulièrement des ruptures de stock pour le papier notamment. Notre blé, lui, vient du marché luxembourgeois, donc pour l’instant, il n’y a pas de risque de pénurie, mais le blé étant négocié sur le marché international, son prix a augmenté. Aujourd’hui, c’est à nous de nous adapter, de trouver des solutions, de mener nos entreprises sur le bon chemin en restant flexible.
Rencontrez-vous également des difficultés de recrutement au sein de votre entreprise?
«Oui, dans la vente, c’est compliqué, et même au niveau de la production, on a beaucoup de mal à recruter des boulangers, des pâtissiers, etc. On a besoin de techniciens également. Et le vivier de frontaliers n’est pas inépuisable. Actuellement, au sein de mon entreprise, nous avons environ 60% de frontaliers et la pandémie nous a bien montré que le Luxembourg est dépendant des frontaliers. Ce qui m’intéresse, c’est de rendre nos métiers attractifs pour les jeunes du pays aussi, de montrer les opportunités, les évolutions de carrière qui existent.
En tant que présidente de la CLC, vous ajoutez une nouvelle corde à votre arc. Vos journées ne sont pas trop remplies?
«Je pense justement que c’est le bon moment, parce que j’ai la chance dans mon entreprise d’avoir une superbe équipe de management en qui j’ai pleine confiance, sur laquelle je peux m’appuyer. Et c’est également le cas au sein de la CLC, avec une très bonne équipe qui est là depuis très longtemps, qui représente très bien les fédérations. Donc je suis très bien entourée, et je ne suis pas quelqu’un qui fait les choses seul. Depuis toujours, je travaille en équipe, avec des personnes avec qui je peux échanger.»