Richard Forson, CEO de Cargolux, a assuré avoir répondu raisonnablement aux revendications des syndicats LCGB et OGBL. Faisant front commun, les partenaires sociaux ne sont pas de cet avis et ont annoncé faire grève ce jeudi 14 septembre. (Photo: Paperjam)

Richard Forson, CEO de Cargolux, a assuré avoir répondu raisonnablement aux revendications des syndicats LCGB et OGBL. Faisant front commun, les partenaires sociaux ne sont pas de cet avis et ont annoncé faire grève ce jeudi 14 septembre. (Photo: Paperjam)

Après que Cargolux a versé près de 200.000 euros de prime à chaque employé ces trois dernières années, un bras de fer vient de s’engager entre le CEO de Cargolux, Richard Forson, et les syndicats, qui ont annoncé une grève des salariés jeudi 14 septembre.

Le ton est calme mais ferme. Jusqu’ici assez discret, le CEO de Cargolux, , a invité la presse à prendre connaissance des détails de la dernière offre que la direction a adressée aux syndicats. «Sur les trois dernières années, Cargolux a versé à chaque employé, indépendamment des performances individuelles, 198.744 euros de prime», a-t-il expliqué.

Dans le détail, graphique à l’appui, Richard Forson a précisé que cette participation au bénéfice a été de 37.502 euros en 2020, 75.946 euros en 2021 et de 85.296 euros l’année dernière.

Le CEO conçoit qu’il soit facile de pointer du doigt la direction au regard des derniers résultats records de la société. Pour rappel, Cargolux a réalisé  (1,579 milliard de dollars) en 2022, soit une hausse de 21,9% par  (1,295 milliard de dollars). Il s’agissait déjà d’un record par rapport à celui de 2020, qui avait été porté par la demande en matériel liée à la crise sanitaire.

Cependant, Richard Forson s’est défendu en expliquant sa vision à moyen et long terme devant garantir une certaine stabilité à la compagnie. «Les syndicats veulent utiliser les réserves de trésorerie pour les reverser à leurs membres sous forme d’avantages permanents supplémentaires et des demandes d’augmentation salariale déraisonnables, en plus d’une participation aux bénéfices», a martelé le CEO.

Ce dernier a également expliqué que les bons résultats financiers de la compagnie au cours des trois dernières années en raison de la pandémie ont permis de lancer un programme de renouvellement de la flotte, soit  avec une option pour six appareils supplémentaire. «Cela va renforcer la résilience de la compagnie aérienne pour faire face à la volatilité du secteur du fret tout en améliorant la sécurité de l’emploi», a encore assuré Richard Forson.

5% d’augmentation sur cinq ans

En ce qui concerne les négociations salariales, le directeur de Cargolux assure avoir proposé une augmentation de 5% sur cinq (contre 6% sur quatre ans revendiqués par les syndicats) ainsi qu’une garantie de compenser un plafonnement de l’indexation des salaires si cela devait arriver, sous conditions d’avoir au moins 200 millions d’euros de cash en banque.

Enfin, Richard Forson assure avoir également proposé un système de grille salariale différente que celui proposé par les syndicats, mais «plus équitable» pour l’ensemble des salariés. Concernant le télétravail, la direction souhaite avoir la possibilité de rappeler les employés sur site uniquement à des fins de continuité des activités tout en consultant la délégation du personnel.

Ce bras de fer rappelle celui qui avait déjà opposé les syndicats et la direction de Cargolux en 2015 et 2019 autour des négociations concernant la convention collective.

Les syndicats refusent de négociation sur la place publique

Moins de quinze minutes après la présentation des chiffres du directeur de Cargolux, la réponse des syndicats ne s’est pas fait attendre. «Contrairement aux dires du directeur général, une augmentation de 5% sur cinq ans n’a jamais été officiellement soumise et les syndicats refusent par ailleurs cette tentative de négociation sur la place publique», ont réagi les deux syndicats avant d’avancer des contre-arguments concernant ces primes d’un montant de près de 200.000 euros par employé sur les trois dernières années. «La dernière proposition de Cargolux était de 4% sur cinq», a précisé le LCGB.

«L’augmentation salariale de 6% revendiquée par les syndicats ne peut être mise en relation avec la prime de participation aux bénéfices de la société. D’une part, cette prime dépend du résultat net que l’entreprise a pu réaliser ensemble avec son personnel au cours d’une année. D’autre part, les participations au bénéfice payées pour 2020, 2021, et 2022 résultent d’une situation exceptionnelle et des résultats records dus à la pandémie et ne constituent pas un acquis durable. Ceci dit, le montant des primes de participation au bénéfice payées en 2006, 2010 et 2018 était nettement inférieur au montant payé ces 3 dernières années dans le cadre de la pandémie. En raison des investissements prévus pour le renouvellement de la flotte de la Cargolux, le paiement d’une telle prime pour les années à venir devient beaucoup plus improbable et ne constitue donc pas une amélioration durable des salaires contrairement à une augmentation salariale», a largement analysé le front syndical.


Lire aussi


De plus, le LCGB et l’OGBL maintiennent: «Nos revendications sont raisonnables». «Au Luxembourg, le débrayage n’est pas banal. Et l’on a tout fait pour éviter d’arriver à cette action de grève. Après 27 réunions de négociations et de cinq réunions à l’Office national de conciliation, aucun accord n’a pu être trouvé lors de la dernière réunion auprès de l’ONC en date du 31 août entre la direction de Cargolux et les syndicats. Lundi 11 septembre, nous avons encore organisé une réunion de la dernière chance avec la direction, sans succès», a expliqué le Secrétaire syndical du LCGB, Paul de Araujo, en charge du secteur de l’aviation.

«Si on regarde ce qui se fait dans le secteur de l’aviation dans d’autres pays, les revendications sont autour des 15% à 17% d’augmentation. Nous avons le système d’indexation des salaires qui permet de lutter en partie contre l’inflation. Au cours des négociations, la direction a proposé une augmentation de 4%. Il manque donc encore 2%», a encore précisé Paul de Araujo avant de terminer: «Pour le moment, la grille salariale est un patchwork». «C’est un constat d’échec, les avions seront cloués au sol. Si la direction de Cargolux change d’avis, ils savent nous contacter», a lancé la Secrétaire syndical du, Michelle Cloos, en charge du secteur de l’aviation.

«Des emplois attractifs pour une Cargolux attractive, voici la seule unique raison d’être de la grève des salariés qui débutera demain matin», ont conclu les partenaires sociaux.

De son côté, Richard Forson a regretté une telle situation en soulignant qu’«une grève portera à la réputation de Cargolux et à ses relations avec la clientèle. Elle aura également un impact financier, mais cela ne semble pas être important pour les syndicats.»