Les points de basculement climatiques – entre autres l’effondrement des calottes glaciaires, la fonte du permafrost, le retournement de la circulation des océans ou encore le dépérissement de la forêt amazonienne – sont bien plus probables que ce que nous imaginions, selon un rapport de la direction de l’environnement de l’OCDE publié en décembre.
Ces tipping points sont en effet souvent perçus comme catastrophiques mais peu probables à de faibles niveaux de réchauffement. Conséquence: «Les politiques mondiales ciblant explicitement ces risques restent pratiquement inexistantes», constate l’OCDE. Celle-ci explicite son propos: «Traditionnellement classés dans la catégorie des risques faibles, les points de basculement du système climatique sont souvent interprétés à tort comme ayant une forte probabilité de ne pas se produire et sont donc négligés dans la prise de décision en matière de politique climatique.»
Seuils critiques franchis
Pourtant, les connaissances scientifiques actuelles amènent à des conclusions inverses à cette notion généralement admise que le risque est faible. D’importants points de basculement sont déjà «possibles» aux niveaux actuels de réchauffement et pourraient devenir «probables» dans une fourchette allant de 1,5 à 2 °C de réchauffement. L’OCDE s’inquiète même que, «dès aujourd’hui», des seuils critiques soient déjà en train ou sur le point d’être franchis.
«Les preuves scientifiques actuelles plaident sans équivoque en faveur d’une action climatique sans précédent, urgente et ambitieuse pour faire face aux risques de basculement du système climatique», déclare l’organisation internationale, estimant «le défi climatique encore plus urgent» et qu’il est «vital» de ne pas dépasser 1,5 °C de réchauffement.
Conséquences abruptes et irréversibles
De fait, les conséquences de ces points de bascule, abruptes et irréversibles, pourraient être très graves à une échelle régionale ou locale (températures extrêmes, fréquence accrue des sécheresses, feux de forêt sans précédent), mais aussi planétaire (émissions supplémentaires de gaz à effet de serre, boucle de rétroaction des températures, accélération de l’élévation du niveau de la mer).
«L’Amazonie, aujourd’hui une forêt tropicale, pourrait se transformer en savane et, d’une région qui capte du CO2, deviendrait une région qui en rejette dans l’atmosphère», illustre la députée (déi Gréng). «De même avec le permafrost qui est en train de fondre.»
La députée, qui s’est déplacée à la COP27 de Charm el-Cheikh, s’est d’ailleurs réjouie que les avancées dans le cadre des négociations formelles aient permis d’inscrire la reconnaissance des points de basculement dans le – une première –, au même titre que la reconnaissance des derniers travaux du Giec ou le maintien de l’objectif de ne pas dépasser 1,5 °C de réchauffement.
Un réchauffement non linéaire
«Il est important qu’ils soient dans le texte», commente-t-elle. «C’est la reconnaissance que le climat ne se réchauffe pas lentement et linéairement mais qu’il y a bel et bien des risques de boucles de rétroaction des températures», ajoutant que «cela montre que nous devons vraiment parvenir à ne pas dépasser 1,5 °C – il y aurait alors vraisemblablement des conséquences encore plus néfastes que ce que nous craignons aujourd’hui.»
Pour autant, dans son dernier rapport publié en octobre dernier sur les différences entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions, le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) évalue qu’avec les politiques actuellement en place, le monde se dirige vers une hausse des températures de 2,8 °C d’ici la fin du siècle. Dans un tel cas de figure, l’OCDE s’alarme quant au risque de «coûts économiques et éthiques incommensurables dans un avenir proche».
Cet article a été rédigé pour la newsletter Paperjam Green, le rendez-vous mensuel pour suivre l’actualité en matière d’environnement, de climat, de mobilité, de RSE et de green finance. .