Carlo Thelen, directeur de la Chambre de commerce, et Christel Chatelain, responsable des affaires économiques, ont présenté l’avis de la Chambre de commerce sur le budget 2022 de l’État. (Photo: Blitz Agency)

Carlo Thelen, directeur de la Chambre de commerce, et Christel Chatelain, responsable des affaires économiques, ont présenté l’avis de la Chambre de commerce sur le budget 2022 de l’État. (Photo: Blitz Agency)

La Chambre de commerce a jugé trop optimiste le projet de budget 2022 de l’État et a demandé un renforcement de certaines priorités.

Après les critiques de la Chambre des métiers et de la Chambre des salariés, le budget de l’État 2022 a été moins décrié par la Chambre de commerce. Cette dernière a tout de même relevé plusieurs points nécessitant une attention particulière de la part du gouvernement, voire même un peu plus d’ambition.

, son directeur général, a plaidé pour un budget de l’État favorisant la stabilité économique du pays non pas à court terme, mais bien à long terme. Faisant le même constat que la Chambre des métiers et de la CSL, la Chambre de commerce a souligné le paradoxe économique que vit actuellement le Luxembourg. D’un côté, les indicateurs montrent un certain dynamisme avec un PIB supérieur au niveau d’avant la crise sanitaire et des prévisions de croissance plutôt favorables. D’un autre côté, les tensions sur les chaînes d’approvisionnement, la hausse des prix des matières premières sous les effets des pénuries et la flambée des prix de l’énergie, le tout dans un contexte pandémique dont on a du mal à entrevoir la fin, augmentent le sentiment d’incertitude sur les acteurs économiques.


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Les dépenses de pension comme talon d’Achille

Autre paradoxe: la Chambre de commerce a mis en avant la hausse des dépenses de l’Administration centrale de 3,4% en 2022, qui devraient s’accentuer en 2023. D’un autre côté, les recettes devraient connaître une hausse spectaculaire de 15% en 2022 par rapport au budget voté en 2021, après une hausse de 2,1 milliards d’euros cette année (+12,7) par rapport au budget précédent. Si cela laisse présager une économie dynamique, la Chambre de commerce s’interroge tout de même sur la soutenabilité pour les entreprises d’un tel bond des recettes fiscales. Le tout avec des chiffres records en ce qui concerne la dette publique, qui va atteindre les 27% d’ici à 2025. Cette dernière devrait rester maîtrisée, mais laissera peu de marge de manœuvre au pays.

En parallèle, le talon d’Achille des finances luxembourgeoises restera les dépenses de pension, qui passeront de 9% du PIB actuel à 15% en 2045, et à 18% en 2070, soit la plus forte hausse au sein de l’Union européenne, alors que le surplus des administrations de sécurité sociale va en diminuant, passant de 1,4% du PIB à 0,9% du PIB en 2025.

Trois axes prioritaires

La Chambre de commerce a ciblé trois axes prioritaires que devrait soutenir le budget 2022 de l’État, à savoir: une économie plus diversifiée, une révolution digitale, et une transition environnementale et énergétique.

La Chambre de commerce plaide pour des efforts supplémentaires pour diversifier l’économie du pays, estimant qu’ils sont pour le moment trop timides. «Les crédits budgétaires alloués à la formation, la RDI et aux secteurs d’avenir se caractérisent soit par une stagnation, soit par une augmentation inférieure à celle du PIB. À l’inverse, les dépenses de rémunération et les transferts sociaux connaissent une croissance autrement plus prononcée», souligne la Chambre de commerce.

Elle pointe également les investissements dans les infrastructures, qui sont élevés, mais finalement moins que dans le passé. Ainsi, selon le projet de loi de programmation des finances publiques (PLPFP), entre 2022 et 2025, l’État va investir 4,7% du PIB en infrastructures. C’est moins que les 5% du PIB entre 2002 et 2005, et à peine plus que les 4,2% du PIB entre 2000 et 2019.

Se donner les moyens de la transition digitale

Si la Chambre de commerce a salué la volonté du gouvernement de faire de la digitalisation du pays une priorité majeure, elle a souligné la nécessité de se donner les moyens de cette ambition. Elle juge d’ailleurs que le budget 2022 ne donne que peu de moyens à cette ambition. «Les crédits en faveur de la digitalisation paraissent faibles et ne progresseront que modestement, et ce, en dépit de la montée en puissance générale du numérique. En effet, les dépenses courantes du ministère de la Digitalisation dépassent à peine 1% du total des dépenses de l’État central», souligne Christel Chatelain, responsable des affaires économiques de la Chambre de commerce. 

Peu de visibilité sur les dépenses liées à la transition climatique

La Chambre de commerce a également salué la hausse des budgets dédiés à la transition énergétique et à la relance verte. Mais elle regrette un manque de visibilité sur le sujet et un manque de documentation sur la  ventilation détaillée et désagrégée des investissements environnementaux et climatiques, et des dépenses pour la mise en œuvre du PNEC. 

L’absence de mesures concrètes de soutien aux entreprises pour faire face à la flambée des prix de l’énergie et des matières premières a aussi été relevée. Alors que l’inflation des prix de l’énergie constituera un défi majeur pour les acteurs privés en 2022. De même, après la présentation de la stratégie hydrogène du Luxembourg, la Chambre de commerce s’étonne que le projet de budget ne contienne aucune annonce sur l’impact budgétaire de cette stratégie, ni sur la création d’un fonds de préfinancement et de gestion des risques. Enfin, aucune adaptation offrant une nouvelle dimension incitative n’est proposée en ce qui concerne la taxe CO2, ni aucune trajectoire pour l’évolution future de celle-ci au-delà de 2023. Afin de permettre aux entreprises de se projeter et d’anticiper de possibles hausses des coûts, la Chambre de commerce invite le gouvernement à présenter rapidement cette trajectoire, après concertation avec l’ensemble des parties prenantes.